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Ces électeurs qui se rendent aux urnes pour la première fois

Nouvellement majeurs, nouveaux citoyens, ou de retour aux urnes après une longue période d'abstention : de nombreuses personnes se rendent aux urnes pour la première fois pour cette élection cruciale pour le Canada. Photo : Montage ONFR

ONTARIO – Des millions de Canadiens sont appelés aux urnes ce lundi pour élire le prochain gouvernement. Parmi eux, de nouveaux électeurs qui iront faire entendre leurs voix dans ce scrutin que beaucoup présentent comme étant le plus important de l’histoire du pays.

Abby Baker habite à Longlac, dans le nord-ouest de l’Ontario et vient de fêter ses 18 ans. Elle est allée voter par anticipation, comme plus de sept autres millions de Canadiens. « Mon vote est vraiment important, pour représenter les jeunes dans cette élection », croit la jeune Franco-Ontarienne.

L’accès aux services et à l’éducation en français en milieu minoritaire est, selon elle, un critère essentiel et ce qui l’a déterminé à choisir le parti pour lequel elle a voté.

« Si tu t’en vas prendre un café au Tim Hortons ou autre, la moitié du temps, tu n’as pas le droit à un service en français. C’est vraiment un hit and miss, et je n’aime vraiment pas ça. Je trouve ça vraiment plate pour du monde qui ne parle qu’en français. »

Abby Baker a grandi au sein d’une famille anglophone qui a tenu à l’inscrire dans une école francophone afin de lui offrir les meilleures perspectives d’emploi. Photo : Gracieuseté de Abby Baker

Mélanie Denis-Plante, une autre jeune femme de 18 ans, était très nerveuse lors de son premier vote, mais s’est sentie soutenue par le personnel, majoritairement francophone, présent dans le bureau d’Élections Canada.

« À la fin, lorsque j’ai fini de voter, ils ont tous applaudi parce que c’était ma première fois et que j’avais bien réussi », rapporte celle qui est originaire de Hanmer, dans la région de Sudbury.

Pour elle aussi, l’un des critères les plus importants pour cette élection est d’élire un premier ministre qui a à cœur la francophonie : « Oui, il y a encore des francophones, mais c’est vraiment une langue qui devient de moins en moins parlée. Alors il faut quelqu’un qui sera là pour nous défendre et défendre nos droits de francophones ».

Avoir une sœur travaillant comme page à la Chambre des communes a incité Mélanie Denis-Plante à s’intéresser à la politique. Photo :  Paul De La Riva

Tarifs américains et course à deux

Selon le politologue Peter Graefe, le fait qu’il y ait eu plus de 25 % de votants supplémentaires lors du scrutin par anticipation que lors de celui de 2021, est en grande partie lié à la menace tarifaire venant du sud.

« C’est quand même une question assez anthologique et fondamentale qui provoque une réponse, en particulier chez les gens qui ont tendance à ne pas suivre la chose politique. »

« C’est vraiment important que tout le monde vote, car c’est ce nouveau gouvernement-là qui va nous diriger durant cette crise », confie Abby Baker.

Peter Graefe, politologue à l’Université McMaster. Photo : Gracieuseté de Peter Graefe

« Même sans la question de M. Trump, il y a quand même un investissement émotionnel assez important, qu’on cherche soit à remplacer un gouvernement libéral à tout prix, ou qu’on cherche à éviter l’élection de M. Poilievre et d’un Parti conservateur à tout prix », ajoute le professeur de sciences politiques à l’Université McMaster de Hamilton.

Déménager si les libéraux l’emportent

C’est le cas de la famille Mallette, de Sudbury, qui ne se souvient pas de la dernière fois qu’elle s’est rendue aux urnes : « Ça ne sert à rien, peu importe celui qui gagne, il ne fait que ce qu’il veut anyway ».

Il ne fait aucun doute dans la tête de chacun des membres de cette famille qu’ils voteront pour contrer les libéraux et soutenir le seul parti qui a une chance de les faire plier : les conservateurs de Pierre Poilievre.

« Ça fait 10 ans qu’ils n’ont rien fait de bon, notre pays est fini. On a plein de villages de tentes, trop d’immigrants, trop d’attente pour se faire soigner et pour tout en général », justifie la mère de famille, Mona Langis Mallette.

La famille Mallette se rend régulièrement aux événements organisés au park Bell et au centre commercial de Sudbury visant à manifester contre les libéraux. Photo : Gracieuseté de Mona Langis Mallette

Son époux, Louis Mallette va même jusqu’à confier que si les libéraux gagnent les élections, toute la famille déménagera dans l’Ouest canadien, en Alberta, car c’est une province acquise aux conservateurs.

En outre, pour ce couple de retraités, le fait que la campagne ait été axée autour de la guerre commerciale avec les États-Unis et les menaces d’annexion est un gâchis : « Ça ne m’énerve pas en tout ça en tout cas. Ça peut bien réveiller des Canadiens. »

Sentiment d’appartenance

Parmi les nouveaux votants, il y a aussi ceux qui sont récemment devenus citoyens et qui tiennent à se rendre aux urnes pour faire valoir leur voix.

C’est le cas de la Torontoise Melissa Pinto qui a obtenu la citoyenneté canadienne en juin 2023 et qui a même décidé de travailler dans les bureaux de vote d’Élections Canada.

Melissa Pinto estime qu’il est important de se rendre aux urnes, en partie parce que les femmes ont dû se battre pour obtenir le droit de vote. Photo : Gracieuseté de Melissa Pinto

« Quand j’ai eu ma citoyenneté, je voulais être investie dans la vie politique et je me suis dit, pourquoi ne pas travailler aux élections? Je me suis dit que je devais faire mon devoir de citoyenne, pour la démocratie. »

Pour la trentenaire, cette première fois aux urnes a une saveur particulière : « C’est d’autant plus important parce qu’il y a quand même un enjeu vraiment important au niveau des relations avec les États-Unis, ce qui m’a déjà impactée étant donné que j’ai perdu mon travail, il y a un mois. »

Si la jeune femme ne sait pas encore pour quel parti ira son vote, celle-ci est sûre d’une chose : elle ne votera pas pour les conservateurs.