Une Journée des Franco-Ontariens en vert, blanc… et bleu
[ANALYSE]
Lancée en 2010, la tradition de la Journée des Franco-Ontariens se perpétuera, mardi, pour une neuvième année consécutive. Changement majeur cette année : cet événement crée par une loi provinciale se fera pour la première fois sous un gouvernement progressiste-conservateur.
SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz
Si cette journée est l’occasion de célébrer, de sensibiliser les élèves, et de hisser le drapeau franco-ontarien, elle n’en demeure pas moins liée intimement à la politique. Les libéraux avaient même pris l’habitude de sortir chaque année « un bonbon ». On se souvient, par exemple, en 2013, du dépôt du projet de loi pour l’indépendance du commissaire aux services en français, François Boileau. Le 25 septembre 2015, l’Université d’Ottawa annonçait en grande pompe sa désignation en vertu de la Loi sur les services en français.
En 2017, les Franco-Ontariens avaient dû en revanche se contenter de quelques brindilles : le dévoilement des plans du futur monument de la francophonie érigé devant Queen’s Park. Un monument en hommage à l’artiste Paul Demers, décédé il y a deux ans.
C’est cette même construction qui sera inaugurée ce mardi, le tout en présence de la nouvelle ministre déléguée aux Affaires francophones, Caroline Mulroney. Pas de quoi se plaindre, même si certains, à juste titre, restent sur leur faim.
Mulroney toujours attendue
Au-delà de sa fonction, Caroline Mulroney est très attendue par les francophones. Plus de 100 jours après l’élection des progressistes-conservateurs, la fille de l’ancien premier ministre du Canada apparait plus que jamais comme le pont entre la communauté franco-ontarienne et le premier ministre, Doug Ford, imprévisible et peu loquace sur la francophonie.
Toujours est-il que la ministre déléguée aux Affaires francophones est encore en phase d’apprentissage. Ce qui signifie qu’il faudra encore attendre plusieurs semaines pour connaître ses intentions sur quelques dossiers brûlants. À commencer par la refonte de la Loi sur les services en français, une promesse non tenue par le précédent gouvernement libéral.
Pour le reste, ces trois premiers mois des progressistes-conservateurs au pouvoir n’ont marqué ni recul ou avancée pour la francophonie. Il faut aujourd’hui laisser une chance au coureur tout en gardant l’œil ouvert, sans verser dans l’alarmisme.
Les commentaires acerbes contre Doug Ford à la suite d’un article de #ONfr sur le refus initial de la municipalité de Toronto de faire une levée du drapeau franco-ontarien le 25 septembre sont éloquents. Le premier ministre n’avait pourtant rien à voir dans cette histoire. Sauf que cet épisode est symptomatique de la grande méfiance qu’il suscite.
Possibles coupes et perspectives sombres
Au-delà des drapeaux, les francophones devront surtout surveiller les décisions économiques que prendra très vite le gouvernement. En annonçant vendredi dernier un déficit budgétaire de 15 milliards de dollars, le ministre des Finances, Vic Fedeli, n’a rassuré personne.
Ce « trou » plus profond que prévu pourrait inciter Doug Ford à revenir sur sa promesse de campagne en sabrant des postes dans la fonction publique ontarienne.
Dans tous les cas, une stagnation du budget, voire des coupes massives, dans les ministères de l’Éducation et de la Santé ne seraient pas de bon augure pour les Franco-Ontariens. Difficile à croire que la lentille francophone serait dans ce contexte respectée.
L’histoire de l’Ontario jalonnée d’oublis en la matière, que ce soit à Montfort ou plus récemment à Penetenguishene, montre l’urgence de rester sur ses gardes. Et la nécessité plus que jamais d’une Journée des Franco-Ontariens.
Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 24 septembre.