Les agences de voyages attendent impatiemment des jours meilleurs
Depuis sept mois, les agences de voyages vivent au rythme de la pandémie de COVID-19. Après avoir dû gérer les rapatriements express et les annulations de dernière minute, certaines ont fermé leurs portes. D’autres s’arment de patience espérant une amélioration sanitaire permettant de desserrer l’étau des restrictions de voyages.
« Tout ce que je peux vous dire, c’est que c’est très difficile. »
Visiblement très affectée par la situation actuelle, une agente de voyage francophone d’Ottawa refuse d’en dire davantage. Mais sa voix ne peut cacher son dépit. L’industrie dans laquelle elle travaille symbolise les conséquences de la COVID-19 sur certains pans de l’économie.
Il y a deux ans, Renée Tessier a décidé de se lancer dans l’aventure, à temps partiel, comme agente de voyage indépendante, collaborant avec diverses agences de Toronto. En congé maternité depuis mars, elle a considérablement diminué ses heures, mais poursuit un peu son activité. Le métier la passionne, elle veut continuer.
« Comme j’ai un autre emploi, je ne suis pas trop inquiète, mais je peux imaginer à quel point c’est difficile pour les personnes qui travaillent à temps plein. Mis à part quelques clients qui repoussent leurs voyages à l’été 2021, on n’a pas beaucoup de nouvelles demandes. »
Être responsables
À cette époque de l’année, les destinations soleil et les croisières partent normalement comme de petits pains chauds. Mais cette année, les restrictions rendent difficile de planifier un voyage.
« Nous n’avons pratiquement aucun revenu ni aucune vente », résume Manon Lacelle Lacroix, propriétaire du Club Voyages Marlin Travel, à Hawkesbury.
Son équipe continue pourtant de garder le contact avec ses clients avides de projets de vacances.
« Certains veulent déjà programmer des voyages, alors on leur explique les restrictions et on les conseille. Je ne me vois pas leur recommander de faire des voyages internationaux en ce moment, alors que le gouvernement canadien demande de les limiter. On doit tous faire notre part et être responsables pour passer au travers. »
Certains continuent de voyager pour affaires, mais pour les autres, la patience est de mise.
« Les gens sont pressés de voyager, mais ils sont également prudents », assure Mme Lacelle Lacroix.
Plusieurs clients visent donc l’hiver ou l’été prochain. Et pour les aider à s’y préparer, beaucoup se tournent vers les conseillers en voyage, selon Mme Tessier.
« Les gens recherchent notre expertise. Ils ont besoin de conseils pour s’y retrouver, notamment pour les assurances, par exemple. »
Des agences ont fermé leurs portes
Insuffisant toutefois pour maintenir une activité florissante. Dans le réseau auquel appartient l’agence de Mme Lacelle Lacroix, le bilan est peu reluisant.
« En date d’aujourd’hui [l’entrevue a été réalisée le 9 octobre], nous avons entre 8 et 10 % de nos agences qui ont fermé définitivement leurs portes. Les autres demeurent actives, soit virtuellement et par téléphone ou bien physiquement, mais beaucoup fonctionnent avec des effectifs considérablement réduits », explique Louise Fecteau, la directrice générale de Transat Distribution Canada qui compte environ 350 agences à travers le pays.
« Les ventes ont baissé de 90 à 95 % par rapport à l’an dernier »- Louise Fecteau, Transat Distribution Canada
Mme Lacelle Lacroix a, pour sa part, décidé de maintenir son équipe en place, soit quatre conseillers en voyage qui travaillent désormais à distance. Elle assure que son agence tiendra le coup.
« On sait que dès que ce sera de nouveau possible de voyager, on ne va pas beaucoup dormir! », prévoit-elle, espérant une reprise progressive de l’activité d’ici six mois.
Maintenir les aides et revoir la quarantaine
En attendant, il faut patienter et trouver des alternatives. Certaines agences ont décidé de sous-louer leurs espaces de travail, d’autres ont pu compter sur l’intérêt des Canadiens pour les voyages intérieurs.
« Cet été, on a eu beaucoup de demandes pour des locations de véhicules récréatifs. Les gens ont beaucoup visité leur province. Cet hiver, on anticipe aussi une forte demande pour le ski à Banff ou Whistler et pour des chalets… C’est une source de revenus supplémentaire, mais ça ne compense pas », estime Mme Fecteau.
Les aides gouvernementales aux entreprises ont été salutaires, poursuit la directrice générale de Transat Distribution Canada, que ce soit pour aider à payer le loyer ou maintenir les employés en poste avec la subvention salariale d’urgence.
« On est directement frappé par les mesures qui sont mises en place par le gouvernement. On les comprend, mais on espère aussi qu’il va continuer de nous supporter, et pas uniquement avec des prêts qui vont nous suivre jusqu’au restant de nos jours », plaide Mme Lacelle Lacroix.
Alors que le pays est dans une deuxième vague de COVID-19, Mme Fecteau prévoit encore plus de fermetures d’agences si la situation actuelle perdure.
« Les prochains mois vont être encore très difficiles. Plus vite on reprend, plus l’impact sur l’industrie sera contrôlé. »
Raison pour laquelle, à l’image d’Air Canada qui voudrait changer la quarantaine pour des tests rapides pour ses passagers, Mme Fecteau souhaiterait que le gouvernement assouplisse les règles.
« On est d’accord avec les règles en place, mais on pense que la quarantaine pourrait être modulée selon les destinations. Certaines sont bien moins à risque et la quarantaine est vraiment problématique pour nous. »
Interrogé sur cette option, Santé Canada a renvoyé nos questions vers le ministère des Transports. Joint par ONFR+, le bureau du ministre Marc Garneau insiste, dans un échange de courriels, que la priorité reste la lutte contre la pandémie.
« La pandémie de la COVID-19 a créé une crise mondiale sans précédent qui a des répercussions importantes sur toutes les facettes de l’industrie canadienne des transports, les voyageurs ainsi que sur l’ensemble de notre économie. La santé et la sécurité des Canadiens sont une priorité absolue. »