Université : France Gélinas dépose un projet de loi
TORONTO – La députée néo-démocrate France Gélinas a donné un important coup de pouce au projet d’université « par et pour » les francophones de l’Ontario, le mardi 26 mai. L’élue de Nickel Belt a déposé devant la Législature provinciale un projet de loi privé demandant la création de cette nouvelle institution.
FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault
Une université franco-ontarienne aurait un mandat provincial mais desservirait dans un premier temps les étudiants du centre et du sud-ouest de la province, largement défavorisés au niveau de la programmation postsecondaire dans leur langue.
« Aujourd’hui, l’Ontario fait un autre pas sur le chemin qui nous amènera une nouvelle université par et pour les francophones », a déclaré Mme Gélinas lors d’un point de presse à Queen’s Park, le 26 mai. « Nous avons travaillé fort pour avoir nos écoles élémentaires et secondaires, nos conseils scolaires et nos collèges. Nous sommes maintenant prêts à compléter le système d’éducation et mettre en place notre université de l’Ontario français. »
L’élue de la région de Sudbury a dit s’inspirer de « tout le travail qui a été fait » par le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO) et l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) dans le sens d’une future université de langue française. Elle a parlé d’un « projet de communauté » qui « est né de la volonté et du travail » des francophones de la province.
Le projet de loi privé de Mme Gélinas jetterait les bases d’un conseil d’administration provisoire pour la future université franco-ontarienne – une étape que la députée souhaiterait franchir d’ici la fin de l’année. Ce conseil d’administration aurait le mandat, à son tour, de dessiner les plans d’un premier campus et d’en boucler le montage financier.
Engagement demandé
À la mi-février, le RÉFO, la FESFO et l’AFO ont réclamé ensemble un engagement clair du gouvernement libéral de Kathleen Wynne par rapport à une éventuelle université de langue française. Les trois organismes se sont donnés pour objectif que cette nouvelle institution accueille ses premiers étudiants à Toronto en 2018.
« Le projet de loi est un pas dans la bonne direction », a réagi Caroline Gélineault, coprésidente du RÉFO. « Mais nous attendons toujours une décision du gouvernement à la suite de notre demande, en février. Nous espérons que le gouvernement va être en mesure de travailler avec les autres partis politiques pour en venir à une solution qui conviendra à tout le monde. »
« Cette université, on la veut très bientôt », a exhorté Jérémie Spadafora, président élu de la FESFO, à la suite de l’annonce de Mme Gélinas, le 26 mai. « Ça fait longtemps qu’on attend. J’ai vu, dans un livre d’histoire, un article dans un journal francophone de 1986 dans lequel il y avait l’annonce d’une université franco-ontarienne. »
La FESFO a d’ailleurs lancé une campagne fictive d’inscriptions à l’université franco-ontarienne pour démontrer au gouvernement provincial « l’intérêt des jeunes » dans l’institution revendiquée.
« Le projet de loi est certainement une nouvelle positive pour la mise sur pied d’une nouvelle institution universitaire provinciale », a partagé à son tour Denis Vaillancourt, président de l’AFO, par le biais d’un communiqué.
« Irréaliste »
Les libéraux à Queen’s Park ont toutefois jugé « irréalistes » les échéances du projet de loi de la deuxième opposition. Sans dire non à une université franco-ontarienne, le parti au pouvoir a plutôt réitéré son intention de bonifier l’offre de programmes d’études postsecondaires de langue française dans le centre et du sud-ouest de la province.
« On ne peut pas être contre la vertu. Et je suis depuis longtemps en appui du projet d’une université francophone », a déclaré la ministre Madeleine Meilleur, responsable des Affaires francophones. « Mais ce sera décidé par le gouvernement, quels seront la forme et l’échéancier de ce projet-là », a-t-elle relancé. « L’important, pour moi, est d’améliorer la disponibilité des cours en français. »
« Nous efforts ont précédé ce projet de loi », a signalé Reza Moridi, ministre responsable de l’enseignement supérieur. « Je suis très au fait des aspirations de la communauté francophone », a-t-il précisé. « Nous travaillons là-dessus et nous verrons ce que nous pouvons faire. »
Le gouvernement libéral avait allongé 14,5 millions $ aux collèges francophones et aux universités bilingues de l’Ontario pour améliorer l’offre de programmes en français dans le centre et le sud-ouest, en 2013. Une enveloppe dont le clan Wynne a été incapable de quantifier les retombées, le 26 mai.
« Il y a de la place »
La députée France Gélinas s’est défendue, par ailleurs, de vouloir damer le pion aux institutions bilingues, comme l’Université d’Ottawa qui songe à installer un campus entièrement francophone dans le sud-ouest de la province. « Il y a de la place » pour plusieurs joueurs, selon elle, car la programmation postsecondaire en français dans le corridor Toronto-Windsor équivaut présentement à 3% de l’offre à la majorité anglophone.
Un étudiant aux côtés de l’élue de Nickel Belt lors de son annonce à Queen’s Park a regretté, pour sa part, que les universités bilingues penchent le plus souvent du côté de la majorité anglophone. « C’est pour ça qu’il nous faut la gouvernance complète de notre université. Que ce soit vraiment par et pour les Franco-Ontariens. Nous connaissons notre histoire mieux que quiconque », a fait valoir Lucas Egan, de l’Université d’Ottawa.