Affrontement entre Des Rosiers et Mulroney à Queen’s Park

Caroline Mulroney et Nathalie Des Rosiers Télévision parlementaire

TORONTO – Deux avocates. Deux francophones. Mais deux visions diamétralement opposées sur la légitimité d’une utilisation de la clause dérogatoire de la Charte canadienne des droits et libertés pour réduire de force la taille du conseil de ville de Toronto. Nathalie Des Rosiers et Caroline Mulroney ont croisé le fer à Queen’s Park, le jeudi 13 septembre, sur la crise politique en cours qui pourrait bien compromettre les élections municipales torontoises. Nathalie Des Rosiers est d’avis que l’heure est grave et que Caroline Mulroney doit démissionner. 

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

La députée libérale d’Ottawa-Vanier a interpellé la Procureure générale, Caroline Mulroney, en chambre pendant la période de questions. L’intervention de l’ancienne doyenne de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa et spécialiste de la Constitution canadienne n’est pas passée inaperçue.

Si le gouvernement Ford va de l’avant avec son plan de réduire le conseil de ville de Toronto et que l’élection se déroule le 22 octobre, il se pourrait que le mandat de ces élus ne soit pas valide, affirme Nathalie Des Rosiers. Et ce, même si la clause dérogatoire a été utilisée.

« La procureure générale réalise-t-elle qu’elle pourrait perdre son appel de la décision du juge Belobaba […] mais en plus, on pourrait se retrouver avec un conseil municipal inconstitutionnel à Toronto. Elle utilise la clause dérogatoire de la mauvaise façon et de manière rétroactive, ce qu’elle ne peut pas faire! Croit-elle que des batailles légales coûteuses et des incertitudes juridiques sont bonnes pour l’Ontario? », a lancé la députée libérale d’Ottawa-Vanier.

Voyez en vidéo l’échange entre les deux élues à Queen’s Park

 

« Les gens ont le dernier mot », assène Mulroney

En chambre, Caroline Mulroney s’est levée lentement et a répondu à son adversaire. « C’est le travail de mon ministère de défendre le gouvernement. Je ne peux pas spéculer sur des causes juridiques futures. La décision du gouvernement de réduire la taille du conseil de ville est constitutionnelle et ne viole pas la Charte des droits et libertés », a-t-elle assuré.

Nathalie Des Rosiers a poursuivi : « Quand un gouvernement intervient dans une élection on se pose des questions. Est-ce que le gouvernement veut choisir un gagnant? Éliminer des adversaires? Ou influencer le choix populaire? ». La députée d’Ottawa ne s’est pas arrêtée là, interpellant à nouveau la ministre Mulroney. « Avoir des gens élus dans un nuage d’illégitimité, dans la controverse, pense-t-elle que c’est de servir Toronto? », a-t-elle lancé.

Caroline Mulroney a insisté sur la légitimité d’un gouvernement d’agir comme il l’entend. « Nous utilisons les outils juridiques à notre disposition. Le Canada est une démocratie parlementaire. Lorsqu’il y a une mésentente entre un juge et le gouvernement, ce sont les gens qui ont le dernier mot! », a-t-elle répliqué.

Démission demandée

Nathalie Des Rosiers exige une démission. Au cours des dernières heures, elle a utilisé plusieurs tribunes pour expliquer sa position. « De choisir d’utiliser la clause nonobstant quand ça pourrait ne pas tout résoudre, on pourrait se retrouver dans un chaos constitutionnel. Donc, malgré la clause, le conseil pourrait se retrouver dans l’illégalité », a-t-elle expliqué à #ONfr, mercredi, en marge des travaux à Queen’s Park.

Sur Twitter, elle a multiplié les attaques contre la nouvelle Procureure générale. « Je pense qu’il est temps pour Caroline Mulroney et les juristes du caucus de Doug Ford de démissionner : ils n’ont pas été élus pour mettre leur réputation en jeu pour utiliser la clause nonobstant », a-t-elle écrit.

Quant à l’élection municipale de Toronto, elle croit qu’il est trop tard pour mener des changements sur la taille du conseil de ville. « Il n’y a qu’une seule façon raisonnable d’agir ici : obéir à la décision du juge et laisser l’élection se faire à 47 conseillers », écrit-elle.