10 000 km à vélo pour lutter contre les agressions sexuelles

OTTAWA – C’est avec son vélo et une motivation inébranlable que la Franco-Ottavienne Chantal St-Onge s’est lancé un défi de taille. Celui de parcourir 10 000 km à vélo afin d’amasser 30 000 $ pour le Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS).
Cet objectif ne lui est pas venu subitement, a-t-elle expliqué lors d’une présentation organisée à l’Université d’Ottawa, ce mardi. « J’ai eu besoin d’aide moi aussi et il a fallu des années pour qu’une personne m’écoute, j’ai vécu ses blessures. »
Chantal St-Onge le dit, sa vie a changé et ce n’est qu’un début, il y aura un avant et un après ce voyage. Elle raconte son projet comme une réelle introspection, son voyage elle le fait pour les victimes, mais aussi pour elle, « pour se défouler et pour réfléchir ». L’émotion est palpable, son fils et dans la salle et quelques hommes aussi.
« On m’a aidée, que ce soit mes amis ou ma thérapeute, alors j’espère que je vais aider d’autres victimes et d’autres survivantes avec ce voyage. »

Son périple débutera dès que les beaux jours pointeront le bout du nez. L’objectif de 10 000 km s’effectuera au Canada et en Europe. Chantal St-Onge a mis en place une page Facebook intitulée Je roule pour Calacs et qui servira de canal de communication, mais aussi d’espace pour la levée de fond. Une autre manière de contribuer sera d’accompagner Chantal St-Onge durant son périple.
Depuis 1995, le CALACS s’est engagé dans l’aide aux démarches, le soutien et l’écoute des victimes et des survivantes d’agressions sexuelles. C’est dans ce cadre que son antenne d’Ottawa réitère son mandat au service des femmes francophones.
« L’initiative de Chantal St-Onge est une grosse affaire, c’est la plus grande levée de fonds en 25 ans » nous révèle Josée Guindon, porte-parole du CALACS. « C’est plus facile pour les autres causes, il n’y a pas de déclaration à faire. Donner publiquement et en faire un événement, c’est dire : je crois les victimes. »
Des statistiques obsolètes
Si l’on cherche des données concrètes sur les agressions sexuelles commises en Ontario ou au Canada, toutes les statistiques sont obsolètes. La collecte d’informations, de chiffres et de témoignages par le gouvernement ou des entités légitimes manquerait cruellement de suivi.
D’après Josée Guindon, « ce manque de données est une barrière supplémentaire à la cause et c’est très frustrant. Les données que nous avons sont celles que nous collectons avec nos interventions. Nous sommes conscientes qu’il faut très souvent doubler ces chiffres, puisque toutes les victimes ne peuvent ni témoigner, ni sortir de ce carcan ».

En tant que partenaire communautaire, le CALACS rencontrera dans une semaine les responsables du service des violences faites aux femmes et des agressions sexuelles de la Police d’Ottawa. Ils mettront en place un projet pilote afin de rouvrir des dossiers et enterrer les préjugés qui existent autour de certaines victimes, tout en travaillant sur les lacunes des services en français.
C’est aussi le mandat du Bureau des droits à la personne de l’Université d’Ottawa. Marie-Lou Villeneuve-Hobbs, intervenante en droits de la personne, le dit : « Non, ce n’est pas rare les dévoilements, que ce soit des étudiants ou des employés de l’Université, on voit bien que la demande est accrue. »

Depuis le mouvement Me Too et bien avant, depuis 2014 avec les deux incidents qui ont plongé l’Université dans le débat entourant la violence sexuelle, le campus met en place de nombreux accommodements et activités de sensibilisation.
« Il faut que la communauté universitaire se sente en sécurité », réaffirme Mme Villeneuve-Hobbs. « Il y a un service de protection à l’Université et notre mandat est d’être à l’écoute, dans le respect de la personne et d’évaluer les besoins. Il faut offrir du choix dans la démarche et les services. »