Déconfinement : la confusion règne dans le monde du fitness
Le gouvernement ontarien a permis la réouverture de certaines installations sportives depuis le 16 mai. Toutefois, bien des entrepreneurs du Nord de la province peinent à comprendre si, et comment, ils peuvent reprendre leurs activités.
C’est le cas du gymnase d’escalade ARC Climbing & Yoga, à Sudbury, qui garde toujours ses portes closes. Une décision différente de celle du gymnase d’escalade Rock Oasis, à Toronto, qui a rouvert ses portes cette semaine. Cependant, son homologue sudburois se montre plus prudent.
« Je n’ai pas suivi à fond ce qu’il se passe à Rock Oasis, mais je trouve leur décision un peu étrange », note la directrice des opérations, Leah Garrett. « Personnellement, je serais inquiète d’ouvrir si tôt, surtout à Toronto. Mais ils doivent avoir de bonnes politiques en place pour gérer les risques. »
Mme Garrett a discuté avec les propriétaires de l’annonce gouvernementale qui permet à certaines installations sportives de rouvrir. Ils se sont toutefois entendu que les gymnases d’escalade n’étaient pas ciblés.
« Les consignes de réouverture sont un peu floues, pour être honnête », avoue-t-elle. « Selon notre compréhension des lignes directrices actuelles, elles ne concernent que les athlètes de compétition. La majeure partie de nos membres ne sont pas des compétiteurs. »
Selon le communiqué de presse de la province, les consignes s’appliquent aussi aux « entreprises saisonnières et activités de loisirs à participant unique ». Il n’empêche qu’il y a de nombreuses difficultés à tenir compte afin de rouvrir une installation du genre, note Mme Garrett.
« Quand on est sur le mur, on touche et on respire sur les prises que les autres devront utiliser », explique-t-elle. « Il n’y a pas de moyens de désinfecter les prises et les cordes que tout le monde se partage. »
Afin de pouvoir rouvrir dans les prochaines semaines, elle dit s’inspirer des procédures qu’ont mises en place certaines installations d’escalade aux États-Unis. Mais la difficulté sera de s’assurer que les consignes soient suivies à la lettre.
« Nous n’allons pas ouvrir avant d’avoir une solution à tout », dit-elle.
Pour l’instant, l’entreprise se concentre sur les services qu’elle peut offrir à distance, tels que les cours de yoga en ligne.
À pagaie sur le lac Ramsey
Chaque année, le Club de canot de Sudbury ouvre pour la saison dès la première fin de semaine du mois de mai. Cependant, deux semaines après que la province a annoncé que certaines installations sportives peuvent reprendre leurs activités, le club demeure fermé.
« Nous avons dû retarder notre ouverture pour mettre en place nos procédures de pandémie », explique Dan Welch, vice-commodore du club. « C’est un long processus, car elles ont dû être approuvées par l’unité sanitaire locale, la ville, ainsi que par Aviron Canada et Kayak Canada. »
En tant qu’organisme entièrement bénévole, le club sudburois se trouve dans une situation particulière.
« Il n’est pas facile d’imposer la distanciation sociale dans ce type d’organisation », explique M. Welch. « Nous devons veiller à ce que tout le monde soit à deux mètres les uns des autres, mais nous n’avons normalement pas de personnel sur place. »
Pour combler cette lacune, le club engagera pour la première fois des employés.
Puisque les membres se partagent l’équipement – les gilets de sauvetage, les pagaies, les embarcations –, ils devront donc tout laver après chaque utilisation.
Ce sont bien des coûts supplémentaires pour un organisme sans but lucratif.
« Sur le plan financier, nous allons en prendre un coup cette année », explique le vice-commodore. « Nous avons normalement environ 500 membres, mais nous ne prévoyons qu’un tiers de ce montant, cette année. Les gens sont très prudents, et c’est compréhensible. »
Le club espère ouvrir début juin.
« Notre objectif est de faire pagayer les gens », note M. Welch d’un ton optimiste. « Nos lacs sont nos trésors et tout le monde devrait pouvoir en profiter. »
Être entraîneur en pleine pandémie
À Timmins, Alexandre Gagnon offre divers programmes de fitness et de mobilité.
« L’idée est d’amener des services qui n’existent pas dans les petites communautés du Nord de l’Ontario », explique-t-il.
En plus d’être un entraîneur personnel, il offre entre autres des programmes de parkour, d’arts circassiens tel que le tissu aérien, et de sport dans et sous l’eau, comme du rugby subaquatique.
« Avant la COVID-19, j’avais facilement une douzaine de programmes en cours pour les gens de tout âge, des plus jeunes aux personnes âgées », raconte le jeune entrepreneur.
Toutefois, sa réalité est très différente depuis le début du confinement.
M. Gagnon n’a pas ses propres installations sportives. Il travaille plutôt avec divers organismes de la région, tels que les piscines municipales, les clubs de gymnastique, les studios de danse, en plus d’un gymnase de gymnastique.
Alors que ces installations sont présentement fermées, il se tourne vers les nouvelles technologies. Il offre des séries d’ateliers de groupe sur l’application Zoom et des services plus personnalisés sur House Party.
« J’ai aussi lancé un genre de « jeu télévisé » de fitness pour les jeunes », raconte-t-il. « Ils forment des équipes avec leurs amis. Pendant une heure à une heure et demie, ils doivent relever différents défis physiques et bouger de tout de sorte de manière pour accumuler des points. »
« C’est sûr que les pertes sont tout de même importantes », se déçoit-il. « Mais, parce que j’étais limité avec mes sources de profit, j’offre maintenant différents services que je n’offrirais pas autrement. Des programmes individuels pour la douleur chronique, par exemple. Lorsqu’on reviendra à un monde post-COVID, ce sont des activités que je pourrais continuer. »
Il reçoit aussi de l’aide du gouvernement. Mais la nature du programme l’empêche de poursuivre toutes ses nouvelles initiatives.
« Je suis seulement éligible au programme d’aide si mes profits se limitent à un certain montant », explique M. Gagnon. « En tant qu’entrepreneur, ça veut dire que je dois refuser des contrats. Ça m’empêche aussi de prendre certains risques avec de nouveaux projets. »
Alors que la première phase de déconfinement se met en marche, peu change pour l’entraîneur.
« Il y a une zone grise et ce n’est pas toujours clair de savoir où je me situe dans tout ça », affirme-t-il. « Je pourrais faire de l’entraînement personnel, mais puisque je n’ai pas mes propres installations, je suis limité à cet égard. »
« Même dehors, j’hésite un peu », note-t-il avec prudence. « Toutes les règles pour les parcs publics peuvent changer si rapidement et je ne veux pas commencer un programme si je ne peux pas le mener à terme. »