COVID-19 : des centaines de milliers de dollars de dépenses pour les villes franco-ontariennes
Des dépenses de milliers à près d’un million de dollars, voilà à quoi sont confrontées les municipalités franco-ontariennes dans ce qui ressemble à un dur lendemain de veille pandémique. Si les villes affirment pouvoir bien s’en sortir, il faudra de la patience, car le processus pourrait prendre plusieurs années.
« Un million de dollars » : c’est le coût des dépenses supplémentaires et pertes de revenus attribuables à la pandémie dans sa municipalité, confie le maire de Clarence-Rockland, Guy Desjardins.
Ce dernier se montre inquiet, car le manque à gagner est énorme, mais les dépenses étaient nécessaires.
« On a dû faire des changements. Notre garderie municipale, il a fallu continuer de payer les employés. Aussi, nous sommes obligés de n’avoir qu’un seul employé municipal par véhicule, en plus de permettre aux employés municipaux de travailler à distance avec des ordinateurs portables », dit-il.
« Ça pourrait monter jusqu’à 200 000$ » lance de son côté le maire de La Nation, François St-Amour.
À Hearst, la pandémie a eu des conséquences financières limitées sur le budget de la Ville. « Nous n’avons pas de transports en commun. Peut-être 100 000 $ de dépenses en plus? », confie le maire Roger Sigouin.
Pour Paula Assaly, la mairesse de Hawkesbury, il faut se montrer prudent avant d’évaluer l’impact financier du coronavirus.
« Je pense que ça va prendre une analyse à la fin de 2020 pour être capable de chiffrer le tout. Il y a des pertes et des revenus, et l’on ne peut pas les comptabiliser, car on est encore à l’intérieur du COVID-19 » dit-elle.
Des dépenses et des absences de revenus
Il n’y a pas juste les dépenses de matériel médical comme du désinfectant et des masques qui ont fait mal aux villes. Les maires rappellent que l’absence de revenus en provenance d’installations municipales a aussi frappé fort.
« On a perdu beaucoup de revenus en raison de l’absence de location de notre aréna et nos salles communautaires. Monter les taxes est une option, mais quand on les monte, c’est rare qu’on les redescende ensuite » soutient le maire St-Amour.
Dans le Nord de l’Ontario à Greenstone, la santé économique de la ville de près de 5 000 habitants mise beaucoup sur ses pourvoiries pour attirer les visiteurs, surtout les Américains qui ne viendront pas cet été. Le maire Renald Beaulieu indique que près d’une cinquantaine de pourvoiries sur le territoire vont souffrir du manque d’afflux touristique.
« Ce ne sont pas juste des visiteurs américains que l’on reçoit, plusieurs pourvoiries appartiennent aussi à des Américains qui ne pourront pas venir cette année. Pour Greenstone, les pourvoiries, c’est près de 20 millions de dollars en retombées. »
Ce dernier croit que ce nombre va réduire d’au moins la moitié cette année.
Coupures dans les services?
À Russell, les taxes des citoyens ont augmenté en 2020. Pour le budget de 2021, le maire Pierre Leroux est moins enclin à hausser les taxes jugeant que sa ville possède de « bonnes réserves ».
« Si l’on a une hausse de taxes, ça serait pour les coûts opérationnels, je ne vois pas de gros surplus de taxes à cause de la COVID-19 » explique-t-il.
« Évidemment on ne peut pas donner tout à tout le monde. La pandémie ne fait que commencer, mais l’impact financier va être là pour des années à venir » croit M. Leroux.
À Greenstone, le fonctionnement de la municipalité est encore très lié à la fusion de 2001 impliquant plusieurs villes comme Geraldton et Longlac. Un fonctionnement qui coûte cher, mais qui pourrait être réduit en partie à cause de la pandémie.
« On voulait déjà couper dans les services avant parce qu’on est quasiment comme quatre municipalités, alors peut-être que la COVID-19 va nous aider à accélérer dans ce cas-là » indique M. Beaulieu.
De l’aide gouvernementale en vue?
De son côté, Guy Desjardins ne compte pas augmenter les taxes municipales, car « tout le monde a déjà de la misère », mais alors il faudra peut-être couper dans les services, dit-il.
L’aide fédérale serait bienvenue, mais l’élu de Clarence-Rockland ne se fait pas d’illusions.
« On attend de voir quelle aide le fédéral est prêt à donner. Mais les grosses villes sont des éléphants, nous seulement des souris. On aura les miettes… », illustre-t-il.
Le maire de Hearst, Roger Sigouin, ne veut pas de l’aide fédérale.
« Il y a des familles qui en ont besoin, d’autres non. J’ai de la misère à voir toutes ces grandes villes qui demandent de l’argent. C’est l’argent du public, il faut travailler à l’interne et faire le ménage d’abord dans sa sacoche », lance-t-il, avec son franc-parler habituel.
Certains maires affirment de leur côté être satisfaits de la réponse du gouvernement Ford jusqu’à présent.
« On offre beaucoup de subventions en ce moment et c’est à nous d’en tirer avantage de ces subventions-là qui se présentent », indique la mairesse Assaly.
Les grandes villes du pays font front commun depuis plusieurs semaines pour exiger de l’aide d’Ottawa. L’Association des municipalités de l’Ontario (AMO) qualifie même la situation d’« urgente », dans une déclaration publiée lundi.
« Pour protéger les services municipaux, nous avons besoin d’une aide provinciale et fédérale immédiate pour couvrir les pertes de revenus », affirme-t-on.
Article écrit avec la collaboration d’Étienne Fortin-Gauthier