Loi sur les langues officielles : même des députés libéraux poussent le gouvernement à agir plus vite
OTTAWA – Les partis de l’opposition et des élus libéraux trouvent que le gouvernement Carney ne va pas assez vite pour mettre la Loi sur les langues officielles pleinement en vigueur, un peu plus de deux ans après sa refonte.
Les députés des trois principaux partis à Ottawa au Comité des langues officielles ont adopté une motion jeudi, réclamant que le gouvernement accélère le pas. Cette motion du député du Bloc Québécois Mario Beaulieu édicte que le comité demande à ce que « la mise en œuvre des règlements de la nouvelle Loi sur les langues officielles se produise le plus rapidement possible ».
Le libellé demande aussi la concrétisation de « la nouvelle approche asymétrique de la Loi sur les langues officielles en faveur du français au Québec ».
À l’heure actuelle, des portions de la Loi sur les langues officielles ne sont pas en vigueur, car elles attendent d’être adoptées via une prise de règlements, une tâche que le gouvernement, voulait au départ accomplir d’ici décembre 2024.
Près d’un an plus tard, le processus, qui a notamment inclus des consultations auprès des acteurs de la francophonie canadienne, est toujours en cours. La Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) s’est impatientée dans les dernières semaines, pressant le gouvernement à aller plus vite. Idem pour le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge.
Plusieurs pouvoirs que ce dernier a obtenus lors de la modernisation de la Loi sur les langues officielles en 2023, comme le fait d’émettre des ordonnances ou des sanctions administratives pécuniaires, ne sont pas en vigueur à l’heure actuelle.
« C’est l’un des éléments qui nous empêchent de vraiment aller de l’avant en ce moment. Nous utilisons les pouvoirs dont nous disposons en attendant », affirmait Raymond Théberge aux sénateurs du Comité permanent Langues officielles le 6 octobre dernier.
Parmi les autres sections de la législation qui sont toujours en attente, on en compte une touchant les clauses linguistiques dans les ententes avec les provinces. Il y a aussi toute une section (la partie VII) qui porte sur la prise de mesures positives touchant les minorités linguistiques, une portion jugée essentielle par les experts en droits linguistiques pour favoriser l’épanouissement des communautés francophones.
« Tant et aussi longtemps que ce règlement n’est pas en vigueur, cela a un impact sur la mise en œuvre de la loi et, par le fait même, sur le développement des communautés », argumentait Raymond Théberge sur cette section de la Loi sur les langues officielles.

« Ils se servent peut-être de nous pour passer un message, avance le député conservateur Joël Godin au sujet des députés libéraux qui ont appuyé la motion. Je ne connais pas leurs intentions, mais c’est une aberration. La sanction royale était en 2023 et il n’y a toujours pas de règlement. On étire la sauce », déplore le critique en Langues officielles pour son parti.
« Ç’a déjà été promis plusieurs fois. On nous a parlé du mois de novembre, si c’est vrai, c’est parfait, mais on veut s’en assurer, explique l’élu bloquiste Mario Beaulieu. Dans la Loi, on a reconnu que le français est en déclin partout au Canada et en situation minoritaire et j’ose espérer qu’avec la mise en œuvre, il y a quelque chose qui va changer », poursuit-il.
Une question de semaines, dit Guilbeault
« Ça s’en vient, et je vous dirais qu’on va certainement avoir deux des trois règlements dans les prochaines semaines », a assuré le ministre des Langues officielles Steven Guilbeault mercredi avant une réunion du caucus libéral.
Lundi au Sénat, des fonctionnaires fédéraux sont restés avares sur les développements de ces règlements, mais ont assuré qu’il ne s’agissait pas d’un retard.
« Le règlement prend un certain temps à être élaboré et les consultations doivent être complétées, ce que nous avons fait. On est bien dans les eaux régulières, ce à quoi on pourrait s’attendre pour un règlement », a dit Carsten Quell, le directeur exécutif du Centre d’excellence en langues officielles au Conseil du Trésor.
« Nous avons élaboré un règlement sur la partie quatre (de la Loi sur les langues officielles) en 2019, et ça a pris trois ans avant que ça soit adopté », énonce M. Quell à titre d’exemple.
La modernisation de la Loi sur les langues officielles a été adoptée en juin 2023 avec une quasi-unanimité au Parlement.