Hawkesbury, le grand pari de plus d’immigration francophone
HAWKESBURY – Et de trois pour l’Ontario. Après Sudbury et Hamilton, c’est Hawkesbury qui a obtenu, lundi, le titre de « communauté francophone accueillante » par le ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté (IRCC). Un pari intéressant puisque la ville de l’Est ontarien est la seule parmi les « élues » où les francophones sont majoritaires.
Avec environ 80 % de francophones, Hawkesbury fait figure d’exception dans la liste désormais quasi complète des « communautés francophones accueillantes ». Un document dans lequel on retrouve Whitehorse, Iqaluit, ou encore Calgary.
Concrètement, Hawkesbury se partagera avec ces 13 autres municipalités une enveloppe de 12,6 millions de dollars sur trois ans. Ce projet pilote fédéral, estimé à 1,35 million de dollars pour Hawkesbury, vise à aider des municipalités rurales hors Québec à développer des services d’accueil pour les immigrants francophones.
« Les trois villes en Ontario choisies sont très différentes », analyse le politologue de l’Université d’Ottawa, Martin Normand. « Hawkesbury est à majorité francophone, Subdury de taille moyenne avec une population francophone importante, et Hamilton, une grande ville avec une population francophone dynamique mais faible. Ça donne des pistes dans trois milieux différents. »
Et de poursuivre : « C’est possible de vivre exclusivement en français à Hawkesbury, il y a peut-être des clientèles d’immigrants qui vont trouver cela comme un grand avantage. »
Brigitte Duguay Langlais suivait justement, depuis octobre, la progression de la candidature de Hawkesbury. La municipalité était en compétition avec Cornwall. Mais pour la coordonnatrice du Réseau de soutien à l’immigration francophone de l’Est de l’Ontario, c’est avant tout cet aspect francophone qui a fait la différence.
« Tout ça a été analysé par une firme. Le plus gros pointage a été que Hawkesbury soit francophone, car quand on parle de moyens et de structures, les deux municipalités étaient probablement au même niveau. »
Et les atouts économiques seraient bien là, selon M. Normand. « C’est une ville industrielle qui a mal fait la transition. La ville mise aujourd’hui sur une industrie de services, il doit y avoir des besoins pour une main-d’œuvre qualifiée. »
Le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), Carol Jolin, abonde dans le même sens.
« Tout le milieu de la vente au détail ou encore, de la restauration, là il y a de vrais besoins au niveau de la main-d’œuvre. L’un des objectifs, c’est de permettre aux gens de connaître d’autres villes que Toronto et Ottawa. Ça permet de trouver un emploi et de dépenser moins pour se loger. L’intégration est plus facile quand tu ne verses pas 40 ou 50 % de ton salaire pour te loger. »
Hawkesbury est située seulement à quelques kilomètres de la « frontière » avec le Québec, non loin de la route Transcanadienne. Une position qui la place à égale distance entre Ottawa et Montréal. Là encore, la ruralité de cette municipalité pourrait devenir un atout.
« Les immigrants préfèrent parfois vivre dans un milieu plus rural que dans le béton », analyse Mme Duguay Langlais.
Encore des défis pour la municipalité
Et maintenant que faire avec l’enveloppe de 1,35 million de dollars? Il y a bien entendu des améliorations, admettent nos intervenants.
« Il faut prendre en charge les immigrants dès qu’ils arrivent », soutient la coordonnatrice au Réseau de soutien à l’immigration francophone de l’Est de l’Ontario. « On a besoin de comités d’accueil pour dire que la pharmacie est là, que l’épicerie est là. »
Outre ces premiers pas, il faudrait « un travail de sensibilisation des deux côtés », poursuit-elle. « Ce n’est pas juste pour de l’emploi que tu restes à Hawkesbury. Il faut que les gens soient appelés à être dans les Richelieu, les clubs Optimiste ou pourquoi pas, siéger sur le conseil d’administration de l’ACFO Prescott Russell. L’immigrant francophone, qu’il vienne de France ou Haïti, doit se sentir chez lui dans la communauté francophone. »
D’après les chiffres de Statistique Canada, quelque 3,2 % de la population présente à Hawkesbury aurait immigré au Canada. Dans ce lot, on retrouve la moitié d’Européens, même si la première langue n’est pas spécifiée.
L’AFO aurait souhaité mieux
Si « deux communautés francophones accueillantes » doivent être encore dévoilées, il y a fort à parier que le nombre s’arrêtera à trois pour l’Ontario. « Sudbury, Hamilton et Hawkesbury représentent chacune l’un des trois réseaux d’immigration francophone dans la province », estime M. Jolin.
À savoir si le président de l’AFO aurait souhaité mieux que trois communautés, la réponse est limpide. « Personnellement oui, j’aurais aimé plus de villes nommées en Ontario. »