Keith Spicer, le premier commissaire aux langues officielles, est décédé

Keith Spicer aura aura été le tout premier commissaire aux langues officielles du Canada de 1970 à 1977. Archives ONFR+

Le tout premier commissaire aux langues officielles de l’appareil fédéral, Keith Spicer, est mort jeudi matin à l’âge de 89 ans.

Son fils, Nick Spicer, a confirmé la nouvelle à La Presse canadienne. Son mandat en tant que chien de garde des langues officielles aura duré sept ans (1970-1977), alors nommé par Pierre Elliott Trudeau. Son début de règne faisait suite à l’entrée en vigueur de la Loi sur les langues officielles (LLO) en 1969.

« J’ai toujours cru que le mandat d’un commissaire, ce n’était pas juridique. Donc je me suis dit, mon rôle est de transformer le débat national, de passer de l’hystérie à un dialogue raisonnable », affirmait-il en entrevue avec ONFR+ en 2019, en l’honneur du cinquantième anniversaire de la LLO.

Cela arrive quelques années après la mise en place de la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, la Commission Laurendeau-Dunton, qui recommande de mettre sur place une loi reconnaissant les deux langues officielles. Keith Spicer avait lui-même travaillé comme recherchiste pour la Commission.

À cette époque, il existe une fracture entre les francophones et les anglophones au pays, notamment avec la montée du souverainisme au Québec. Keith Spicer se donnait alors comme mission d’allier les gens « à au moins tolérer la loi ».

« Les Québécois, les francophones et les Acadiens, en général, ils étaient très sceptiques sinon cyniques, alors je leur ai dit, ‘’vous avez bien raison de rester cyniques et sceptiques’’. Du côté anglophone, ‘’je comprends votre frustration, je viens d’une famille anglophone’’… En utilisant l’humour adopté aux deux Canadas, anglophone et francophone, on a réussi sur plusieurs années à décrisper l’ambiance », se rappelait-il.

Keith Spicer. Gracieuseté du Commissariat aux langues officielles.

Réactions

Le premier ministre Justin Trudeau a salué sa mobilisation « dans le soutien du public canadien à l’égard de la Loi sur les langues officielles » et « sa défense des droits des minorités francophones partout au Canada ».

« Ses décennies de travail acharné ont contribué à façonner le paysage linguistique du Canada tel que nous le connaissons. C’est un flambeau que nous continuons à brandir haut en cherchant à établir l’égalité réelle du français et de l’anglais au Canada. »

L’actuel commissaire, Raymond Théberge a tenu « à offrir nos plus sincères condoléances à la famille et aux amis de Keith Spicer » au nom du commissariat.

« À travers mon regard de jeune franco-manitobain, Keith Spicer représentait la vraie incarnation de la Loi sur les langues officielles. Il était une vedette, mais surtout, ma vedette. Sa vision du bilinguisme et de l’ouverture aux autres m’interpelle tout particulièrement », a-t-il souligné.

La Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada a salué le départ d’un « homme qui a fait beaucoup pour la promotion de la dualité linguistique canadienne ».

CRTC et Commission Spicer

Keith Spicer a notamment aidé à la création de l’organisme Canadian Parents for French en 1977, organisation qui milite pour l’immersion en français dans les écoles hors Québec.

De 1989 à 1996, Keith Spicer a été le président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). À la suite de l’échec de l’Accord du lac Meech en 1990, il prend une pause de son poste pour présider le Forum Citoyen sur l’Unité Nationale, renommé Commission Spicer, à la demande du premier ministre Brian Mulroney.

Il a aussi été rédacteur en chef du Ottawa Citizen, lui qui faisait aussi des apparitions comme commentateur dans des émissions télévisées francophones, comme au Québec. Keith Spicer a également été professeur à l’Université d’Ottawa en plus de recevoir un doctorat honorifique de cet établissement ainsi que d’autres comme La Laurentienne et le Collège Glendon. Il déménage à Paris à la fin des années 1990, avant de revenir au Canada dans les dernières années.