La vague Omicron peut-elle provoquer un retour anticipé à Queen’s Park?

La cheffe néo-démocrate Andrea Horwath, le premier ministre Doug Ford et le chef libéral Steven Del Duca. Montage ONFR+

TORONTO – À six jours de la réouverture des écoles et alors que le nombre d’hospitalisations continue de grimper, le variant Omicron sème le trouble sur la scène politique provinciale. Les partis d’opposition demandent un retour immédiat en chambre pour replacer la gestion de crise au cœur du processus démocratique, une piste écartée pour l’heure par le gouvernement Ford qui enchaîne les annonces ministérielles.

La réouverture des écoles aura bien lieu le 17 janvier. Le ministre de l’Éducation, Stephen Lecce, doit en dessiner les contours au cours d’une conférence de presse, qui se tiendra mercredi.

De son côté la ministre de la Santé, Christine Elliott, a fait le point plus tôt ce mardi pour annoncer le déploiement d’infirmières formées à l’étranger dans les hôpitaux ontariens. Elle a assuré que le report de la rentrée avait entretemps permis d’accroître la vaccination des enseignants, l’inspection des écoles et de recevoir plus de masques (3,5 millions de masques N95 au cours des 24 dernières heures).

La situation demeure toutefois très électrique. L’opposition exige plus de garanties de nature à sécuriser le retour des élèves en classe. Dans une sortie médiatique ce mardi, le chef du Parti libéral, Steven Del Duca, a exhorté le premier ministre à « sortir de sa cachette » en faisant preuve de transparence sur le stock et l’accès aux masques N95, mais aussi en abrégeant la trêve parlementaire.

La cheffe du Nouveau Parti démocratique, Andrea Horwath, a également exigé une nouvelle fois, ce mardi, le retour des députés à Queen’s Park pour débattre de la stratégie sanitaire face au variant Omicron et ses conséquences, notamment dans les hôpitaux qui font face à une hausse constante des hospitalisations. 3 220 Ontariens sont actuellement pris en charge dans un hôpital, dont 477 en soins intensifs.

Elle a aussi exigé plus de sécurité dans les écoles. « Je veux absolument un retour à l’école, mais un retour sécuritaire avec des parents qui ont les outils et l’information dont ils ont besoin », a-t-elle réagi.

La ministre de la Santé Christine Elliott. Archives ONFR+

Mais le gouvernement a-t-il vraiment intérêt à précipiter ce retour en chambre, fixé au 22 février? Absolument pas, estime Peter Graefe, politologue à l’Université McMaster. « Le gouvernement a sans doute planifié au jour près comment se déroulera cette session parlementaire en préparation des élections du printemps. Et il n’a aucun intérêt d’ici là à précipiter les périodes de questions en chambre et à donner plus de place à l’opposition dans la conversation publique. »

Derrière cette velléité de l’opposition à revenir en chambre, une idée fixe est partagée par les néo-démocrates comme par les libéraux : le retrait du projet de loi 124 qui plafonne les salaires de la fonction publique à 1%, une mesure qui creuserait le déficit de ressources humaines du système de santé à un moment où il n’en a jamais eu autant besoin.

Amanda Simard : « On est prêt à revenir le plus tôt possible »

« On est dans une crise inédite avec une vague de contaminations sans précédent », campe le néo-démocrate Guy Bourgouin. « Qu’est-ce qu’on attend pour revenir en chambre? La seule explication est que le gouvernement ne veut pas répondre à nos questions. Il ne veut pas rendre des comptes sur sa gestion catastrophique de cette crise. »

Et de poursuivre : « La priorité en chambre est de rétablir le système de santé. Il faut supprimer le projet de loi 124 et donner des primes de risque pour les travailleurs de la santé pour que les départs anticipés dans le secteur de la santé cessent. On les appelle des héros et à côté on leur octroie une hausse leurs salaires de seulement 1 %. Si vous voulez attirer des travailleurs dans un secteur, il faut commencer par traiter avec respect les employés qui y travaillent déjà. »

La libérale Amanda Simard déplore cette « sourde oreille » des progressistes-conservateurs. « Nous, députés, on est prêt à revenir le plus tôt possible pour aider à la gestion de crise, surtout pour annuler la Loi 124 mais aussi pour que M. Ford demande l’assistance de l’armée canadienne, parce que ça devient urgent. »

La députée Amanda Simard. Archives ONFR+

À cinq mois des élections, la meilleure stratégie pour la majorité politique reste au contraire de s’en tenir au calendrier de retour en chambre initial, selon M. Graefe, mais le politologue de Hamilton estime que, « même si la plupart des Ontariens ont déjà fait leur opinion sur la qualité de la gestion de la pandémie, l’irruption de la vague Omicron bouscule un gouvernement qui pensait être au-dessus de la crise en misant trop tôt sur la reprise économique ».

« On sent qu’il n’y a plus ce même vent d’optimisme qu’on observait à l’automne », observe-t-il, et « le gouvernement va devoir changer sa manière d’approcher les prochaines élections provinciales, d’autant que cela peut entraîner certaines insatisfactions au sein de la population le plus indécise ou tiraillée ».

Avec la collaboration de Soufiane Chakkouche.