Le déficit de l’Ontario fond… grâce aux profits de l’« hydro »
TORONTO – Le déficit de l’Ontario pour l’exercice financier 2015-2016 serait maintenant de l’ordre de 7,5 milliards $, soit 1 milliard $ en-deçà des projections du gouvernement provincial dans son plus récent budget. À condition d’inclure dans le calcul, une partie des profits de la vente de la société de distribution et de transmission d’électricité Hydro One.
FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault
Le hic, c’est que les libéraux de Kathleen Wynne ont toujours promis qu’ils placeraient l’argent de la privatisation d’Hydro One dans un compte à part pour l’infrastructure, connu sous le nom de Fonds Trillium (FT), et non dans les revenus généraux.
Les profits de la vente d’une première tranche d’actions de l’ancien distributeur public d’électricité de l’Ontario ne devaient donc pas, théoriquement, être pris en compte dans le calcul du déficit annuel de la province.
« Les règles de la comptabilité nous obligent à divulguer ainsi nos revenus non fiscaux. Mais nous dirigeons tous les revenus (de la vente d’Hydro One) dans un fonds spécial », s’est défendu le trésorier Charles Sousa lors d’une mise à jour économique à Queen’s Park, jeudi 26 novembre. « Soyons clairs. Nous ne nous fions pas à (la vente de) ces biens publics pour renouer avec l’équilibre budgétaire. Nous réinvestissons ces fonds dans notre économie. »
Les libéraux de l’Ontario prévoient maintenant un déficit de 4,5 milliards $ au lieu de 4,8 milliards $ l’an prochain, et toujours un retour à l’équilibre budgétaire au cours de l’exercice 2017-2018.
« La valeur (des actions) d’Hydro One a dépassé les attentes de la province. C’est une introduction en bourse extraordinaire qui a généré de grands gains de capitaux que nous pourrons réinvestir dans le FT », a déclaré M. Sousa. « Chaque dollar gagné sera dédié au FT et ira dans l’infrastructure », a-t-il réitéré.
Remplir les coffres
L’opposition à Queen’s Park croit, au contraire, que le gouvernement se sert des profits de la vente partielle d’Hydro One pour remplir ses coffres et atteindre le déficit zéro d’ici 2018 comme il l’a promis.
« Ce qui est malheureux, c’est que demain, quand nous soustrairons (les profits de la vente d’Hydro One) des revenus généraux, nous aurons un plus gros déficit », a fustigé le progressiste-conservateur Victor Fedeli. « Cette réduction du déficit est artificielle. On ne peut pas dépenser deux fois la même somme d’argent. Mais c’est ce que les libéraux essaient de nous faire croire. »
L’élu de la région de North Bay estime que le déficit de l’Ontario s’élève réellement à 9,5 milliards $ et qu’il aurait donc rebondi d’environ 1 milliard $ par rapport aux dernières projections budgétaires. Le gouvernement aurait pigé dans ses réserves pour combler l’écart temporairement, selon lui.
« Les libéraux utilisent la vente d’Hydro One pour masquer le fait que leur plan économique ne fonctionne pas », a dénoncé à son tour la néo-démocrate Catherine Fife. « Le FT n’est pas un pot d’argent dans lequel se retrouvent les profits d’Hydro One. Tout l’argent se retrouve dans les revenus généraux. Et la loi est claire. La ministre a une grande marge de manœuvre. Il peut faire ce qu’il veut avec cet argent. »
Selon la députée de Kitchener-Waterloo, la privatisation d’Hydro One ne serait par ailleurs « qu’un premier pas » vers d’autres ventes de biens publics pour équilibrer le budget provincial.
Les libéraux au pouvoir à Queen’s Park veulent se départir au final de 60% des actions d’Hydro One pour réinvestir jusqu’à 4 milliards $ dans l’infrastructure provinciale, dans le cadre d’un plan global de 130 milliards $ sur dix ans. La vente d’une première tranche de 16% de l’entreprise aurait déjà dégagé des profits de 1,83 milliard $.