La réprimande de Jack MacLaren
[ANALYSE]
Le progressiste-conservateur Jack MacLaren s’est fait prendre à afficher sur son site Internet de faux témoignages d’appréciation de ses commettants. Il a manqué de jugement. Et son chef Patrick Brown l’a réprimandé en lui retirant la responsabilité des dossiers de sa région de l’Est ontarien au sein du caucus du parti.
FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault
Le député provincial de Carleton–Mississippi-Mills s’en est tout de même tiré à bon compte.
Certes, ce n’était pas la gaffe du siècle.
Mais au lieu de désamorcer l’affaire, M. MacLaren l’a survoltée. Il a d’abord fait croire qu’il cherchait à « protéger la vie privée des gens qui donnent une rétroaction positive à (son) bureau ». Personne ne l’a cru. Puis, il s’est planqué pendant une heure derrière les portes de la Législature dans l’espoir d’échapper aux médias, pour finalement s’excuser à la sauvette.
M. Brown n’avait plus le choix. Il devait rappeler à l’ordre son député. Et encore, il y a été mollo.
Car il s’agit bien du même Jack MacLaren qui a dû, une semaine plus tôt, présenter des excuses à son homologue fédérale, la libérale Karen McCrimmon, après lui avoir adressé une « blague » jugée sexiste lors d’une soirée de reconnaissance à laquelle les deux politiciens ont participé dans leur circonscription.
Il s’agit du même élu de l’ouest rural d’Ottawa qui sème la discorde depuis des mois au sein du Parti PC parce qu’il cherche à déloger certains de ses collègues, dont Lisa MacLeod, pour les remplacer par des candidats d’une droite libertarienne à son image.
C’est un air connu. C’est comme ça que M. MacLaren s’est lui-même fait élire à Queen’s Park en 2011. Il a rempli la salle lors d’une assemblée d’investiture et il a éjecté l’ancien député progressiste-conservateur de sa circonscription, Norm Sterling, qu’il jugeait trop centriste, pour ensuite prendre sa place.
Dette de gratitude
Le chef du Parti PC sait très bien à qui il a affaire. Et il aurait dû agir dès les premiers dérapages de son député. Mais il n’a pas osé le faire.
Le problème, c’est que M. Brown a une grande dette de gratitude envers M. MacLaren. Il a été le premier député du parti à soutenir sa candidature à la chefferie. Il lui a amené une bonne part du vote rural de l’Est ontarien, alors que les autres élus de la région tanguaient vers sa rivale Christine Elliott.
M. MacLaren a misé sur le politicien qu’il croyait capable de porter bien haut l’agenda libertarien qu’il défend depuis l’époque où il militait avec l’Ontario Landowners Association. Sauf qu’une fois devenu chef, M. Brown s’est mis à viser le centre de l’échiquier politique où il a le plus de chances de ravir le pouvoir aux libéraux dans deux ans. Ses efforts commencent à peine à porter leurs fruits.
Sous ses airs de bon soldat, l’élu de Carleton–Mississippi-Mills a toujours continué perfidement à tirer le parti vers la droite. Passe encore. Mais là, ses erreurs de jugement ont rendu la situation intenable.
Jack MacLaren doit rentrer dans le rang ou il doit partir.
Pour l’instant, Patrick Brown tente de ménager la chèvre et le chou. Il devra éventuellement faire son choix. Ce sera peut-être là, le plus grand test de son leadership.
Cette analyse est publiée également dans le quotidien LeDroit du 16 avril.