Le 27 octobre, durant le congrès annuel de l'AFO, un panel sur le vieillissement animé par la journaliste Rachel Crustin a offert des pistes de réflexion pour amener les soins de santé en français vers un meilleur avenir. Quatre panélistes ont fait vivre le débat pendant plus d'une heure. Crédit image: Lila Mouch

RICHMOND-HILL – Durant le congrès annuel de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) qui se déroule jusqu’au 29 octobre, un panel sur le vieillissement a apporté des pistes de réflexion sur la situation des seniors francophones. L’une d’entre elles étant de s’inspirer du modèle de l’éducation francophone en l’appliquant aux systèmes de soins pour les personnes âgées. 

En Ontario, «  31 % des francophones ont 50 ans et plus  », a expliqué Jean Bouchard lors de ce panel, vendredi. Les nombreux baby-boomers qui arrivent et arriveront prochainement à la retraite veulent planifier leur vieillissement. 

«  Il y a deux choses dont nous sommes certains dans la vie, ce sont les taxes et la mort  », a plaisanté celui qui est derrière l’initiative du projet de la Communauté du Trille blanc (CTB), un village multigénérationnel et francophone dans la région du Grand Toronto. 

À ses côtés, Diane Quintas, directrice générale du Réseau mieux-être francophone du Nord, Sean Keays, directeur du Foyer Richelieu Welland et Michel Tremblay, directeur général de la Fédération des aînés et des retraités francophones de l’Ontario (FARFO) ont débattu longuement.

Au cours de ces échanges modérés par la journaliste d’ONFR Rachel Crustin, Michel Tremblay a proposé de s’inspirer de la gestion des écoles francophones et de l’appliquer à un système de soins pour les personnes âgées. «  En 1998, nous avons réussi à avoir nos conseils scolaires et notre gestion, pourquoi ne pas faire pareil ?  », a-t-il suggéré. 

Il faut un village pour élever un enfant… et pour les vieux aussi

«  Aidons nos aînés, nos villages doivent s’impliquer  », est convaincu M. Bouchard. 

La question des soins de santé au domicile a certainement été le sujet le plus clivant de ce panel. Les quatre intervenants ont décortiqué le problème pour aboutir à une conclusion commune : il existe des solutions pour attirer des soignants à domicile, notamment l’immigration, la formation et la valorisation du métier. 

Jean Bouchard, président du conseil d’administration de la Communauté du trille blanc. Crédit image : Lila Mouch

Tous favorables aux soins à domicile, les panélistes ont tout de même souligné quelques critères et pointé ce qui ne fonctionne pas. 

«  Dans une situation de vulnérabilité, nous ne ferons pas entrer un étranger chez nous  », a fait remarquer M. Bouchard. «  Qui plus est, en anglais  », a renchéri Diane Quintas. «  Les soins de services à la maison sont inégaux partout en Ontario  », a souligné par ailleurs M. Tremblay.

«  Ottawa et l’Est de l’Ontario sont quand même plus développés, mais ailleurs, on peut avoir une infirmière francophone à domicile et le lendemain une anglophone. Le système est complexe », a contextualisé le représentant de la FARFO.

Diane Quintas, directrice générale du Réseau mieux-être francophone du Nord, et Michel Tremblay, directeur général de la Fédération des aînés et des retraités francophones de l’Ontario (FARFO). Crédit image : Inès Rebei

De plus, M. Tremblay a rappelé que les infirmières à domicile faisaient partie du personnel soignant le moins bien payé. «  Les gens qui vont aux domiciles, on ne leur paie pas le temps entre deux clients. C’est aussi une réalité. Les services à domicile devraient être aussi valorisés que les services hospitaliers.  » 

Le foyer de soins de longue durée francophone : une denrée rare

«  Si chaque francophone s’asseyait avec une personne âgée, on pourrait voir le soleil se dégager dans leurs yeux  », a affirmé M. Bouchard

Le constat qui est fait en 2023 est sans appel : les personnes âgées ont particulièrement subi durant la pandémie. Ce n’est pas un secret, mais pour les panélistes des pistes de solutions peuvent être trouvées en regardant ce qui s’est passé. 

D’abord, Michel Tremblay a fait remarquer qu’aujourd’hui nous avons pleine conscience de l’impact de la COVID-19 sur la population âgée. Pour le directeur de l’organisme, l’isolement dans les foyers francophones et doublement pour les francophones dans un foyer anglophone ont créé un traumatisme. 

De nombreuses personnes âgées ne veulent tous simplement pas finir dans un foyer de soins. Pourtant, les foyers de longue durée sont très souvent la seule réponse aux besoins. Diane Quintas, a expliqué à ce titre que dans les régions rurales, les choix n’étaient sont pas si faciles. «  Tu ne peux pas demander un service en français quand ça n’existe pas. Dans le Nord, il faut que l’on considère les distances.  »

Sean Keays, directeur du Foyer Richelieu Welland, le seul foyer de soins de longue durée bilingue du sud de l’Ontario. Crédit image : Lila Mouch

En effet, dans le Nord, pour trouver un foyer en français, il faut parfois parcourir 300 kilomètres. D’après Sean Keays, il faudrait penser à des formules dans les municipalités désignées sous la Loi sur les services en français. Il prend d’ailleurs l’exemple de Bendale Acres à Toronto qui possède un pavillon francophone. «  Si chaque municipalité désignée décidait de faire cela, je suis persuadé que cela aiderait profondément le système.  »

Durant ce panel, les quatre experts ont appuyé l’importance d’une collaboration étroite avec les gouvernements, devant le public qui comptait dans ses rangs la députée de Mississauga-Centre, Natalia Kusendova. L’adjointe parlementaire à la ministre des Affaires francophones a d’ailleurs affirmé à l’issue de l’événement qu’elle avait pris bonne note de plusieurs pistes à suggérer à son gouvernement.

«  Je suis impliquée dans ces dossiers. Étant infirmière, je peux attester que tous ces défis sont réels et encore plus en français  », a-t-elle dit au micro d’ONFR. « Je crois qu’il faut appuyer toutes les bonnes pratiques et les nouveaux projets auprès de nos gouvernements », a-t-elle assuré.