Le plus grand conseil scolaire de London veut sabrer dans l’immersion en français

Le Conseil scolaire du district de Thames Valley prévoit des réductions considérables dans son programme d'immersion en français. Gracieuseté

LONDON – Le Conseil scolaire du district de Thames Valley compte réduire le volume d’enseignement dispensé en français dans son programme d’immersion, et ce en faveur de l’anglais. Un changement qui, entre autres propositions, fera en sorte de retarder l’entrée en immersion de la maternelle à la 1re année.

C’est sur son site internet qu’on peut voir les dernières propositions du Conseil scolaire du district de Thames Valley (TVDSB) dans le Sud-Ouest, et elles ne sont pas bien réjouissantes pour la communauté francophone de la région. Le conseil public envisage de couper considérablement la quantité d’enseignements et d’apprentissages dispensée en langue française dans son programme d’immersion en français.

Contactée à ce sujet, la superintendante aux Services de soutien à l’apprentissage du TVDSB, Marion Moynihan évoque une cause de plus en plus pressante.

« Ce qui nous a poussés à proposer un tel changement c’est la pénurie d’enseignants en français qualifiés. À titre d’exemple, nous avons eu des difficultés à trouver des enseignants de français qualifiés qui pourraient également enseigner la musique instrumentale. Ces changements permettraient aux écoles d’immersion française une flexibilité dans l’embauche », explique-t-elle.  

Justification peu satisfaisante

L’argument est jugé peu recevable par Carole Fleuret, professeure titulaire à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa.

« Le manque de personnel francophone dans les écoles est un problème national est non seulement propre à ce conseil ou à la province. On est malheureusement encore une fois dans une perspective ou le français est amoindri alors qu’on est soi-disant dans une dualité linguistique au Canada », déplore-t-elle.

Et d’ajouter : « Le problème comme sa solution sont à chercher ailleurs avant de tomber dans des mesures aussi drastiques. Pour pallier à ce manque, on peut par exemple embaucher des étudiants qui terminent leur Bac ou encore des enseignants étrangers qui viennent de langue seconde. Mais, pour cela, il faut d’abord arrêter de ne pas reconnaître l’équivalence de leurs diplômes comme c’est souvent le cas. »  

Carole Fleuret, professeure titulaire à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa. Gracieuseté 

50 % en français et 50 % en anglais en 7e et 8e année

Toutefois, hormis le cours de musique, ce sont également d’autres matières essentielles, comme les mathématiques ou encore l’éducation physique qui seront enseignées en anglais au lieu du français comme cela devrait être le cas pour les élèves de la 7e et la 8e année.

Pour ces derniers, le TVDSB projette d’écourter l’enseignement en français à 50% au lieu des 80% en vigueur, tout en gardant cette proportion sur le cycle qui s’étale de la 1re à la 6e année.  

L’autre idée du conseil qui interpelle est celle qui consiste à décaler l’année d’entrée des élèves en immersion française de la maternelle à la 1re année, c’est-à-dire que l’immersion ne débuterait qu’en scolarité obligatoire. À ce propos, Carole Fleuret est catégorique. D’après elle, ce changement est très préjudiciable à l’apprentissage du français, car l’initiation est complètement différente selon qu’on intègre la maternelle qui offre une bonne base dépourvue d’inhibition de la part de l’enfant ou la 1re année.  

En outre, la professeure prévient que « si le moyen le plus facile est de couper le français en immersion sous prétexte qu’on n’a pas assez d’enseignants qualifiés, c’est une porte ouverte à tous les autres conseils scolaires pour suivre cette voie. »

Consultation publique

Pour le moment, les responsables du TVDSB assurent qu’il ne s’agit encore là que de propositions. Néanmoins, tout porte à croire que les résultats de la consultation publique lancée par le conseil via son site internet, afin de recueillir les avis externes, surtout des parents, et qui s’est clôturée lundi dernier, seront le véritable facteur de décision pour faire adopter lesdits changements. 

« Nous n’avons pas encore examiné les résultats de la consultation publique. Lorsqu’ils seront disponibles, ils seront transmis à l’administration supérieure de notre conseil pour examen », s’est contentée d’affirmer Marion Moynihan.  

Pour rappel, le conseil scolaire en question compte à son actif pas moins de 80 000 élèves encadrés par 10 000 membres du personnel, ce qui fait de lui le quatrième plus grand conseil scolaire public de l’Ontario et le plus important de London. Une ville qui abrite quelque 10 000 francophones et est désignée en vertu de la Loi sur les services en français.