Un bilan à défendre pour Catherine McKenna dans Ottawa-Centre
La députée libérale sortante Catherine McKenna espère réitérer son exploit de 2015 dans Ottawa-Centre. Mais dans cette circonscription que se disputent, historiquement, libéraux et néo-démocrates, ses adversaires comptent bien lui faire porter le bilan des décisions plus controversées du gouvernement de Justin Trudeau.
LE CONTEXTE
En 2015, Catherine McKenna avait déjoué les sondages et profité de la vague libérale pour ravir son siège au député néo-démocrate, Paul Dewar. Cette année, elle ne bénéficiera pas du même effet de surprise, d’autant qu’à titre de ministre de l’Environnement et du Changement climatique du gouvernement de Justin Trudeau, elle s’est souvent retrouvée sous le feu des projecteurs.
« Les changements climatiques sont une préoccupation des électeurs et nous avons pris des mesures pour nous attaquer à cette grande bataille. Steven Guilbeault [écologiste québécois cofondateur d’Équiterre et candidat libéral pour cette élection] a dit que nous sommes le gouvernement qui a le plus fait avec un plan ambitieux et pratique. »
Son analyse n’est forcément pas celle de ses adversaires, dont la candidate néo-démocrate, Émilie Taman, qui après avoir tenté sa chance, sans succès, dans Ottawa-Vanier, espère reprendre le siège occupé de 2006 à 2015 par M. Dewar.
« Quand je fais mon porte-à-porte, les gens sont déçus des décisions environnementales qui ont été prises par les libéraux et par l’abandon de la réforme électorale », explique-t-elle, soulignant que son parti est « une alternative crédible aux libéraux ».
La circonscription d’Ottawa-Centre a un long historique d’un vote partagé entre le NPD et le Parti libéral du Canada (PLC). Le Parti vert pourrait profiter de cet historique de vote plutôt progressiste, selon sa candidate Mme Keller-Herzog, qui représentera le parti d’Elizabeth May pour la première fois.
« Je me suis décidée en lisant, dans The Globe and Mail, l’aide fédérale de 1,6 milliard promise par les libéraux au secteur pétrolier et gazier. Ils n’ont aucune volonté politique d’agir contre la crise climatique! »
De l’autre côté de l’échiquier politique, Carol Clemenhagen, du Parti conservateur du Canada (PCC) ne compte pas se laisser impressionner par un historique électoral défavorable à son parti.
« Je suis inquiète de l’irresponsabilité fiscale des libéraux qui va nuire à notre capacité future d’investir dans des domaines aussi prioritaires que la santé ou l’action climatique. On doit penser au futur et pour cela, ça prend une approche responsable fiscalement, qui respecte les électeurs et les contribuables, en faisant des investissements ciblés, selon nos moyens. »
Le Parti progressiste-conservateur du Canada a réussi à une seule reprise à convaincre les électeurs d’Ottawa-Centre, lors de l’élection partielle de 1978.
Mais pour celles et ceux qui cherchent une alternative, Merylee Sevilla, du Parti populaire du Canada (PPC), assure être la candidate idoine.
« Voter pour moi, c’est voter pour le changement et pour restaurer les valeurs canadiennes de liberté, d’équité, de responsabilité et de respect. (…) Je suis fatiguée de ce jeu de balancier entre deux partis qui devraient être différents, mais qui ne le sont pas », explique la candidate qui s’engage à faire, pour chaque année passée à la Chambre des communes, un don à des organismes qui offrent des programmes et des services qui aident la communauté.
ENJEUX
L’environnement est sur toutes les lèvres des candidats dans Ottawa-Centre. Sans surprise, Mme McKenna, ministre de l’Environnement et du Changement climatique, se pose en championne de cet enjeu.
« Je veux faire d’Ottawa la ville la plus verte, inclusive et prospère du Canada », dit-elle, énumérant ses accomplissements, notamment pour l’assainissement de la rivière des Outaouais ou la seconde phrase du train léger.
Agitant le spectre de perdre cette dynamique sous un gouvernement conservateur, renvoyant dos à dos Andrew Scheer et le premier ministre ontarien Doug Ford, elle promet donc de poursuivre sur cette voie, tout en agissant sur le logement abordable et l’aide aux jeunes.
Pour Mme Taman, l’inauguration du train léger et les plans pour son extension ne sont pas suffisants.
« Ça prend un système de transport fiable et pour tout le monde, qui mise aussi sur les autobus électriques. »
La candidate néo-démocrate ne peut pas non plus se faire à l’idée qu’une ville aussi riche qu’Ottawa compte encore autant de gens sans logement ou dans une situation précaire.
« J’ai rencontré quelqu’un qui loue un balcon, c’est inacceptable! »
Elle milite donc pour que les projets de construction dans la ville ne comptent pas que des condos de luxe, mais intègrent aussi du logement abordable, comme sur les plaines LeBreton.
Avant d’investir en infrastructure comme elle le souhaite, la candidate conservatrice Mme Clemenhagen insiste sur l’importance de la responsabilité fiscale afin de rendre la vie plus abordable.
« Régler le niveau de la dette est un prérequis pour investir », dit-elle, citant l’exemple de l’Ontario et de la dette laissée au gouvernement actuel par son prédécesseur libéral.
Si la lutte contre les changements climatiques, notamment via une production énergétique renouvelable et décentralisée, fait forcément partie des priorités de Mme Keller-Herzog, la candidate verte insiste aussi sur l’accès à la santé et le développement d’une économie saine.
« On doit pousser tous les gouvernements à changer les règles et à investir dans les énergies locales et renouvelables », juge-t-elle.
Seule la candidate du PPC, Mme Sevilla n’aborde pas la question environnementale, préférant diriger son attention sur le développement des plaines LeBreton.
« Je veux régler la situation et travailler avec tous les niveaux de gouvernement et toutes les parties pour voir comment on peut mettre en place un projet qui bénéficiera à tous. Faire un autre Lansdowne n’aide pas les résidents, mais ne rien faire n’aide pas non plus la communauté. »
La francophonie vue par les candidats
Sur les cinq candidats interrogés par ONFR+, seule Mme Sevilla, originaire de Colombie-Britannique, confie ne parler qu’un peu le français. Raison pour laquelle elle insiste sur l’importance de promouvoir et d’appuyer son apprentissage.
« En tant que ville et pays bilingues, je pense qu’il est important que nous appuyons autant les programmes et l’éducation en français que nous le faisons pour l’anglais. »
Ses adversaires ont tous, à des degrés divers, pu se prononcer dans la langue de Molière. Et quand vient le temps d’évoquer la population francophone qui vit dans sa circonscription, Mme McKenna, dont la mère est originaire de Val-d’Or, rappelle l’engagement de son parti à moderniser la Loi sur les langues officielles et dit vouloir continuer à investir dans le bilinguisme de la capitale nationale, notamment au niveau touristique et culturel.
Mme Taman promet pour sa part à continuer à travailler avec la communauté francophone, notamment pour protéger le français, mais aussi pour appuyer l’immigration francophone.
Si pour Mme Keller-Herzog, la culture franco-ontarienne est une part importante de la mosaïque canadienne, la candidate conservatrice rappelle l’appui du PCC à l’Université de l’Ontario français et aussi à la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
LES PRINCIPAUX CANDIDATS
Catherine McKenna, Parti libéral du Canada
Carol Clemenhagen, Parti conservateur du Canada
Émilie Taman, Nouveau Parti démocratique
Angela Keller-Herzog, Parti vert du Canada
Merylee Sevilla, Parti populaire du Canada
LA CIRCONSCRIPTION EN BREF
Nom : Ottawa-Centre
Population (2016) : 118 038
Électeurs inscrits : 94 858
Revenu médian des ménages : 70 508 $
Proportion de francophones (selon la première langue officielle parlée, déclarée au recensement de 2016) : 11,7 %
Députée sortante : Catherine McKenna, Parti libéral du Canada, depuis 2015