
Débat des chefs : Carney veut augmenter l’immigration francophone, Poilievre l’immersion en français

MONTRÉAL – La francophonie hors Québec a été mentionnée légèrement en fin de débat des chefs fédéraux, ce mercredi, Mark Carney proposant d’augmenter davantage la cible d’immigrants francophones, Pierre Poilievre assurant qu’il va protéger Radio-Canada hors du Québec.
« On va augmenter le taux d’immigrants hors du Québec avec une langue maternelle française de 10 à 12 % », a affirmé M. Carney questionné par l’animateur Patrice Roy sur ce qu’il comptait faire pour rétablir le poids démographique des francophones en chute depuis plusieurs décennies.
La premier ministre sortant n’a pas précisé quand, mais actuellement la cible gouvernementale est de 8,5 % pour 2025, de 9,5 % pour 2026 et de 10 % pour 2027.
« Ça me semble raisonnable. Je suis d’accord avec lui, a adhéré Pierre Poilievre sur la cible de 12 % en conférence de presse post-débat. On est en faveur d’élargir le nombre d’immigrants francophones qui viennent au Canada, y compris à l’extérieur du Québec pour qu’on puisse ajouter un poids démographique à la langue française. »
Sur l’immigration, Mark Carney a laissé entrevoir qu’il était en faveur du maintien des cibles actuelles (395 000 en 2025, à 380 000 en 2026 et à 365 000 en 2027) de résidents permanents au pays « pour une assez longue période de temps ». Sur les réfugiés haïtiens aux États-Unis qui souhaitent migrer vers le Canada, autant M. Carney que M. Poilievre ont mis des freins, ce dernier statuant qu’il « faut les retourner » alors que M. Carney a soutenu « qu’il y a des limites ».
M. Carney, dont le parti à l’image des autres, n’a pas encore sorti de plateforme chiffrée à ce stade-ci de la campagne électorale, a indiqué que, si élu, son gouvernement « renforcerait » Radio-Canada, Téléfilm Canada et le Conseil des arts du Canada.
Le débat au siège social montréalais de Radio-Canada opposait les chefs Mark Carney (Parti libéral), Pierre Poilievre (Parti conservateur), Jagmeet Singh (NPD) et Yves-François Blanchet (Bloc québécois). Ils ont débattu pendant près de deux heures dans une ambiance très rarement cacophonique, mais où les chefs n’ont pas hésité à se lancer des piques.
De son côté, le chef conservateur a dû défendre son plan consistant à mettre fin au financement de CBC, ce qui pourrait avoir un impact sur son pendant francophone.
« C’est possible, on a des réseaux d’informations seulement en français », a assuré Pierre Poilievre, citant TVA Nouvelles au Québec comme exemple.

« La CBC peut se financer avec ses propres revenus, a-t-il poursuivi. Le gouvernement devrait faire simplement ce que le marché ne peut pas (faire). Le marché ne va jamais fournir un service exclusivement en français aux gens dans les communautés francophones à travers le Canada. Il y a un rôle pour l’État pour défendre l’information en français. »
Le chef conservateur a par ailleurs soutenu que son gouvernement augmenterait l’offre pour l’immersion des Canadiens hors du Québec.
« On va ajouter de l’argent pour permettre aux jeunes de participer dans l’immersion en français au Québec (pour) les gens venant d’ailleurs au Canada pour enrichir par la langue française », a souligné M. Poilievre.
En conférence de presse d’après-débat, M. Poilievre n’a pas approfondi sa pensée sur le sujet, mais a concédé que « la gestion des écoles est provinciale », se disant « prêt à travailler en pleine collaboration avec toutes les provinces pour faire en sorte que ça soit plus disponible ».
La guerre commerciale a dominé le débat
La guerre commerciale avec les États-Unis et le coût de la vie ont retenu l’attention pendant presque les cinquante premières minutes du débat avec le chef libéral essuyant la plupart des attaques
Ce dernier a assuré être le meilleur pour négocier avec Donald Trump en « montrant de la force », faisant du pouce sur son déplacement en Europe, son premier voyage comme premier ministre, pour augmenter les accords commerciaux.
Pour le chef néo-démocrate, ce voyage a donné au chef libéral « le temps de rencontrer le Roi, mais pas les gens qui souffrent. »
« Vous aimez augmenter les impôts », a glissé Pierre Poilievre à l’ex-banquier, accusant son parti d’avoir bloqué les exportations de ressources naturelles vers l’Europe dans les dix dernières années.
Organisé par Radio-Canada, ce débat survient à moins de deux semaines de la fin de l’élection alors que les libéraux profitent, selon les différents sondages, d’une avance de quelques points sur les conservateurs de Pierre Poilievre. Ils débattront à nouveau jeudi en anglais.
Le bilan Trudeau colle à la peau de Mark Carney
Le bilan des dix dernières années de Justin Trudeau a collé à la peau de Mark Carney dans ce débat alors que les chefs ont attaqué le bilan libéral, particulièrement de la part de Pierre Poilievre. Immigration, coût de la vie, logement, Mark Carney n’a pas été épargné pour les décisions de son prédécesseur.
Sur la construction de logements, M. Poilievre a soutenu que les libéraux étaient « en train de répéter les mêmes promesses que Justin Trudeau ». « On n’a pas besoin de plus de fonctionnaires, on a besoin de plus de portes », a-t-il dit.
Le nouveau chef ne change pas « l’idéologie à laquelle il a contribué », a lancé Yves-François Blanchet, l’accusant d’avoir les mêmes ministres et le même caucus que son prédécesseur.