Le canton d’Alfred et Plantagenet fête ses 25 ans
ALFRED ET PLANTAGENET – En 1997, le Canton de Plantagenet Nord, la Ville de Plantagenet, le Canton d’Alfred et le village d’Alfred ont fusionné pour ne faire qu’un. Entre Ottawa et Montréal, ce canton francophone jusqu’au bout des doigts conserve une histoire unique qui réunit sous le même étendard les huit villages que constitue ce lieu de verdure.
Il y a 25 ans, sous l’ère austère du gouvernement Harris et la « Révolution du bon sens », l’Ontario vivait une vague de grandes fusions municipales.
C’est dans ce contexte de récession que le canton d’Alfred et ses municipalités (Alfred station, Blue Corners, Centrefield, Coin Gratton), le canton de Plantagnet et ses municipalités (Plantagenet station, Rockdale, Senecal, The Rollway), ainsi que les villages de Curran et ses lieux dits de Glenburn et Jessups Falls, le village de Lefaivre, de Pendleton, Treadwell, Wendover et de Westminster sont devenus une seule et unique municipalité.
La volonté du gouvernement progressiste-conservateur de l’époque de réduire la taille et les coûts des administrations aura une forte résonance négative. Le gouvernement Harris est aujourd’hui considéré comme l’un des plus controversés de l’histoire de la province « pour avoir imposé agressivement son conservatisme fiscal », indique l’Encyclopédie canadienne.
En 2015, l’Institut Fraser, dans un rapport, déterminera que les fusions municipales n’ont apporté aucun bénéfice financier. Finalement, on reprochera à ce système d’avoir été inadapté aux besoins des citoyens et d’avoir créé des structures trop grosses et trop lourdes.
25 ans après, le canton d’Alfred et Plantagenet se porte bien et connaît même une belle croissance résidentielle. Le village d’Alfred est toujours considéré comme la capitale de la patate frite au Canada et l’ancien maire Stéphane Sarrazin est aujourd’hui député à l’Assemblée législative de l’Ontario.
Une démographie en plein essor
Yann Leduc du groupe de musique franco-ontarien Les Rats d’Swompe est originaire la ville de Plantagenet et a vécu à Alfred.
« C’est une région où la famille et les amis sont des valeurs importantes », explique-t-il. « C’est quelque chose que je garde avec moi et qui me vient de là où j’ai grandi. »
Le canton d’Alfred et Plantagenet semble être un havre de paix à entendre ce que dit le musicien. « La tranquillité de ce coin me plaît énormément et mes amis des Rats d’Swompe ne sont pas très loin. »
Il dira d’ailleurs que les localités du canton sont toutes aussi accueillantes.
Jean Poirier, habitant d’Alfred, ancien député et ancien vice-président de l’Assemblée législative de l’Ontario, se dit dévoué à son petit coin de paradis.
Il se rappelle qu’« autrefois il y avait dix-huit municipalités dans Prescott-Russell. À l’époque, j’aurais préféré une seule municipalité régionale de Prescott-Russell, ce qui aurait pu enterrer les conflits inter-municipalités. »
« J’avais même proposé que la municipalité s’appelle Larose, en hommage à Ferdinand Larose, un agronome qui est à l’origine de la création de la forêt Larose. »
« Le canton est la prochaine banlieue d’Ottawa », anticipe le résident d’Alfred, témoin d’une « explosion de lotissements ici » au cours des dernières années.
Selon M. Poirier, il y a encore des défis comme la question de la culture, du développement économique ou de l’environnement, qui sont des dossiers peu affirmés. « Dans les derniers 25 ans, nous avons été témoins du déclin du couvert forestier et des terres agricoles dans le canton. »
Après 45 années dans le village d’Alfred, M. Poirier affirme que son attachement à la région est sans égal : « Partout où je vais, je me sens chez moi, je connais tout le monde. »
Une majorité de francophones qui perdure
D’après Yan Leduc, « la jeunesse du canton est très francophone et très ouverte d’esprit ».
« Pour le moment, je n’ai pas peur de perdre le français. D’ailleurs cette peur ne nous habite pas vraiment ici », pense-t-il. « Je vois le canton parler français encore longtemps. »
Une affirmation qui rappelle que le français dans le canton n’est pas chose nouvelle. De nombreuses familles canadiennes-françaises s’installèrent dans la région, a priori à la recherche de terres pour l’agriculture dans le début des années 1800. En 1871, la paroisse Saint-Victor est construite dans le canton d’Alfred. En 2021, toujours debout, elle a fêté ses 150 ans.
Dès les premières années de la colonisation. En 1871, plus de la moitié de la population d’Alfred et Plantagenet était francophone. Aujourd’hui, cela n’a pas changé.
Dans les Comtés unis de Prescott et Russell, le canton d’Alfred et Plantagenet est d’ailleurs un des endroits les plus francophones de la région. D’après le dernier recensement de Statistique Canada, 73 % des habitants ont pour langue maternelle le français.
Bien avant la fusion des municipalités
C’est autour de 1800 que le village d’Alfred est sorti de terre, mais ce n’est qu’en 1942, que le village fut nommé Alfred, en hommage au neuvième fils du roi d’Angleterre, George III. Pour Plantagenet, la référence est ici très évidente. C’est en effet le nom donné à la dynastie des Plantagenêt des royaumes de France et du Royaume-Uni.
Le canton d’Alfred et Plantagenet connaît une certaine réputation grâce à l’homme politique Alfred Évanturel, qui demeure, à ce jour, le seul francophone à avoir occupé la fonction de président de l’Assemblée législative de l’Ontario, à Queen’s Park (1897-1902). Il a été également député provincial libéral de l’Ontario de 1886 à 1905.
La fin du 19e siècle était vraisemblablement une période d’essor pour l’identité francophone de l’Est ontarien.