Des centaines de millions dollars pour l’anglais : Ottawa se défend

La ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor. Crédit image: Pascal Vachon

OTTAWA – Le gouvernement Trudeau défend sa décision d’envoyer des centaines de millions de dollars aux anglophones du Québec dans son Plan d’action pour les langues officielles.

Le Plan d’action annoncé mercredi matin est une feuille de route guidant le gouvernement sur cinq ans dans sa stratégie en Langues officielles. Le Plan de 2023 à 2028 injecte près de 4,1 milliards de dollars sur cinq ans. Les anglophones du Québec ont historiquement toujours reçu autour de 20 % des différents Plans d’action, ont expliqué des fonctionnaires de Patrimoine Canada lors d’un breffage technique alors que les francophones reçoivent le reste.

De ce 4,1 milliards de dollars, 1,3 milliard concerne du nouveau financement. La communauté anglophone du Québec recevra 137,5 millions de dollars supplémentaires, mais pourrait aussi toucher plus, car certaines nouvelles sommes annoncées ce mercredi peuvent être attribuées aux deux groupes linguistiques, ont expliqué les représentants de Patrimoine Canada.

La ministre Ginette Petitpas Taylor se défend d’envoyer un double message en prévoyant des millions de dollars pour les anglophones du Québec, alors qu’elle affirme que le français est la seule langue menacée au pays. Pour elle, le Plan d’action est là pour « appuyer » les minorités linguistiques, ce qui « inclut les anglophones du Québec ». Mais elle admet ne pas « ne pas avoir fait les mathématiques » pour déterminer quelle proportion reviendrait à quel groupe linguistique.

« On voulait tout simplement s’assurer qu’on allait adresser les priorités des communautés », a soutenu la députée acadienne énumérant les besoins en immigration francophone, l’aide aux organismes, la petite enfance et le postsecondaire.

La ministre avance avoir entendu les inquiétudes de la communauté anglophone lors de consultations au Québec au cours de l’été 2022. Ces appréhensions concernent l’apprentissage de l’anglais dans les écoles, les services d’aide à l’emploi dans leur langue et la vitalité du milieu anglophone au Québec.

Dans le projet de Loi C-13, qui vise à moderniser la Loi sur les langues officielles, le gouvernement s’engage à protéger et à promouvoir le français et en faire plus pour celui-ci « en raison de l’usage prédominant de l’anglais ».

« Il y a un grand questionnement par rapport à ce que le gouvernement fédéral alloue 20% aux Anglo-Québécois. La langue anglaise n’est nullement menacé au Québec et au Canada par rapport au français », a réagi le président de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB) Alexandre Cédric Doucet.

Une position « contradictoire »

Le Bloc québécois critique les montants accordés aux anglophones, estimant qu’ils devraient tous aller aux communautés francophones.

« Je ne pense pas qu’il y ait quelque somme qui soit nécessaire pour protéger les anglophones au Québec. Le fédéral ne devrait avoir aucune intervention sur le régime linguistique applicable au Québec, car c’est le français qui est un enjeu au Québec et non l’anglais », a dit le chef du Bloc Yves-François Blanchet.

« Les francophones sont ceux qui ont le plus besoin de protections » – Joël Godin

Le député conservateur Joël Godin trouve que la position du gouvernement est « contradictoire ».

« Sur quoi se sont-ils basés (avec ce 20 %) pour déterminer quels étaient les besoins de la communauté anglophone? Il est clair que les francophones sont ceux qui ont le plus besoin de protections », reproche le porte-parole en Langues officielles pour l’opposition officielle.

À Québec, le ministre des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne Jean François-Roberge a salué les mesures pour les francophones hors Québec, rapporte La Presse. Il affirme ne pas avoir trouvé de caractère asymétrique reprochant au fédéral qu’il n’ait aucune mesure pour protéger le français dans la Belle Province.

« Donc je m’attendrais à retrouver dans le plan des mesures qui viennent protéger et promouvoir le français même s’il est majoritaire », a rapporté le quotidien La Presse.