Un projet pour faire entrer les arts dans toutes les écoles francophones
OTTAWA – Un projet de 2,9 millions de dollars sur deux ans doit permettre de faire entrer les arts dans toutes les écoles de langue française en développant une structure à même de recruter et de former des enseignants en arts en français au Canada et répondre, ainsi, au manque actuel.
« En 2018, avec la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF), nous avons fait une tournée des conseils scolaires francophones à travers tout le Canada pour évaluer les besoins. Dans bien des écoles, faute de spécialistes, ils ne peuvent même pas enseigner les arts. Ça m’a vraiment attristée! », lance Carole Myre.
La directrice générale du Centre d’excellence artistique de l’Ontario (CEAO) place donc beaucoup d’espoir dans le projet La ruchée, mené par la FCCF, dont son institution et le Conseil des écoles publiques de l’Est de l’Ontario (CEPEO) sont partenaires.
« Ça fait 38 ans que nous avons développé une expertise, on est un bon exemple de ce qui est possible de faire. On peut partager nos connaissances et aider à la formation », estime Mme Myre. « Il y a une pénurie d’enseignants francophones au Canada, mais elle est encore plus importante pour les enseignants en arts. Il faut s’entraider et créer un bassin de spécialistes. On doit faire entrer les artistes dans les écoles et former les enseignants généralistes pour qu’ils puissent enseigner différentes formes d’arts. »
Huit équipes, 60 personnes mobilisées
Le président de la FCCF, Martin Théberge explique le fonctionnement de ce projet.
« Il s’agit d’un laboratoire d’éducation artistique qui nous permettra de développer des idées, de trouver des pistes de solution, puis de les essayer. C’est la première étape qui doit nous permettre, ensuite, de créer un centre d’expertise pour l’enseignement des arts en français au Canada, car on s’est rendu compte qu’il y a un grand besoin pour le recrutement et la rétention des enseignants en arts, ainsi que pour la formation. »
Huit équipes de 60 personnes, issues du domaine des arts, de la culture et de l’enseignement de partout au Canada, travailleront chacune sur différents thèmes spécifiques qui restent encore à déterminer.
L’objectif : se pencher sur la formation initiale des enseignants en arts et leur développement professionnel continu, expérimenter des concepts et mobiliser les connaissances, ainsi qu’établir les conditions nécessaires à la création de ce futur centre d’expertise pour l’enseignement des arts en français au Canada.
« On veut aussi faire entrer les artistes dans les écoles. Il y a des endroits où ça ne se fait pas encore. Il faut donc les accompagner en les aidant à développer l’aspect pédagogique », ajoute Mme Myre.
Les arts comme vecteur linguistique
Lancé début novembre, ce projet est financé par le gouvernement fédéral.
« Dans un contexte où le recrutement et la rétention du personnel enseignant sont difficiles, nous sommes heureux que de tels projets soient menés. En mettant en lumière des perspectives de carrière passionnantes pour les futurs diplômés en éducation et en offrant des occasions de ressourcement aux experts qui sont déjà sur le terrain, nous sommes persuadés que ce programme novateur insufflera un nouvel élan chez les enseignants qui œuvrent dans les communautés francophones en milieu minoritaire », a expliqué la ministre du Développement économique et des Langues officielles, Mélanie Joly, par voie de communiqué.
L’enjeu est de taille selon Mme Myre.
« Les arts, c’est le véhicule de notre langue. À la maison, les jeunes ne consomment pas forcément des arts et de la culture en français. C’est à l’école qu’ils y prennent goût! », explique-t-elle.
Et de poursuivre : « Il ne faut pas non plus oublier qu’à l’ère de l’intelligence artificielle, beaucoup des futurs emplois n’existent pas encore et que la créativité sera un élément important pour permettre de s’adapter. L’art est donc d’autant plus essentiel. »
Pour la FCCF, il s’agit aussi de veiller au renforcement des liens entre les arts et la culture avec le monde de l’éducation.
« Mon rêve, c’est que chaque école francophone, primaire et secondaire, partout à travers le Canada, dispose au moins d’un spécialiste pour offrir de l’enseignement en arts », sourit Mme Myre.