« Plein de marde » : l’AFO se porte à la défense de Francis Drouin
OTTAWA – L’organisme porte-parole des Franco-Ontariens, l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), se porte à la défense du député Francis Drouin après qu’il ait traité de « plein de marde » et « extrémistes » des témoins en comité parlementaire. Le Comité des langues officielles s’est réuni mercredi de façon urgente après une demande des oppositions qui répètent leur revendication pour la démission de l’élu libéral.
Une requête avec laquelle l’AFO se met à l’encontre. Dans une lettre adressée au président du Comité des langues officielles, René Arseneault, l’AFO défend le représentant libéral, « comme un député disponible, à l’écoute et ayant œuvré pour le bien de la francophonie », écrit son président Fabien Hébert.
« Il a été un allié pour l’obtention de l’Université de l’Ontario français et la modernisation de la Loi sur les langues officielles, tout en assumant très bien ses fonctions à la présidence de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie », poursuit le président de l’organisme de la francophonie ontarienne.
« Toutes et tous les membres de ce comité ont les langues officielles et la francophonie à cœur, incluant M. Drouin », ajoute le porte-parole de l’AFO dans sa missive.
Francis Drouin est sous le feu de critiques des oppositions au Parlement qui demandent sa démission à titre de président de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) et du Comité des langues officielles. Une rencontre d’urgence des membres de l’APF est d’ailleurs prévue le 23 mai pour un appel à sa démission après que le député bloquiste René Villemure ait demandé cette réunion.
Le député franco-ontarien avait retiré ses propos, mais refusé de s’excuser dans les jours suivants, admettant qu’il aurait pu « mieux poser mes mots » et reconnaissant s’être « laissé emporter par la passion ». Il s’était finalement formellement excusé lors de la séance suivante du comité. Mercredi, il a brièvement commenté devant les journalistes qu’il « n’a pas besoin de corriger cette perception » qu’il ne serait pas un allié pour la francophonie.
En entrevue avec ONFR, il jugeait « honteux » et « insultant » qu’on « extrapole ça (cet incident) en disant que j’insulte les gens qui défendent la langue française » affirmant qu’il a protégé la langue française « toute sa vie ».
« L’AFO est sorti en disant que j’ai toujours été un défenseur (du français) et je suis d’accord », acquiesce-t il.
Dans sa lettre, l’AFO « invite respectueusement les élues et élus de la Chambre des communes à mettre de l’avant des initiatives et des débats sur des enjeux touchant réellement les Franco-Ontariennes et les Franco-Ontariens » comme le financement des organismes et de l’Université de Sudbury.
C’est lors d’un comité étudiant le financement postsecondaire en milieu minoritaire que le député de Glengarry-Prescott-Russell a injurié de « plein de marde » et « extrémistes » les deux chercheurs, Frédéric Lacroix et Nicolas Bourdon. Ces derniers témoignaient, chiffres à l’appui, sur l’anglicisation au Québec et le lien avec les études en anglais. Ils expliquaient que fréquenter une université ou un cégep anglophone augmentait grandement la probabilité de mener sa vie en anglais.
Francis Drouin : un défenseur pour la francophonie?
La formation de Pierre Poilievre se dit en désaccord avec les propos de l’AFO. Son député Joël Godin indique « qu’on n’a pas la même lecture » sur le fait que Francis Drouin soit un allié de la francophonie. Il « a fait de bonnes choses avant » l’incident, concède le conservateur, mais « j’ai un gros point d’interrogation aujourd’hui avec ce qui s’est passé lundi passé ». Le fait qu’il ait pris plusieurs jours avant de formellement s’excuser le rend « illégitime » à son rôle à l’APF, souligne-t-il.
« Nous ce qu’on dit est que M. Drouin a fait des choses dans le passé, mais il a fait une chose inacceptable et à partir de ce moment-là, il se doit de démissionner », a dit le porte-parole conservateur en langues officielles aux journalistes mercredi.
Le député du Bloc Québécois Mario Beaulieu ne veut pas prêter d’intentions au député franco-ontarien à savoir s’il est un allié de la francophonie ontarienne comme l’affirme l’AFO. Mais il s’est « disqualifié comme représentant de la francophonie » du poste en « insultant les défenseurs du français au Québec », argumente-t-il.
Nouvelle offensive pour faire démissionner Francis Drouin
Dans une réunion d’urgence, demandée par le Bloc Québécois et les conservateurs, le Comité des langues officielles s’est réuni mercredi à Ottawa, en semaine de congé parlementaire pour demander à nouveau la démission du député libéral.
Les libéraux étaient d’ailleurs représentés à ce comité seulement par des Franco-Ontariens, ce qui a fait dire à Joël Godin « qu’ils ont sorti l’artillerie lourde pour défendre l’indéfendable ». Le comité comportait des ajouts inhabituels mercredi, soit les députées franco-ontariennes, Mona Fortier et Marie-France Lalonde.
La semaine dernière, les partis avaient accepté de suspendre le débat sur une motion demandant la démission de Francis Drouin du comité et de son poste de président de l’APF.
Le conservateur Joël Godin a déposé une motion similaire mercredi après que les députés se soient entendus pour faire venir le ministre des Langues officielles Randy Boissonnault qui n’avait pas pu témoigner la semaine dernière. La motion conservatrice a toutefois été bloquée, car elle ne respectait pas les procédures parlementaires, dont celle de fournir un préavis de 48 heures, ce qui a amené le président du comité René Arseneault à mettre fin à la séance plus tôt que prévu.
Mais les oppositions assurent qu’ils ne lâcheront pas le morceau et qu’ils persisteront en comité avec leurs demandes tant que l’élu franco-ontarien ne quittera pas le comité et le président de l’APF.
« Le dossier n’est pas clos. On va revenir avec cette motion », assure le conservateur Bernard Généreux, ajoutant qu’il faudra « le temps qu’il faudra pour faire en sorte que M. Drouin réponde à ses actes ».