Culture

Le spectacle musical Femme-euses prépare un arrêt à Ottawa

Le spectacle Femme-euses veut valoriser l'apport des femmes dans l'histoire de la musique de façon festive. Photo: Timothé Hétu/@timothe_visuals

OTTAWA – Le 31 juillet, le Rainbow Bistro d’Ottawa accueillera le spectacle Femme-euses, qui rend hommage aux femmes de l’industrie musicale. ONFR s’est entretenu avec deux membres du collectif, la trompettiste Ianne Allard et la chanteuse Juliette Lefebvre-Tardif, pour expliquer le concept du spectacle et sa genèse.

Percussions, voix, guitares, claviers, cuivres, costumes roses et paillettes… avec une dizaine de musiciens sur scène, tout est en place pour une soirée festive. Les spectateurs peuvent s’attendre à danser et chanter sur des rythmes qu’ils connaissent déjà dans un répertoire large : ABBA, Heart, mais aussi des succès plus contemporains comme ceux de Klô Pelgag ou de Comment Debord. La particularité de Femme-euses, c’est que toutes les chansons ont à la base été écrites, composées ou interprétées par des femmes, ou des groupes qui incluent des femmes.

Au passage, le collectif éduque le public sur des anecdotes souvent méconnues de l’histoire de la musique, comme l’explique Ianne Allard : « Par exemple, c’est une femme qui l’a composée, mais elle s’est battue pour ses droits d’autrice. On aime raconter ces histoires sur scène. »

Femme-euses est un groupe mixte qui met en vedette des chansons populaires de femmes de l’industrie de la musique. Photo : Justine Boucher/@juste_.ju

Juliette Lefebvre-Tardif donne en exemple la bassiste Carol Kaye, qui a joué sur nombre d’albums marquants de l’histoire américaine. La chanteuse de Femme-euses trouve important de faire reconnaître les musiciennes à leur juste valeur.

La trompettiste Ianne Allard abonde dans le même sens : « Les femmes dans les cuivres, c’est assez rare. J’ai tendance à me cacher derrière mes collègues masculins, à moins prendre les devants. »

La musicienne tente de s’en permettre davantage, en se proposant pour faire les arrangements pour le groupe ou en s’octroyant des solos pendant les concerts.

Elle renvoie la balle à sa collègue : « Au Cégep et même maintenant, Juliette était notre chanteuse, mais aussi notre leadeuse. Elle était notre productrice déléguée, notre directrice musicale. Elle connaît tous nos arrangements par cœur. C’est vraiment un atout. »

La place des femmes en musique

Les deux musiciennes croient que l’industrie de la musique a évolué en matière d’égalité des genres. En constatant le reste du chemin à faire, elles préfèrent embarquer dans le train, voire la locomotive.

Selon Ianne Allard, la lutte féministe en musique sera terminée lorsqu’on ne sera plus étonnée de voir une femme à la batterie, ou qu’on ne soulignera plus qu’un prix est gagné par une femme pour la première fois en plusieurs années, par exemple. « Quand on va arrêter de souligner que je suis une femme, je vais être contente. Mais on est encore là, et c’est important. »

Ianne Allard se réapproprie les paillettes grâce à Femme-euses. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

L’idée de porter du rose sur scène vient également d’une envie de revaloriser ce qui est considéré comme féminin. Ianne Allard avoue avoir rejeté cette couleur par le passé, et que le fait de mettre une robe à paillettes pour Femme-euses a eu un effet presque cathartique.

Le groupe invite les spectateurs à assister au spectacle habillés en rose, peu importe leur genre.

La genèse

Le projet a démarré autour d’étudiants en musique au Cégep Marie-Victorin, à Montréal. La cohorte de finissants en interprétation devait monter un spectacle de fin de session et l’idée de rendre hommage aux femmes en musique a plu à tous, incluant les étudiants masculins. Les cinq musiciens se sont entourés de connaissances d’autres cohortes pour créer la toute première version de Femme-euses.

« Je me rappelle de ce spectacle. C’était dans une salle assise et tout le monde a fini par se lever, se remémore Ianne Allard. L’ambiance, la scène, la boule disco, les éclairages roses, tout le monde habillé en paillettes… ça a été un de mes spectacles préférés. »

Le spectacle à l’Escogriffe de Montréal a connu un franc succès. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

Elle explique qu’à la session suivante, la cohorte a produit un autre concept, mais les gens continuaient de lui parler de Femme-euses. Les jeunes musiciens ont profité de la vague pour présenter leur spectacle au bar l’Escogriffe de Montréal, comme activité de financement pour leur spectacle suivant. Le succès de cette deuxième représentation confirmait qu’il y avait là un filon qui méritait d’être exploité davantage.

La composition du groupe a évolué avec le temps. Le projet scolaire est devenu un projet entre amis musiciens.

Et maintenant…

Lors des spectacles à Montréal, le public était composé en partie d’autres artistes et connaissances des musiciens. Les passages à Ottawa le 31 juillet et à la Foire gourmande de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord-Est ontarien à Ville-Marie (Québec) le 2 août seront nécessairement différents, et de bons tests pour comprendre la viabilité du projet.

Juliette Lefebvre-Tardif travaille à assumer pleinement le titre de « chanteuse », parfois vu comme « juste chanteuse » dans l’imaginaire collectif. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

Juliette Lefebvre-Tardif considère que son groupe offre une représentation intéressante : « C’est un beau message d’être un groupe mixte, et que tout le monde soutienne la cause des femmes. »

Niveau logistique, il peut être compliqué de faire de la tournée avec autant de personnes, et encore plus d’en tirer profit. Le groupe s’attend au moins à égaliser les dépenses et les revenus pour cette mini-tournée.

L’envie de poursuivre Femme-euses est tout de même présent. Que ce soit en élaborant des spectacles dans des thèmes ou des styles spécifiques, avec plus ou moins d’animation et de faits historiques dans les chansons, en formule corporative, bar ou festival, « il y a beaucoup de choses qu’on peut faire avec ça », imagine Juliette Lefebvre-Tardif.

Peu importe leur genre, les musiciens de Femme-euses sont heureux de porter le rose et de soutenir la cause des femmes en musique. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

Les deux amies croient que la musique et l’esthétique leur permettront d’établir un lien avec le public et ne voient pas d’enjeu avec la barrière de la langue. Elles s’attendent à avoir un public bilingue et à s’exprimer majoritairement en français pendant le spectacle au Rainbow bistro.

« C’est excitant et on part entre amis. Ça reste un petit road trip », exprime Ianne Allard.