Budget ontarien : un programme d’aide d’urgence pour les organismes francophones
TORONTO – Près de 10 % des organismes francophones appelés à disparaitre avant la fin de l’année, l’estimation de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) fait froid dans le dos. Dans son budget présenté ce jeudi, le gouvernement ontarien met sur pied un « Fonds de secours pour les organismes francophones sans but lucratif suite à la COVID-19 » d’un million de dollars.
Objectif? Aider les organismes « à assurer leurs coûts de fonctionnement, notamment pour prévenir les fermetures ainsi que retenir et recruter du personnel bilingue compétent », peut-on lire dans le document.
Un nouveau million de dollars sera ajouté à ce fonds, à partir du printemps.
Ce coup de pouce s’ajoute à l’enveloppe de 1,5 million de dollars du Fonds d’aide et de relance pour entreprises et organismes francophones du sud de l’Ontario (FAREOSO), financée par le gouvernement du Canada par l’entremise de l’Agence fédérale pour le développement économique pour le sud de l’Ontario (FedDev Ontario).
Récemment, il y eut aussi le renouvellement du Programme d’appui à la francophonie ontarienne (PAFO) représentant un million de dollars.
« On est content », a commenté le président de l’AFO, Carol Jolin. « Si on regarde, ça nous amène à 4,5 millions de dollars l’année prochaine, et il y aura d’autres programmes généraux. »
Mais à l’approche du budget, l’organisme porte-parole des Franco-Ontariens réclamait 12,5 millions de dollars au gouvernement pour aider les organismes sans but lucratif.
« C’est exact, mais on est tout de même sur la bonne voie », précise M. Jolin. « On sait aussi que le gouvernement fédéral a donné de l’argent pour les arts et la culture à travers les différents députés, mais on n’est pas capable de mettre le doigt sur qui a reçu de l’argent. »
La chef du Nouveau Parti démocratique de l’Ontario (NPD), Andrea Horwath, juge en revanche l’aide insuffisante.
« C’est une goutte dans l’océan et n’apportera pas l’aide nécessaire pour ces organisations qui font de l’aide essentielle dans la province. Ces organisations aident les enfants et les familles. Ces organisations francophones avaient besoin de 12 millions. Le gouvernement Ford leur dit : on vous laisse à vous-mêmes. »
Même sentiment d’insuffisance chez les libéraux et la porte-parole aux Affaires francophones du parti, Amanda Simard.
« On peut clairement voir où le gouvernement coupe des coins : encore avec les Franco-Ontariens. Doug Ford et son gouvernement conservateur continuent de trahir les Franco-Ontariens et tous les Ontariens à un temps où ils ont le plus besoin de soutien », a t-elle laissé entendre à ONFR+.
Le budget de ministère des Affaires francophones augmente
Autre annonce en faveur des francophones à l’intérieur du document budgétaire : l’augmentation du budget annuel consacré au ministère des Affaires francophones.
Pour l’année 2020-2021, quelque 7,1 millions dollars sont alloués au ministère dirigé par Caroline Mulroney, contre cinq millions pour l’année précédente.
À l’heure de mettre ces information sous presse, on ne sait pas si le « Fonds de secours pour les organismes francophones sans but lucratif suite à la COVID-19 » est inclus dans ce budget de sept millions.
« N’importe quel accroissement du budget du ministère est le bienvenu », insiste M. Jolin. « Ce ne sont pas tous les ministères qui vont se retrouver avec des augmentations de budget. »
La somme précisée pour les cours de TFO
Par ailleurs, on en sait un peu plus sur la volonté du gouvernement Ford d’élargir le mandat du Groupe Média TFO pour lui confier l’apprentissage en ligne en langue française.
« La province fournit aux élèves et au personnel enseignant de nouveaux outils d’apprentissage pour les aider durant la COVID-19 grâce à un investissement de sept millions de dollars sur trois ans. »
La somme sera partagée entre TFO, et son homologue anglais TVO, sans que la province ne parvienne à détailler la part du gâteau respective.
Dans un premier temps, seules les langues, les mathématiques, les sciences et les études sociales seront concernées par cet apprentissage.
De l’argent pour les arts
Enfin, le gouvernement ontarien entend mettre la main à la pâte pour le secteur des arts. Un fonds de 25 millions de dollars ponctuel est ainsi octroyé pour les arts et la culture.
« Ce soutien aidera les organismes à rester solvables et à se préparer à rouvrir leurs portes, à reprendre leur programmation complète, et à accueillir à nouveau leurs visiteurs et leur public », précise le gouvernement.
Le gouvernement demande, par ailleurs, au Conseil des arts de l’Ontario et à la Fondation Trillium « plus de souplesse aux bénéficiaires et aux demandeurs de subventions ».
Grogne du milieu de l’éducation
L’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontarien (AEFO) a, de son côté, manifesté plus de réserve pour ce budget, et dénonce les conditions de travail de ses membres « passées sous silence ».
« L’AEFO ne comprend pas pourquoi le gouvernement n’a pas injecté les fonds nécessaires pour assurer la santé et la sécurité des travailleuses et des travailleurs en éducation », a déclaré la présidente de l’AEFO, Anne Vinet-Roy, par voie de communiqué.
« Il y a de sérieuses lacunes dans les écoles et autres lieux de travail des membres de l’AEFO : système de ventilation, ajout de fenêtres, mesures plus sécuritaires, etc. Puisque le budget est maintenant déposé, l’AEFO souhaite que le gouvernement cesse d’éviter de collaborer avec les syndicats de l’enseignement et tienne enfin compte de leurs recommandations. »
Du côté de l’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC), on se dit également « déçu du manque d’attention portée au problème concernant la pénurie des enseignantes et enseignants francophones dans la province ».
Et de poursuivre, dans un communiqué envoyé en soirée : « Pour remédier à ce problème, l’AFOCSC avait proposé au gouvernement, entre autres, de créer un groupe de travail permanent pour la promotion et le recrutement d’enseignantes et d’enseignants de langue française, en plus de mettre en place un programme de stages rémunérés, de mentorat et de soutien aux nouvelles enseignantes et nouveaux enseignants. Parmi ces suggestions, aucune ne semble avoir été retenue. »
Enfin, l’Association des conseils scolaires des écoles publiques de l’Ontario (ACEPO) préfère faire contre mauvaise fortune bon cœur.
« Ce budget est un résumé ce ce qui a été jusqu’à maintenant annoncé », analyse le président, Denis Chartrand, pour ONFR+. « Nous les remercions d’ailleurs pour ces sommes. »
« Reste qu’à court ou moyen terme, nous attendons une aide du gouvernement plus prononcée. Nous avons dû piger dans nos réserves avec la crise sanitaire, et maintenant nos réserves sont très basses. On demande toujours que notre budget opérationnel soit réhaussé de 4 % et que le gouvernement finance les recommandations sur la pénurie d’enseignants francophones qui seront dévoilées au mois de janvier. »