Où sont les médecins francophones de Windsor?

Des macarons sont disponibles pour les spécialistes de la santé francophones ou capables de s'exprimer en français. (Crédit image: Maxime Delaquis)

WINDSOR – La déclaration avait de quoi surprendre : lors d’un événement public, l’an dernier, un citoyen a affirmé qu’un ou deux médecins seulement étaient capables de servir en français la dizaine de milliers de francophones de la grande région de Windsor. Dans leur quête pour trouver la vérité, des acteurs francophones qui travaillent à augmenter les services en français ont fait d’autres découvertes surprenantes.

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

Le hasard et le bouche-à-oreille : voilà sur quoi doivent dépendre les Franco-Ontariens de la grande région de Windsor quand vient le temps de trouver un médecin capable de s’exprimer en français, s’attriste Jacques Kenny.  Il est directeur général de l’Entité 1, une organisation qui veille à sensibiliser le système de la santé du Sud-Ouest de la province aux besoins de Franco-Ontariens.

Il s’étonne encore de recevoir de nombreux témoignages de gens qui racontent comment ils ont trouvé leur spécialiste de la santé capable de parler français.

Jacques Kenny, directeur de l’Entité de planification des services de santé en français Érié St.Clair/Sud-Ouest. Crédit image : Maxime Delaquis

« Un collègue est allé à l’hôpital. Il s’est mis à parler en français avec sa conjointe. Le médecin l’a entendu et il a commencé à leur parler en français. Mais jamais on ne leur avait offert des services en français, jamais ce médecin ne s’était affiché comme capable de parler français », déplore M. Kenny. Il partage une autre histoire où il a réussi à trouver à une femme un gynécologue s’exprimant en français, mais uniquement après avoir fait des appels dans son réseau d’amis et de collègues.

Son organisation estime qu’il est inacceptable qu’en 2018, les Franco-Ontariens doivent encore miser sur le bouche-à-oreille pour se trouver un spécialiste de la santé qui peut les aider. Surtout lorsqu’on est fragile, il est nécessaire de se faire soigner dans sa langue, insiste M. Kenny.

Un nouveau répertoire pour les francophones

L’Entité de planification de la santé qu’il dirige a décidé de développer un répertoire des médecins, spécialistes et infirmières spécialisées capables de s’exprimer en français.

Mais son organisme s’est heurté à un autre obstacle : les données langagières de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario (OMCO) ne sont pas valides, selon Jacques Kenny.


« Le site web de l’Ordre indique les langues parlées par chaque médecin. Mais on a testé ces données et on a réalisé que non, ce n’était pas nécessairement vrai. On a dû repenser complètement notre stratégie pour bâtir notre répertoire » – Jacques Kenny


Dorénavant, une employée de son organisme appelle un à un chaque spécialiste de la santé pour vérifier leur capacité à parler en français. « Les noms que l’on va donner aux citoyens de la grande région de Windsor, on veut s’assurer qu’ils seront basés sur des informations fiables », dit-il.

Il estime que la base de données devrait pouvoir être lancée d’ici la prochaine année. Et il y aura plus qu’un ou deux médecins capables de parler français dans le répertoire. « Il y en a plus que l’on pensait! », se réjouit M. Kenny.

Distribution de macarons

Un autre travail doit cependant être fait auprès des professionnels de la santé. Il faut les encourager à afficher leur connaissance du français, selon M. Kenny. Il distribue d’ailleurs dans la région des macarons qui indiquent que la personne qui le porte parle le français.

La sensibilisation doit cependant aller encore plus loin, selon lui.

« Il faut les conscientiser afin qu’ils se sentent à l’aise. Certains nous disent que leur français n’est pas à la hauteur ou qu’ils n’ont pas la bonne terminologie en français. Mais les patients veulent d’abord quelqu’un qui peut les rassurer dans leur langue. Avec la pratique, ils peuvent s’améliorer, mais ils doivent commencer à quelque part », souligne Jacques Kenny.

Des initiatives similaires sont menées ailleurs dans la province, alors que d’autres régions souffrent d’un manque de données sur l’existence ou non de ressources dans la langue de Molière.