Des visières imprimées en 3D et des masques artisanaux pour contrer la COVID-19
Un enseignant franco-ontarien qui veut utiliser l’impression 3D pour contrer la COVID-19, une couturière et une infirmière qui mettent aussi la main à la pâte en confectionnant des masques, toutes les solutions sont bonnes face à l’épidémie.
« Tout est juste tombé en place », raconte Éric Gauthier, l’enseignant responsable de la section de science à l’École secondaire Cité des jeunes, à Kapuskasing.
« J’avais vu en ligne que c’était possible de fabriquer des visières avec des imprimantes 3D. J’avais même acheté le vinyle pour en faire une vingtaine. Donc lorsque Jérémie Lepage – l’agent de supervision au Conseil scolaire catholique de district des Grandes Rivières – m’a demandé si c’était possible de récupérer les imprimantes de l’école pour en fabriquer, j’avais déjà les pieds dedans. »
Pour l’enseignant, il est naturel de faire ce que l’on peut pour contrer l’épidémie.
« Je suis d’avis que la situation va s’empirer au-delà de ce que les gens ont tendance à penser. C’est une situation qui fera potentiellement des milliers de morts », rappelle-t-il. « Ça s’est juste adonné que je suis le gars avec les imprimantes 3D, c’est tout. »
M. Gauthier s’est donc engagé à faire 200 visières pour l’Hôpital Sensenbrenner, à Kapuskasing. Depuis, il travaille avec Pierre Plamondon de l’hôpital pour s’assurer que les visières répondent aux exigences médicales.
« Les visières ne remplacent pas les masques ou les lunettes de sécurité », précise-t-il. « Plutôt, elles offrent une protection additionnelle lorsque combinées avec l’équipement de protection habituel. Le but, c’est de faire un produit d’assez bonne qualité pour que les professionnels de la santé, que ce soit les médecins ou les infirmières, puissent les utiliser lorsqu’ils travaillent avec des patients à risque. »
À son rythme actuel, M. Gauthier parvient à produire près d’une douzaine de visières par jour, à un coût de deux à trois dollars l’unité.
« La direction de l’école et le conseil scolaire ont tous les deux accepté de couvrir les dépenses », note-t-il.
Toutefois, pour produire plus rapidement, M. Gauthier s’est procuré une découpe vinyle à ses frais. Il tente aussi de réparer deux des imprimantes qui sont actuellement brisées.
« Au début, je les coupais à la main, mais je me suis vite aperçu que ça prenait bien du temps. Si je veux en faire 200, je serais trop lent. J’ai l’impression que ça presse plus que ça. »
Cependant, une fois qu’il aura terminé les 200 visières, il n’est pas certain de pouvoir en faire plus.
« Lorsque j’ai commandé le matériel d’Amazon, tout a été livré en trois jours », se rappelle-t-il. « Si j’en commande d’autres aujourd’hui, la date de livraison est dans un mois. Je ne suis pas certain à quel point ça sera utile à ce moment-là. »
Une couturière amateur prête main-forte
C’est en naviguant sur les médias sociaux qu’Élisabeth Peters, une Franco-Torontoise, a découvert que l’Hôpital Michael Garron dans sa région était à court de masques.
« Il y a un petit groupe Facebook pour les gens de mon quartier. Quelqu’un a publié que la Fondation Michael Garron demandait à tous les gens qui savaient coudre de faire des masques pour les patients plus à risque », se souvient-elle. « La Fondation dit avoir besoin de 1 000 masques par semaine. »
Munie de sa machine à coudre, Mme Peters s’est donc mise au boulot. Sur le site de l’hôpital, elle a trouvé les patrons pour fabriquer des masques de trois grandeurs différentes : pour les enfants, les femmes et les hommes.
« J’ai décidé d’en faire une douzaine pour chacun des groupes », raconte-t-elle. « Au départ, j’étais obligée d’expérimenter un peu. Mais maintenant, je m’assois toute une journée, je crois pouvoir en faire jusqu’à 15 avec ma machine à coudre. »
Elle a aussi envoyé l’information à ses collègues de travail, espérant en recruter quelques-uns.
« On est dans une situation un peu particulière », note-t-elle. « Si ça peut sauver des vies, je suis heureuse de le faire. »
Une infirmière passe à l’action
À Ottawa, Elizabeth Lavoie est infirmière praticienne depuis déjà plusieurs années. Lors de son parcours, elle a travaillé au centre de SRAS lors de l’épidémie de 2003, ainsi qu’en Afrique dans des cliniques de VIH et de tuberculose.
« Ce qui est vraiment stressant en ce moment, c’est qu’on n’a pas l’équipement nécessaire pour se protéger », raconte-t-elle. « En santé primaire, on n’a pas habituellement de visière. Même pour les masques, on n’arrive pas à en trouver autant qu’on aimerait. »
« Il y a des moments où je me dis que je mets à risque ma propre famille », avoue l’infirmière.
Pour combler cette lacune, Mme Lavoie s’est mise à fabriquer des visières et des masques à la main.
« Je cherchais des projets pour occuper mes enfants de 7 et 9 ans », relate-t-elle. « Nous en avons fait quatre, dimanche soir : un pour chaque personne qui travaille actuellement à la clinique. »
En guise de visière, Mme Lavoie a utilisé de vieilles feuilles d’acétate qu’elle avait à la maison.
« Elles ne sont pas neuves, donc la visibilité n’est pas à 100 %, mais c’est mieux que rien », dit-elle.
Ensuite, elle espère aussi faire des masques avec des filtres d’aspirateurs.
« J’ai trouvé un site qui dit que les filtres pour aspirateur peuvent être utilisés pour faire des masques. J’ai vérifié les miens et ils sont des filtres HEPA (un filtre à air à haute efficacité) qui captent plus de 99 % des particules de plus de 0,3 micromètre. Donc, ça correspond aux critères des masques chirurgicaux N-95. »
Mme Lavoie avertit toutefois que l’efficacité d’un tel masque n’a pas été démontrée. Elle souligne que les professionnels de la santé suivent des formations pour bien utiliser leurs masques.
« Porter un masque sans avoir la formation, ça réduit énormément leur efficacité », affirme-t-elle. « Mais c’est sûr qu’avoir une barrière physique, c’est mieux que rien. »