Des citoyens d’Embrun se mobilisent pour sauvegarder son histoire
EMBRUN – La borne « Voie de la liberté » offerte par la municipalité d’Embrun, en France, à son homologue de l’Est ontarien, dans le canton de Russell, pour rendre hommage aux combattants canadiens qui ont participé à la libération de la France, risquait de disparaître. Mais c’était sans compter sur la volonté de plusieurs résidents qui se sont mobilisés pour la sauvegarder.
« Après l’officialisation du jumelage avec Embrun-France en 1981, la municipalité a voulu souligner la contribution du Canada au moment de la libération de la France. Ils nous ont alors offert cette borne symbolique en 1995 », raconte Jean-Pierre Proulx, historien d’Embrun, dans l’Est ontarien, qui était le président du comité des citoyens d’Embrun en 1981.
Située dans une petite plate-bande sur le côté nord de la rue Notre-Dame à l’Ouest de la rue Blais, cette borne provient de la ligne de défense à la frontière entre la France et l’Allemagne. Elle rend hommage à la mémoire des soldats canadiens, plus particulièrement ceux originaires d’Embrun, tombés au combat lors de la Deuxième Guerre mondiale.
Mais un quart de siècle plus tard, la borne est dans un état de ruine. Elle n’a pas résisté au climat canadien, comme l’explique Gilles P. Gratton, vice-président du Club Amitié Francophone secteur Embrun, à ONFR+.
« La borne a été faite avec des matériaux non adaptés à notre climat. L’eau s’est infiltrée à l’intérieur et avec le gel en hiver, elle éclate toute en pièces. »
Par le passé, plusieurs tentatives de restauration ont été effectuées, poursuit M. Gratton.
« Elle a déjà été réparée à plusieurs reprises dans le passé par un artiste local, sauf que là, elle est dans un état irrécupérable. »
Pas prioritaire pour la municipalité
Un point de quasi-non-retour qui aurait pu être évité si la municipalité de Russell s’y était engagée, affirment les deux résidents.
« La borne souligne la fin de la guerre et le jumelage existant entre les deux Embruns. Mais la plupart de nos politiciens étaient soit trop jeunes, soit ne vivaient pas à Embrun quand cette borne a été inaugurée. Alors, ils ne réalisent pas ce que c’est », estime M. Gratton.
M. Proulx se montre indulgent.
« La municipalité n’est pas contre, seulement ce qu’on donne à une communauté, il faut le donner à une autre. En plus, la plupart de ceux qui étaient là au moment du jumelage sont morts. Par conséquent, on ne comprend pas forcément l’importance symbolique de cette borne. »
Joint par ONFR+, le maire du canton de Russell, Pierre Leroux, affirme que la municipalité ne pouvait pas intervenir.
« Honnêtement, c’était bien avant mon temps et je ne sais pas pourquoi les autres avant moi n’ont rien fait. Mais il faut aussi comprendre que le conseil municipal a ses priorités. On préfère investir dans les infrastructures. »
Questionné sur le caractère historique de la borne, le maire rétorque : « La municipalité honore ses vétérans. »
Une solution pour sauvegarder la borne
Qu’à cela ne tienne, plusieurs résidents d’Embrun ont réfléchi à des solutions. Construire une nouvelle borne identique et relocaliser l’authentique dans un espace intérieur afin qu’Embrun conserve son héritage, telle est l’idée lancée par le Club Amitié Francophone et soutenue par bon nombre de bénévoles.
« Nous allons refaire la borne en fibre de verre et en résine époxy. Les dimensions actuelles de la borne seront strictement respectées », assure M. Gratton. « J’ai construit un avion en fibre de verre dans le passé et nous étions prêts à aller dans les airs avec, car il était solide. Donc je vais utiliser la même technique de construction avec un intérieur en polystyrène pour refaire la borne. »
Dans une proposition faite à la municipalité par l’organisme, le coût estimé s’élève à 548,22 $.
« La main d’œuvre est gratuite. On va prendre de notre temps. Ce que nous voulons, c’est juste que la municipalité nous aide à financer les matériaux. La borne actuelle sera quant à elle relocalisée. Nous avons déjà une offre de la part d’un commerce pour abriter l’originale dans son édifice et la rendre accessible au public », explique M. Gratton.
Sans s’engager à payer la facture pour les matériaux, le maire se dit enthousiasmé par cette proposition.
« Je suis content que les résidents, quand ils voient qu’il y a des choses à améliorer, se portent volontaires pour travailler en partenariat avec la municipalité. Ensemble, on peut travailler pour améliorer les choses. »