Vanessa Gilles : « On est toujours prêtes à affronter les États-Unis »
[ENTREVUE EXPRESS]
QUI :
Vanessa Gilles fait partie des piliers de la défense de l’équipe nationale de soccer canadienne. La Franco-Ontarienne, qui a grandi et a découvert ce sport à Ottawa, compte 37 sélections avec les Rouges et un titre olympique en 2021. En club, elle est titulaire indiscutable au sein de la défense de l’une des plus grandes équipes féminines d’Europe, l’Olympique lyonnais (OL).
LE CONTEXTE :
Les Canadiennes disputent actuellement la première édition de la Gold Cup féminine, qui regroupe les équipes des trois Amériques et des Caraïbes. Gilles et ses coéquipières ont brillamment passé la phase de qualification avec trois victoires, 13 buts marqués et aucun encaissé. Elles se sont qualifiées pour les demi-finales après une victoire contre le Costa Rica en prolongation (1-0) en quart de finale, en se faisant une petite frayeur contre une équipe qu’elles avaient battue 3-0 en qualification.
L’ENJEU :
Les joueuses entraînées par Bev Priestman visent une qualification pour la finale. Pour ce faire, elle devront battre leurs grandes rivales américaines ce mercredi 6 mars. Les États-Unis sont hôtes de la compétition. La rencontre est programmée à 22h15 et se disputera au stade Snapdragon de San Diego.
« Quel regard portez-vous sur votre parcours dans cette compétition jusqu’à présent?
C’est toujours difficile une compétition comme ça, avec les matchs qui s’enchaînent et avec une moitié de l’effectif qui est en plein milieu de la saison, et l’autre qui débute la sienne. Ce n’est pas facile de créer une cohésion, mais je pense qu’on a bien démarré. Bev a fait du bon travail pour impliquer tout le monde en donnant du temps de jeu à toutes les joueuses qui ont pu contribuer. Ça nous a bien servi puisqu’on a dû jouer 120 minutes contre le Costa Rica. Au final, le sentiment général, c’est de la satisfaction. On a hâte de jouer contre les États-Unis en demi-finale.
Du fait que c’est la dernière grande compétition avant les Jeux olympiques (JO) et qu’il y a un nombre de places limité à 18 pour aller à Paris, sentez-vous une émulation particulière au sein de l’effectif?
C’est certain qu’avec le sport qui continue de grandir au Canada et les joueuses qui ont de plus en plus d’opportunités de jouer au niveau professionnel, nos ressources en termes de joueuses sont de plus en plus grandes. En tant que Canadienne, ça me fait vraiment plaisir, mais c’est certain qu’au niveau de l’équipe nationale, quand on doit choisir 18 joueuses plutôt que 23, ça devient compliqué.
Tout le monde a envie de participer à une telle compétition, donc c’est sûr que ça rend les entraînements et les matchs très compétitifs. Chacune veut prouver qu’elle mérite d’y être.
Comment analysez-vous les difficultés que vous avez eu en quart de finale contre le Costa Rica, que vous aviez battu facilement en qualification?
C’est toujours difficile de rejouer contre la même équipe, surtout avec si peu de temps entre les deux matchs. Seulement trois jours, ça n’arrive pas souvent. Après, ce qui a été, ce qui n’a pas été… Je pense que c’est la beauté du soccer. Les Costariciennes sont venues prêtes à jouer. C’était un quart de finale, elles voulaient se qualifier. Ce n’est jamais facile. C’est toujours un plaisir de disputer des matchs comme ça, avec un enjeu de qualification.
Après, je dirais qu’il y a des jours comme ça où tu peux avoir 40 occasions et on dirait qu’il y a un aimant répulsif sur le but, ça ne veut pas entrer. On a réussi à marquer. L’important était de rester concentrées durant tout le match. Notre gardienne, qui a eu un seul tir au but à sauver, qu’elle a bien négocié, nous a montré ça. C’est une bonne leçon à apprendre pour le futur.
Est-ce un avantage ou un désavantage d’avoir, jusqu’à présent, rencontré un niveau de jeu moindre par rapport à celui des Américaines, que vous vous apprêtez à affronter?
On a surtout affronté des adversaires qui évoluaient avec un bloc défensif bas. Il fallait avoir plus de patience pour trouver des opportunités et rester concentrées. Ce n’est pas facile de jouer contre ce genre de défense. Ça nous arrive très souvent avec l’OL et, même pour les meilleures joueuses au monde, ça peut être difficile. Ce n’est ni un avantage, ni un désavantage, c’est une bonne préparation en vue des JO.
Là, on va jouer, à l’inverse, contre une équipe très athlétique qui va nous presser très haut. C’est très bien de voir un peu des deux. Ce n’est pas notre première fois dans un tournoi où l’on rencontre plein d’équipes différentes. On est toujours prêtes à affronter les États-Unis mentalement, car c’est un derby proche du cœur pour nous.
Quelles seront les clés pour les battre?
Il faudra être prêtes pour 90 minutes, voire 120. Mentalement, c’est toujours une bataille. Pour elles comme pour nous, c’est la priorité numéro un de répondre présentes mentalement et physiquement, pour remporter les batailles individuelles, mais aussi collectives. Le sport, c’est ce qui se passe sur le terrain, mais c’est aussi ce qui se passe dans la tête. Et dans un derby, c’est extrêmement important.
Vous excellez sur le jeu de tête, qu’est-ce qui fait que c’est une force dans votre jeu?
Oh! Je ne sais pas… Il y en a qui disent que c’est parce que j’ai un grand front. (Rires)
Pour finir, un petit mot sur la pratique du français au sein de l’équipe, est-elle répandue ou parlez-vous majoritairement en anglais?
J’ai vu une vraie évolution. Quand je suis arrivée en sélection, on devait être deux. Maintenant, avec le staff, il doit bien y avoir la moitié des gens qui parlent ou comprennent le français. Ça fait plaisir parce qu’il y a beaucoup de monde qui peut passer d’une langue à l’autre.
Parfois, quand c’est ta langue première et que tu es « dans le moment », ce qui vient naturellement, c’est le français. Du coup, c’est vraiment bien de pouvoir se sentir à l’aise en parlant sa langue maternelle sans être jugée, mais surtout en étant comprise. C’est vraiment un plaisir en tant que Canadienne bilingue. »