Une annonce dans l’Éducation qui laisse sur sa faim
[ANALYSE]
Il y avait un air de déjà vu, vendredi dernier, pour l’annonce de la ministre de l’Éducation, Lisa Thompson. Comme quinze jours auparavant avec la Santé, le gouvernement progressiste-conservateur a promis un tournant majeur. Et comme il y a quinze jours, on n’en sait pas vraiment plus sur le montant des économies, ni de possibles suppressions d’emplois.
Qu’a-t-on appris vraiment de la ministre Thompson? Que le cellulaire sera bel et bien interdit dans les salles de classe sauf à des fins éducatives, la confirmation de la mise en place d’une nouvelle stratégie en mathématique et celle d’un nouveau curriculum d’éducation sexuelle. Des choses que l’on s’attendait…
La mesure la plus importante reste l’augmentation du nombre d’élèves dans les salles de classe au niveau intermédiaire, avec un élève de plus par classe, et au niveau secondaire, où les classes passeront de 24 à 28 élèves.
Le gouvernement jure que cette nouvelle méthode représente une « harmonisation de l’effectif des classes du secondaire avec les autres provinces et territoires du Canada ». Par la même occasion, les troupes de Doug Ford tancent le précédent gouvernement libéral affirmant que celui-ci avait mené des « expériences sociales » sur les élèves ontariens.
Moins d’enseignants en perspective
Cette « harmonie » en vaut-elle vraiment la peine? Entre les lignes, il faut comprendre que les salles de classe seront davantage chargées. Il y aura donc moins d’enseignants recrutés. L’Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (AEFO) n’a pas tardé à réagir pour dire que 300 postes seraient peut-être supprimés par attrition chez les francophones.
On pourrait presque croire que cela réglera en partie la pénurie des enseignants francophones en milieu minoritaire. Depuis plusieurs années, le nombre d’enseignants et de suppléants francophones est anormalement stable en Ontario français. Dans les même temps, les inscriptions dans les écoles augmentent un peu plus chaque année.
Moins d’enseignants par la force des choses n’est pas la meilleure solution. Et la mesure pourrait être bien plus coercitive. Beaucoup d’établissements francophones, particulièrement en milieu rurale, n’ont pas les capacités d’atteindre 28 élèves par classe. On ne sait pas encore de quelle manière cela affectera alors le financement de ces écoles. Du côté anglophone bien entendu, cette thématique se pose moins.
La question du curriculum d’éducation sexuelle
Autre sujet brûlant : le nouveau curriculum d’éducation sexuelle. Depuis la dernière rentrée des classes, les écoles étaient retournées temporairement au programme d’éducation sexuelle de 1998, en attendant qu’un nouveau programme soit mis en place.
Assez curieusement, le dévoilement du programme par la ministre Thompson n’a pas suivi la ligne dure du parti. Le sujet du consentement sera enseigné dès la 4ème année et celui de l’identité de genre et de l’expression de genre à partir de la deuxième moitié de la 8ème année. Il donne également aux parents le choix de se retirer du programme plus facilement et promet de rendre les leçons disponibles en ligne afin qu’elles soient enseignées à la maison.
En cherchant semble-t-il un compromis, le gouvernement Ford n’a peut-être satisfait personne. Beaucoup de conservateurs crient à la trahison, tandis que les progressistes et les autres partis estiment que cela ne va pas assez loin.
Dans ces conditions où Doug Ford semble ménager la chèvre et le chou, on se dit que le dévoilement du budget provincial le 11 avril sera plus que jamais le moment de vérité. Avec peut-être le meilleur comme le pire…
Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 18 mars.