« Le féminisme, ce n’est pas un mot, ce sont des actions! »

La présidente de l'Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC), Blandine Ngo Tona (à droite). Benjamin Vachet

OTTAWA – L’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC) espère profiter des déclarations de bonnes intentions du premier ministre Justin Trudeau et de son gouvernement libéral pour faire entendre la voix particulière des femmes francophones en milieu minoritaire.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Depuis son élection, le premier ministre Justin Trudeau a répété à plusieurs reprises sa sensibilité aux enjeux qui touchent les femmes, établissant la parité au sein de son gouvernement, puis se déclarant « fier féministe » à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes.

Son message est accueilli avec intérêt par l’AFFC qui souhaite qu’il se traduise par des actions concrètes.

« Le féminisme, ce n’est pas un mot, ce sont des actions! Et cela ne doit pas se limiter pas à faire un cabinet paritaire, même si c’est un plus. Nous voulons travailler avec le gouvernement pour faire connaître la réalité et les besoins des femmes francophones en milieu minoritaire. Dans bien des domaines, les femmes n’ont pas accès à des services en français », indique la présidente de l’AFFC, Blandine Ngo Tona, en marge de l’assemblée générale annuelle de l’organisme qui se tenait vendredi 23 septembre, à Gatineau.

Mme Ngo Tona note une « ouverture et un écho positif sans précédent » à Ottawa qui a notamment permis à l’AFFC de rencontrer la ministre de la Condition féminine, Patty Hajdu, le secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Randy Boissonnault, la nouvelle leader du gouvernement à la Chambre des communes, Bardish Chagger et plusieurs autres élus, y compris dans les rangs de l’opposition, comme le porte-parole aux langues officielles pour le Nouveau Parti démocratique (NPD), François Choquette.

« Une telle main tendue, c’est magnifique! Où est-ce que ça va mener? Nous prenons ça comme une première étape. Notre principale priorité sera de veiller à ce que les promesses qui ont été faites soient tenues. On espère que le féminisme a le même sens pour M. Trudeau que pour les femmes francophones en milieu minoritaire », sourit Mme Ngo Tona

L’AFFC s’attend notamment à ce que des mesures soient prises pour encourager la transmission de la langue dans les couples exogames, notamment par le biais de programmes comme FrancoZone, mais aussi pour lutter contre la violence faite aux femmes ou encore, pour développer des services de garde.

« Ce sont des réalités qui touchent toutes les femmes, mais en milieu minoritaire, c’est encore plus difficile. Nos enjeux et nos besoins vont au-delà de Condition féminine, ils touchent de nombreux ministères et domaines, comme la santé, l’éducation, la culture… »

Finance stable et nouvelle vision

Après avoir traversé des années difficiles, notamment à cause d’un manque de visibilité, d’une instabilité au niveau de ses ressources humaines et d’une situation financière précaire, l’organisme a profité de la dernière année pour revoir son mandat et ses priorités.

Vouée à la sensibilisation ainsi qu’à la promotion du rôle et de la contribution de la femme francophone et acadienne, l’AFFC se fixe trois objectifs : la représentativité publique, la représentativité politique et le renforcement de son réseau de 12 organismes de femmes à travers la francophonie en contexte minoritaire.

« Nous nous sommes interrogés sur la pertinence de notre organisme et sur sa vision. Nous avons beaucoup consulté et aujourd’hui, nous avons la confirmation de l’importance de notre mandat de représenter les femmes francophones en milieu minoritaire qui pendant des années ont été invisibles et dont les besoins spécifiques n’ont pas été reconnus. »

L’AFFC souhaite donc sensibiliser le gouvernement libéral à cette question, mais également les gouvernements des provinces et des territoires pour qu’ils pensent aux femmes francophones quand ils mettent en place des programmes.

« On veut leur faire comprendre que même si on ne compte pas par le nombre, on compte comme communauté de langue officielle. Il faut que quand il y a un nouveau programme qui est mis en place ou qu’une décision est prise, les gouvernements aient le réflexe de penser à l’impact que cela pourrait avoir sur les femmes francophones et qu’ils les consultent. Il faut nous demander ce dont on a besoin et non prendre les décisions à notre place! »

Bien que membre de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, l’AFFC juge qu’il est important qu’elle défende ses propres dossiers.

« Nous voulons en parler nous-mêmes et avoir une influence directe sur les décideurs politiques. »

Bourse menacée

Malgré des nouvelles financières encourageantes pour l’organisme qui a dégagé un léger surplus, le portrait n’est pas idyllique sur tous les points. La fondation ACCÉD qui remet deux bourses en éducation pour les femmes francophones est menacée de disparition.

« Nous nous donnons un an pour voir si nous pouvons la maintenir. La fondation existe grâce à des dons privés et nous voulons voir si nous prouvons trouver des donateurs. Nous espérons que notre appel sera entendu car ces bourses peuvent faire une différence pour inciter les femmes francophones à poursuivre leurs études et à atteindre leurs rêves. »