Budget : Ottawa en rajoute pour le transport en commun
OTTAWA – Les grands centres urbains du Canada ont obtenu la promesse d’un petit coup de pouce pour leurs transports en commun dans deux ans alors qu’Ottawa renouait avec l’équilibre budgétaire, le mardi 21 avril.
FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault
SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @SebPierroz
Le gouvernement conservateur de Stephen Harper a annoncé la création d’un nouveau Fonds pour le transport en commun, dont l’enveloppe serait établie à 750 millions $ pour 2017 et 2018, puis à 1 milliard $ annuellement par la suite.
Ce nouveau fonds permanent devrait permettre aux grandes municipalités canadiennes de mener à bien, avec la participation du secteur privé, des projets « ciblés » comme l’agrandissement de leurs réseaux d’autobus ou de trains légers, ou encore la modernisation de leurs parcs de véhicules.
« Le financement sera là dans deux ans parce que ces grands projets auxquels nous voulons contribuer prennent du temps à préparer. L’argent sera là quand (les municipalités) en auront besoin », a expliqué Joe Oliver, ministre des Finances, lors du dépôt de son budget aux Communes, le 21 avril. « Le côté privé est important. Ça donne une discipline pour que les projets soient livrés à temps et de façon rentable », a-t-il précisé.
Pour l’opposition à Ottawa, toutefois, c’est trop, peu trop tard.
« Ce n’est pas énorme. Et ça n’arrivera qu’en 2017 », a commenté le libéral Mauril Bélanger à #ONfr. « Ça pourrait devenir compliqué pour les municipalités. Il leur faudra demander la participation du secteur privé. Et si elles ne l’obtiennent pas, elles n’auront pas droit aux subventions du fédéral », a renchéri Yvon Godin, député néo-démocrate d’Acadie-Bathurst, au Nouveau-Brunswick.
Pour l’Ontario, dont le gouvernement libéral a déjà réclamé jusqu’à 12 milliards $ par année du fédéral pour l’aider à bâtir et retaper son infrastructure, cette annonce sur le transport en commun a été perçue comme une « gifle au visage », aux dires du trésorier provincial Charles Sousa.
« Il n’y a aucun financement pour l’infrastructure vitale dont les gens dépendent, comme des routes et des ponts, ni pour l’entretien de cette infrastructure », a pesté M. Sousa dans les heures qui suivi le dépôt du budget fédéral. « Non seulement le fédéral a-t-il raté le train du transport en commun, mais il n’est même pas encore arrivé à la gare. »
Équilibre budgétaire
Joe Oliver a dit entrevoir un surplus de 1,4 milliard $ au cours du prochain exercice financier, le premier depuis huit ans. Il s’agit toutefois d’un surplus artificiel puisque le grand argentier a dû puiser dans les réserves du pays pour palier un manque à gagner qu’a provoqué la chute du prix du pétrole au cours des derniers mois.
La dette nationale demeurerait stable à 617 milliards $.
Dans son budget, le clan Harper s’est par ailleurs engagé à bonifier de 27 milliards $ sur cinq ans les transferts aux provinces pour les soins de santé. « Les transferts aux provinces et aux territoires n’ont jamais été aussi élevés et continueront d’augmenter à l’avenir », lit-on dans le document budgétaire.
Les transferts fédéraux à l’Ontario doivent atteindre 20,4 milliards $, au cours de la prochaine année. Il s’agit d’un bond de 1,25 milliard $ par rapport à l’exercice précédent, qui s’explique en grande partie par un rajustement des paiements de péréquation à la province.
Rappelons que Queen’s Park avait très mal pris de voir ses transferts fédéraux réduits de plus de 640 millions $ à la suite d’un changement temporaire à la formule de partage de la richesse au pays, l’année dernière.
Défense nationale
Une part importante de ce budget 2015 reviendrait à la Défense nationale, dont les conservateurs ont promis d’accroître le financement de 12 milliards $ sur dix ans pour le maintien d’une « puissance militaire apte au combat et prête à servir au pays et à l’étranger ». Une autre somme de 360 millions $ devrait venir appuyer la lutte au groupe armé État islamique « à l’étranger et ici ».
« Notre gouvernement est conscient des dangers actuels et il est déterminé à y répondre de façon responsable, sans ambiguïté ou tergiversation morale », a déclaré M. Oliver dans son discours budgétaire aux Communes.
« C’est un gouvernement de guerre », a fustigé Yvon Godin, du NPD. « On investit dans la Défense quand certains crèvent de faim. »
Allègements fiscaux
À six mois d’élections fédérales, le gouvernement de Stephen Harper y va aussi d’allègements fiscaux pour les familles. Le parti au pouvoir à Ottawa chiffre à 6600$ les économies d’une « famille type de quatre personnes à deux revenus » après la comptabilisation de baisses d’impôts, de la prestation universelle pour la garde d’enfants et des crédits d’impôts pour la condition physique des enfants, notamment.
Le premier budget de Joe Oliver, qui a succédé à Jim Flaherty quelques semaines avant le décès subit de celui-ci, l’an dernier, a par ailleurs rempli une promesse de longue date des conservateurs de relever de 5000$ à 10000$ le plafond de cotisation annuel à un compte bancaire d’épargne libre d’impôt, et ce, à compter de cette année.
Sans surprise, le clan Harper n’a rien signalé au sujet d’une bonification du Régime canadien des pensions – une autre demande clé de l’Ontario. Mais il a tout de même annoncé une « réduction des exigences » sur le retrait minimal qui s’appliquent aux fonds enregistrés de revenus de retraite.
Contrairement aux années passées, le gouvernement fédéral n’a finalement pas ficelé son budget au prix de grandes compressions dans la fonction publique. Il a néanmoins lancé d’idée dans son budget de présenter « au besoin » des projets de lois pour « simplifier ses opérations » et « optimiser la gouvernance de ses organismes, des conseils et des commissions fédérales canadiennes, ainsi que des sociétés d’État ».
D’autres mesures dans le budget fédéral 2015
– Réduction du taux d’imposition des petites entreprises de 10,5% à 9% sur quatre ans pour favoriser la création d’emplois;
– Investissement de 1,5 milliard $ sur cinq ans dans la recherche scientifique et l’innovation technologique;
– Investissement de 150 millions $ sur quatre ans pour aider des fournisseurs de logements sociaux à rembourser leurs hypothèques plus rapidement;
– Création à l’approche des célébrations du 150e anniversaire de la Confédération canadienne, d’un « fonds spécial » d’une valeur pour l’instant indéterminée pour le renouvellement de l’infrastructure communautaire.
– Inclusion des programmes d’études de courte durée dans les programmes de bourses d’études postsecondaires pour les étudiants à faible ou moyen revenu;
– Prolongement de six semaines à six mois de la durée des prestations d’assurance-emploi pour les travailleurs qui prennent soin d’un membre gravement malade de leur famille.