Le fédéral invité à aider les étudiants francophones en sciences infirmières
OTTAWA – Des élus fédéraux demandent au gouvernement d’aider à traduire et adapter les ressources pédagogiques en français pour l’examen d’accréditation en français que doivent passer les étudiants en sciences infirmières. Depuis la mise en place de ce nouveau test américain au Canada, les résultats des francophones ont drastiquement chuté à travers le pays.
Dans son rapport intitulé Enjeux relatifs à la formation en français dans le domaine des sciences infirmières, les membres du comité permanent des langues officielles proposent des pistes de solution au gouvernement fédéral pour régler les problèmes observés avec le National Council Licensure Examination (NCLEX-RN).
Les députés fédéraux demandent que le Bureau de la traduction traduise et adapte le matériel préparatoire de l’examen NCLEX-RN en français.
« On nous dit que le test est correct et que ce qui manque c’est de la formation et des documents pour que les étudiants puissent apprendre. Il manque de documents préparatoires suffisants », explique le président du comité, Denis Paradis.
Ils recommandent également que des fonds supplémentaires soient octroyés au Consortium national de santé en français afin de développer de nouveaux outils pour améliorer le taux de réussite des étudiants à l’examen en français.
« Nous sommes vraiment contents des recommandations qui sont proposées. C’est un bon début, il faudra juste s’assurer qu’elles auront un impact pour corriger la situation. Il est anormal que les étudiants francophones soient pénalisés », commente pour #ONfr, la directrice du bilinguisme et de la traduction de l’Association des étudiant(e)s infirmier(ère)s du Canada (AEIC), Ashley Pelletier-Simard.
Bien que la réglementation des soins infirmiers relève des compétences provinciales et territoriales, les membres du comité se disent très interpellés par cette question qui fait l’objet d’un recours devant les tribunaux au Nouveau-Brunswick, où la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick et la Fédération des étudiantes et étudiants du Centre universitaire de Moncton poursuivent l’Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick (AIINB).
Préjudice pour les francophones
Instauré en 2015 par les organismes de réglementation provinciaux et territoriaux de la profession infirmière à l’exception du Québec, l’examen NCLEX-RN constitue la dernière étape obligatoire pour les étudiants en sciences infirmières afin d’accéder au marché du travail.
Depuis sa mise en place, les résultats des étudiants francophones ont chuté de manière spectaculaire à travers le pays. En cause : des problèmes de traduction du test – qui auraient été réglés depuis, selon l’ancienne commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Katherine d’Entremont – et surtout un manque de ressources pédagogiques disponibles en français, selon les intervenants. Une situation qui pousse plusieurs étudiants francophones à se tourner vers les études en anglais.
« La décision d’instaurer le NCLEX-RN cause un important préjudice aux infirmières et infirmiers francophones en situation minoritaire » – extrait du rapport du comité
Actuellement en dernière année, Mme Pelletier-Simard a d’ailleurs choisi de poursuivre ses études en anglais, à la Dalhousie University, à Halifax.
« Je voulais me donner les meilleures chances, parce que je suis bilingue. Mais ce n’est pas tous les francophones qui sont à l’aise de suivre leurs cours et de passer leur examen en anglais », explique-t-elle.
En Ontario, sur 117 inscrits pour une première tentative à l’examen d’accréditation en 2017, 15 étudiants ont tenté leur chance en français et seulement 33,3 % l’ont réussi, contre 75,5 % pour les étudiants qui ont fait leur première tentative en anglais. Avant l’entrée en vigueur du test NCLEX-RN, le taux de réussite à l’examen en français dépassait les 70 %, à l’Université d’Ottawa, selon une intervenante. Au Nouveau-Brunswick, il est passé de 91 % en 2014, à 40 % en 2017.
Le Comité dit « espérer que les étudiants et étudiantes en sciences infirmières partout au pays persévéreront dans leur choix de faire leur formation en français ».
À noter qu’un comité pancanadien, travaille actuellement à proposer, d’ici 2020, un examen bilingue pour remplacer le NCLEX-RN, mais il devra recevoir l’approbation des organismes de réglementation. Au niveau fédéral, les élus ne veulent pas s’immiscer.
« L’examen vient des Ordres professionnels qui dépendent des provinces, c’est donc toujours la sacro-sainte division des juridictions entre le fédéral et le provincial. On ne se prononce pas sur cet examen, mais ça peut être une piste de solution. Personnellement, je peux l’appuyer. Il faut juste regarder. Mais je pense qu’on peut résoudre les problèmes en appuyant avec le matériel préparatoire pour les francophones », précise le député libéral acadien René Arseneault
Des clauses linguistiques dans les ententes en santé
Par ailleurs, dans son rapport, le comité insiste sur l’importance de recueillir des données probantes sur la santé des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Les élus souhaitent également que les ententes en matière de santé entre le fédéral et les provinces comportent des clauses linguistiques contraignantes pour répondre aux besoins de ces communautés. Ils demandent également que des solutions soient trouvées à l’offre active des services de santé dans les deux langues officielles et pour rappeler aux ordres professionnels du milieu de la santé les besoins des communautés en termes d’accès à des professionnels de la santé, notamment des infirmières et infirmiers capables d’offrir des services dans la langue de la minorité.