Santé financière : les organismes francophones appellent le fédéral à l’aide

Le premier ministre Justin Trudeau lors de la présentation du Plan d'action pour les langues officielles en 2018. Crédit image: Stéphane Bédard

OTTAWA – Les organismes de la francophonie minoritaire demandent au gouvernement Trudeau 300 millions de dollars supplémentaires pour assurer leur survie financière alors qu’un organisme sur six se dit en situation précaire.

C’est ce qu’avance la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada qui affirme avoir consulté 188 organismes de la francophonie minoritaire pour en arriver à cette conclusion. Dans ce lot, 63 % soutiennent ne pas disposer d’un budget suffisant pour répondre à leur mission de base, et près des deux tiers disent subir une pénurie de personnel. 90 % avancent par ailleurs être forcés d’offrir un salaire moyen inférieur au salaire moyen au Canada.

« On peut voir à l’horizon des scénarios très plausibles de fermetures d’organismes francophones, car ils ne seront plus en mesure de recruter pour pourvoir des postes ou d’offrir des salaires décents pour les employés », rapporte la présidente de la FCFA, Liane Roy.

En Ontario, la situation est encore pire d’après la consultation effectuée par la FCFA. Selon les chiffres de 2020-2021, la plus grosse province au pays comportait 92 organismes bénéficiaires des enveloppes fédérales pour une moyenne de 63 600 $ par organisme. Dans les autres provinces et territoires, les organismes disposent au minimum chacun, en moyenne, 108 000 $ en dépenses.

Le portrait par province et territoire des dépenses des organismes francophones en situation minoritaire. Source :FCFA

Vers un plus gros montant?

La FCFA souhaite que 280 des 300 millions de dollars sur cinq ans servent à bonifier le financement des organismes pour une augmentation totale de 66% et d’accroître de moitié le bassin des bénéficiaires.

« Il y a plusieurs organisations depuis des années qui vont chercher des enveloppes de projets ici et là, mais ce n’est pas suffisant pour assurer la santé globale de l’organisme et ça les maintient dans un esprit de précarité perpétuelle et souvent ils ont un roulement de personnel très élevé », souligne le directeur général de la FCFA Alain Dupuis.

L’organisme des francophones du Canada souhaite que ce montant soit inclus dans le prochain Plan d’action pour les langues officielles qui sera en vigueur du 1er avril 2023 jusqu’en 2028. Ce plan est le document qui guide le gouvernement durant cinq ans sur sa façon de gérer les enjeux relatifs aux communautés en milieu minoritaire. S’il est plutôt inconnu pour les Canadiens, il constitue un guide de référence pour les organismes communautaires en milieu minoritaire, dont le fédéral a recueilli leurs doléances cet été lors des consultations de ce Plan.

Lors du dernier Plan d’action, le fédéral avait investi un montant record de 500 millions de dollars, mais seuls 10 % de ce montant était destiné aux organismes soutien la FCFA.

« Dans le dernier Plan d’action, on est juste revenu sur des montants qui étaient vraiment inacceptables, car ça faisait des décennies qu’il n’y avait pas eu d’augmentation. C’est juste de rendre le verre au tiers, car avant, il était complètement vide. Là, c’est juste de rétablir la situation pour arriver à quelque chose de plus viable et de plus acceptable pour nos organisations », espère Mme Roy.

La ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor dit « entendre le cri du cœur des organismes qui demandent des ressources additionnelles pour qu’ils puissent continuer à bien faire leur travail ».

« Le rapport déposé aujourd’hui par la FCFA réitère l’urgence d’agir pour renverser le déclin du français et assurer la vitalité des communautés francophones et acadienne au pays », a-t-elle ajoutée dans une déclaration par courriel.

La FCFA soutient que sa demande va main dans la main avec l’essor du français dans les milieux minoritaires.

« Les organisations communautaires sont celles qui font vivre le français au quotidien à l’extérieur de nos écoles et je pense qu’il ne faut pas le sous-estimer. Le milieu communautaire est le poumon qui fait vivre le français au quotidien et si on perd ça, on perdra énormément la capacité de faire croître le français pour la prochaine décennie », estime Alain Dupuis.

En août, Statistique Canada a publié les chiffres du français au pays montrant un déclin en Ontario et dans toutes les autres provinces et territoires en majorité.