COVID-19 : les foyers de soins de longue durée en « alerte rouge »
Deuxième vague de COVID-19 imminente ou bien déjà arrivée? Sur le terrain, les foyers de soins de longue durée sont déjà prêts pour éviter l’hécatombe du printemps. Quelque deux tiers des 2 829 décès attribuables au coronavirus proviennent de ces résidences pour aînés dans la province.
À Hearst, le Foyer des Pionniers a résisté à l’épidémie. Une seule alerte enregistrée : un membre du personnel déclaré infecté début août, avant que ce diagnostic ne soit identifié comme un « faux positif ».
« Fin août, nous avons soumis au ministère de la Santé un plan de préparation en cas de seconde vague », explique la directrice générale, Joëlle Lacroix.
« Il fallait expliquer les forces et les faiblesses de notre centre. Parmi les faiblesses, nous avons dit que nous manquions d’infirmières. Présentement, j’ai quatre infirmières autorisées, et cinq auxiliaires. Il [le ministère de la Santé] pourrait essayer de nous envoyer des infirmières. Imaginez-vous une situation où nous serions touchés avec notre manque d’infirmières? Ça serait désastreux. »
Le Foyer des Pionniers, à Hearst, compte actuellement 67 lits.
Une petite ombre toutefois pour Mme Lacroix : depuis fin août, le gouvernement autorise les pensionnaires à quitter leur résidence pour de courts séjours et des absences temporaires.
« Ce n’est pas trop logique d’avoir toutes ces mesures en place au niveau des préventions, mais qu’ils puissent sortir. D’un autre côté, ça leur fait tellement du bien. Ils étaient auparavant prisonniers, et ne pouvaient sortir nulle part. Il faut trouver un équilibre entre la sécurité et le besoin émotionnel. »
Mais la directrice générale prévient : « Si la situation devient à risque, j’aurai le pouvoir d’empêcher les sorties. »
Les directives gouvernementales précisent que ces sorties temporaires sont bien à la discrétion des foyers, qui évalueront les risques au cas par cas.
À des centaines de kilomètres de là, le défi est le même pour le Foyer Richelieu Welland, dans le Niagara.
« On est rentré dans une deuxième vague, on peut appeler ça des ondelettes », résume le directeur du centre de soins de longue durée pour les francophones, Sean Keays.
« J’ai rempli un rapport au gouvernement pour pointer nos faiblesses. Pour moi, le principal problème est le sous-financement de nos employés. On aurait besoin d’un 4 $ de plus, par heure, pour les préposés. Ce 4 $ représente 20 % de leur salaire. Ce n’est pas rien! Mais cette prime de 4 $ lancée au printemps n’est aujourd’hui plus en activité depuis mi-août! »
Ce problème de sous-financement chronique inquiète M. Keays, surtout dans l’hypothèse d’une deuxième vague agressive.
« On a plus de règlements que ceux qui travaillent dans les mines, sans oublier que nous avons déjà doublé les budgets pour désinfecter ou encore, pour les animations. Ce n’est pas facile! »
La directrice du Foyer des Pionniers, Joëlle Lacroix, craint aussi les autres virus.
« Il n’y a pas que la COVID-19 sur laquelle nous allons devoir rester aux aguets, mais aussi l’influenza et la grippe! Il va falloir isoler au moindre petit symptôme! »
Dans la région d’Ottawa, un printemps très difficile
ONFR+ a tenté de joindre plusieurs foyers de soins de longue durée ou résidences francophones et bilingues de la région d’Ottawa. Aucun de ces centres n’était en mesure de nous donner une entrevue, au moment de mettre ces informations sous presse.
Le printemps a été meurtrier pour beaucoup d’entre eux. Au total, la COVID-19 a fait 31 victimes au Centre de soins de longue durée Montfort, dix au foyer de soins de longue durée Pinecrest, à Plantagenet. De son côté, la Résidence Saint-Louis à Orléans, gérée par le groupe Bruyère, a compté neuf décès, pour un total de 54 cas.
« Pas de mesures trop strictes », prône la FARFO
Mesures strictes ou bien flexibilité? La question divise, à l’heure où l’Ontario a franchi la barre des 400 cas de nouvelles infections quotidiennes. Un chiffre qui place la province dans les mêmes eaux que début juin. Petite différence : les hospitalisations sont aujourd’hui moins nombreuses.
« On pense que c’est nécessaire ne de pas avoir des mesures trop strictes », plaide Jean-Rock Boutin, président de la Fédération des aînés et des retraités francophones de l’Ontario (FARFO).
« On souhaite que les foyers et les résidences aient des approches plus souples pour permettre aux aidants naturels, mais aussi aux aînés qui voudraient quitter leur résidence pour pouvoir s’isoler un peu avec leur famille. Cependant, il faut être prudent et aller au cas à cas. »
M. Boutin précise que la FARFO n’a pas pour prétention « d’être le porte-parole pour ce secteur ».