Suspension d’une professeure à l’U d’O : « Tolérance zéro pour le racisme », dit l’Ontario
TORONTO – Le ministre des Collèges et Universités de l’Ontario, Ross Romano, refuse de pointer du doigt l’Université d’Ottawa ou la professeure Verushka Lieutenant-Duval, accusée d’avoir utilisé le mot « mot en n » en salle de classe. Le ministre affirme plutôt avoir « une politique de tolérance zéro en matière de discrimination de toute nature » et qu’il « revient aux universités de fournir un environnement d’apprentissage sûr et favorable ».
Dans un échange de courriels avec ONFR+, le bureau du ministre Romano refuse de s’avancer à savoir si les propos de Mme Lieutenant-Duval ont leur place dans une salle de classe.
« Le gouvernement a une politique de tolérance zéro en matière de discrimination de toute nature et le ministre Romano attend la même chose de tous les établissements postsecondaires de l’Ontario. La sécurité et le bien-être de chacun sur nos campus postsecondaires sont une responsabilité essentielle de nos collèges et universités. »
Le ministre Romano affirme qu’il revient aux universités de « s’attaquer » au racisme.
« Les établissements d’enseignement postsecondaire de l’Ontario ont la responsabilité de fournir un environnement d’apprentissage sûr et favorable et doivent faire tout leur possible pour s’attaquer aux problèmes de racisme et de discrimination sur les campus. »
Le ministre progressiste-conservateur ne répond pas à savoir s’il a aussi parlé au recteur de l’Université d’Ottawa, Jacques Frémont.
Au bureau du ministère des Affaires francophones, on dénonce la haine et les propos anti-francophones qu’ont subis des professeurs dans les derniers jours.
« Il est très préoccupant d’entendre des allégations d’intolérance à l’endroit des francophones. Toute forme de haine envers la communauté franco-ontarienne est inacceptable », dénonce le ministère.
« Notre gouvernement est conscient de l’importance de protéger la liberté d’expression et les droits des minorités culturelles et linguistiques de l’Ontario. Certaines discussions dans un milieu universitaire peuvent toucher à des sensibilités culturelles chez les étudiants », ajoute le bureau de Caroline Mulroney.
De son côté, le bureau du premier ministre Doug Ford n’a pas souhaité commenter le sujet, renvoyant plutôt vers la déclaration du ministre Romano.
L’opposition dénonce la position du gouvernement
Ayant elle même travaillé dans le monde de l’éducation, la députée libérale d’Ottawa-Vanier, Lucille Collard, s’est dit « déçue de l’expérience négative qu’ont vécue les étudiants ».
« Dans cette situation, il est clair que l’utilisation du « mot en n » a rendu plusieurs étudiants inconfortables et ce mot complet ne devrait pas être utilisé », avance-t-elle.
Cette dernière pense que le ministre Romano se doit de « reconnaître les problèmes de racisme systémique » dans les universités et collèges en Ontario.
« Le ministre Romano, en tant que ministre des Collèges et Universités, doit être à l’écoute de la population étudiante et a un rôle à jouer en améliorant l’environnent d’enseignement (…) et en proposant des solutions qui encouragent une plus grande diversité et compréhension dans le personnel d’enseignement », soutient Mme Collard.
La classe politique se prononce
Après une réaction en chaîne des partis politiques québécois dénonçant la décision de l’Université d’Ottawa de ne pas défendre la liberté académique, l’affaire a eu des échos à Ottawa, aujourd’hui.
« Nous devons tous être conscients de la portée de nos paroles. Nous favorisons le respect des autres et l’écoute des communautés. Notre priorité est toujours de mettre de l’avant des actions concrètes pour combattre le racisme », a lancé le premier ministre, Justin Trudeau, lors de la période des questions à la Chambre des communes.
« Il a oublié le sirop d’érable dans le pablum, ça ne goûte pas grand-chose », a ironisé Yves-François Blanchet, le chef du Bloc Québécois, en réaction à la réponse de son adversaire libéral.
La prise de position du ministre Romano fait contraste avec sa collègue québécoise, la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann.
« Il faut écouter les gens qui sont touchés par ces mots, mais, en même temps, protéger la liberté académique et cette vocation de nos établissements d’enseignement supérieur », a-t-elle indiqué en entrevue à QUBradio.
De son côté, Jagmeet Singh, le chef du Nouveau Parti démocratique a déclaré, hier, « qu’un professeur ne doit pas utiliser un mot comme ça qui est chargé, qui est plein de racisme historique, qui peut blesser les autres ». Le contraire de son rival, Erin O’Toole, chef du Parti conservateur, qui a écrit pour sa part, sur Twitter, qu’« il faut se tenir debout face à la censure, particulièrement dans nos universités ».
Cet article a été mis à jour à 17h10