Boileau menace d’attaquer la Ville d’Ottawa en justice

Le commissaire aux services en français de l'Ontario, François Boileau. Crédit image: Patrick Imbeau

[EXCLUSIF]

TORONTO – La coupe est de en plus pleine pour François Boileau. Lassé par le soi-disant peu de retours de la Ville concernant le traitement des plaintes, le commissaire aux services en français de l’Ontario ne ferme pas la porte à une action judiciaire. Cela constituerait une première depuis la création du Commissariat en 2007.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

« J’espérais qu’avec la loi provinciale 177 sur le nouveau statut du bilinguisme à Ottawa, il y aurait une meilleure coopération, mais il apparaît que l’administration municipale s’est refermée », croit le commissaire Boileau, en entrevue téléphonique avec #ONfr.

Dans le terme « coopération », le chien de garde aux services en français évoque un besoin de retours plus fréquent quant aux traitements des plaintes. « Lorsque l’on présente quelque chose qui doit être réglé, on va dire qu’ils (la Ville d’Ottawa) ne font pas toujours de suivis. Tout n’est pas réglé. »

Les mots sont alors lâchés : « Je n’exclus pas de procéder à une action juridique. La main est pour l’instant tendue, et j’ai beaucoup d’espoir que la Ville règle ce problème, notamment avec l’appui du Comité consultatif sur les services en français. »

Statu quo pour le procédure de plaintes

Car les résidents de la Ville d’Ottawa peuvent porter plainte en tout temps au Commissariat s’ils constatent un service en français manquant à la Ville d’Ottawa. Des exemples qui peuvent aller de l’absence d’éventuels cours prénataux ou de natation en français par la municipalité, la signalisation routière unilingue, ou les services de garde. Cela peut se faire avant ou après une plainte déjà déposée à la Direction des services en français (DSF) de la Ville d’Ottawa.

En réalité, toutes les villes de l’Ontario n’entrent pas dans la juridiction de Me Boileau. Seules les douze municipalités possédant un règlement bilingue, et incluant donc Ottawa, sont assujetties à la Loi sur les services en français de l’Ontario (LSF) en vertu de l’article 14.

Malgré la nouvelle loi, les pouvoirs d’enquêtes du commissaire ne peuvent pas s’appliquer à la police municipale, la bibliothèque publique, la Société de logement communautaire d’Ottawa ainsi qu’à Hydro Ottawa.

Le Commissariat aux services en français reçoit de nombreuses plaintes de la Ville d’Ottawa. Crédit image : Archives #ONfr

Sur les 301 plaintes reçues par le Commissariat en 2016-2017, cinq concernaient la Ville d’Ottawa. Un chiffre stable si l’on compare en 2014-2015 (7) et 2015-2016 (3).

« On a une relation froide avec la Ville d’Ottawa », confie Me Boileau. « Je ne pense pas que le maire, Jim Watson, apprécie toujours mes sorties. »

En guise de signe de tension, le commissaire cite l’exemple des consultations prébudgétaires en 2015 dévoilées seulement en anglais. « La Ville n’a pas apprécié qu’on le mentionne. En 2016 et 2017, les consultations étaient alors bilingues. Ça ne valait pas alors la peine de pousser encore le clou. On n’est pas plus imbéciles que d’autres (…) Je ne suis pas l’ogre que la Ville d’Ottawa croit. »

« Un processus robuste », pour la Ville d’Ottawa

Invitée à répondre aux déclarations de Me Boileau, la municipalité n’a pas tardé à réagir… mais la réponse se focalise sur le traitement des plaintes adressées à la municipalité.

« La Ville d’Ottawa prend chaque plainte au sérieux et dispose d’un processus robuste de traitement des plaintes. La DSF examine et répond aux plaintes concernant la qualité et la prestation des services en français qu’offre la Ville, et assure un suivi avec les plaignants en leur fournissant les informations relatives au traitement de celles-ci et aux mesures correctives prises, le cas échéant », a fait part la gestionnaire des services en français, Michelle Rochette, dans un échange de courriels avec #ONfr

Dans son dernier rapport annuel sur les services en français dévoilé la semaine dernière, la DSF parlait de 47 requêtes pour 2017. Un chiffre doublé en comparaison aux 23 plaintes reçues pour 2016.

La présidente du Comité consultatif sur les services en français, Johanne Leroux, n’avait pas retourné nos appels au moment de la publication de cet article.


POUR EN SAVOIR PLUS :

Services en français : hausse des plaintes à Ottawa

Gestion des plaintes : Boileau vise la Ville d’Ottawa