Eric Escaravage : « le football australien, un sport en pleine croissance au Canada »
[ENTREVUE EXPRESS]
QUI
Eric Escaravage est un joueur de football australien franco-ontarien. Il joue dans la ligue de la Colombie-Britannique avec les Eagles de Burnaby et représente le Canada au niveau international depuis 2023.
LE CONTEXTE
Après une carrière de neuf ans dans un sport qu’il qualifie de « reconversion », cet ancien gardien de but de soccer a connu le plus grand moment de sa vie de sportif en représentant le Canada l’été dernier, lors de la Coupe transatlantique, qui s’est déroulée à Toronto.
L’ENJEU
À travers cet échange, Eric Escaravage fait découvrir son sport, son parcours et l’intérêt grandissant que le football australien connaît au Canada, notamment en Ontario où aura lieu, ce samedi 21 septembre, la grande finale entre les Swans d’Ottawa et les Wildcats d’Hamilton, au College Humber à Etobicoke (14 h 30).
« Comment présenteriez-vous le football australien au grand public?
C’est un mélange de soccer, de rugby et de football américain. L’objectif est de marquer des buts entre les deux grands poteaux. C’est très dynamique. La balle bouge très vite, mais on y ajoute un élément physique comme au rugby ou au football américain. On peut distribuer la balle de deux manières, par un coup de poing ou de pied. Le tout se joue sur un terrain de cricket, avec 18 joueurs dans chaque équipe. C’est très populaire en Australie, qui a la seule ligue professionnelle au monde. Ici, au Canada, ça reste amateur.
Comment le sport est organisé au Canada?
On a plusieurs ligues à travers le pays. Dans mon cas, je joue en AFL de Colombie-Britannique. Il y a cinq équipes dans notre ligue. Je joue pour les Eagles de Burnaby. On a une équipe qui vient des États-Unis aussi, les Grizzlies de Seattle.
En Ontario, ils ont neuf équipes. C’est à vérifier, mais il me semble qu’ils ont la plus grande ligue de football australien en dehors de l’Australie. Il y a également une équipe nationale, dont je fait partie, avec des joueurs qui viennent de partout au pays. C’est un sport en croissance au Canada, surtout du côté féminin. L’équipe nationale féminine est très forte.
Comment les athlètes découvrent-ils ce sport?
En général, c’est un sport de reconversion. Les joueurs de hockey, de rugby ou de soccer trouvent ce sport un peu plus tard dans leur vie. C’est ça qui est intéressant en comparaison à ces autres sports qu’on débute très jeune. Ça vient de la curiosité d’apprendre un nouveau sport, une nouvelle mécanique. Une fois qu’on est dedans, c’est vraiment extraordinaire.
De votre côté, comment vous est venue cette passion?
J’ai travaillé pour la Coupe du monde féminine à Ottawa en 2015. Après ce contrat, je me suis retrouvé sans emploi et j’avais beaucoup de temps libre. J’avais besoin de faire quelque chose de différent. C’est finalement le meilleur ami de ma sœur qui m’a invité à un match des Swans d’Ottawa, qui est devenue ma première équipe.
À cette époque, on jouait au milieu de la piste de l’hippodrome Rideau-Carleton. C’était assez drôle. Pour rejoindre le terrain, on devait faire attention à bien surveiller la piste, car il y avait des pratiques de courses de chevaux.
En voyant le match, je me suis dit : ‘c’est génial, on peut frapper les gens’, je n’avais jamais vraiment fait de sport de contact. Je me suis dit que, comme j’étais gardien au soccer, c’était un peu la même technique pour botter dans le ballon. Cela s’est avéré être très différent. C’est comme ça que j’ai été intéressé et que j’ai été mis en contact avec le capitaine de l’équipe. J’ai débuté mon premier entraînement le jeudi et j’ai joué directement le samedi.
Comment avez-vous atterri dans la ligue en Colombie-Britannique?
J’ai déménagé ici pour un emploi, et tout naturellement je voulais continuer à jouer. Au-delà du sport en lui-même, j’avais beaucoup aimé le côté relationnel à Ottawa. On m’a mis en contact avec les Eagles de Burnaby et une semaine après mon déménagement, je faisais déjà partie de l’équipe. Ceci m’a permis d’avoir rapidement des amis, qui m’ont aidé à m’établir à Vancouver.
Comment est arrivée votre ambition de jouer avec l’équipe nationale?
En 2017, un ami a été nommé à l’équipe nationale. Quand on est jeune, on a toujours ce rêve, peu importe le sport, d’avoir cette chance un jour de représenter son pays. Quand on devient adulte, on lâche un petit peu le rêve.
Mais mon ami m’a identifié comme étant un joueur qui pouvait faire partie de l’équipe de développement de la sélection nationale. Cela faisait quelques années que j’avais commencé. J’ai eu la chance de partir avec l’équipe dans un tournoi international à Londres, et je me suis rendu compte que, si je m’entraînais plus, j’aurais des opportunités.
À ce moment-là, j’avais vraiment pour objectif d’entrer dans l’équipe A, car il y avait un grand tournoi en Australie, qui se produit tous les trois ans, qui allait se dérouler. Je me suis fixé 2020 pour y être, mais je n’ai été sélectionné, de nouveau, que comme joueur de réserve. Il y a ensuite eu la COVID et ils ont annulé le tournoi.
Quand est arrivée la consécration de jouer pour l’équipe A du Canada?
J’ai finalement joué mon premier match en 2023, contre les États-Unis. Dernièrement, nous avons fait un nouveau tournoi à Toronto qui s’appelle la Coupe transatlantique. Nous avons regroupé l’Irlande, la France, la Grande-Bretagne, les États-Unis, le Canada et la Colombie. C’était probablement la meilleure expérience de ma vie.
Peut-on imaginer voir le football australien aux Jeux olympiques de Brisbane en Australie?
Ce serait un rêve. Je ne sais pas si c’est quelque chose de possible, car l’Australie est le seul pays professionnel. Il y a un tel décalage de niveau qu’ils ne participent pas aux compétitions internationales. Je sais qu’en 1956, pour les Jeux olympiques à Melbourne, le football australien était un sport de démonstration. Mais aujourd’hui, je serai très surpris qu’il y soit. Après, peut-être du côté féminin où l’écart de niveau est un peu moins important. »