« L’éducation est primordiale en matière de langues officielles » – Shirley MacLean

La commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Shirley MacLean. Gracieuseté

[ENTREVUE EXPRESS]

QUI :

Shirley MacLean est la nouvelle commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick.

LE CONTEXTE :

Après plus d’un an d’intérim, Michel Carrier cèdera sa place à Shirley MacLean à la tête du Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, début janvier. Le gouvernement progressiste-conservateur de Blaine Higgs a annoncé la nomination de cette avocate anglophone, bilingue, le vendredi 22 novembre. Une annonce qui était très attendue par la communauté acadienne et francophone de la province, notamment. Mme MacLean est la troisième commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, la première anglophone.

L’ENJEU :

Mme MacLean n’aura pas la tâche facile dans une province où les tensions linguistiques semblent en recrudescence ces dernières années. Le nouvelle commissaire devra composer avec la présence à l’Assemblée législative de l’Alliance des gens du Nouveau-Brunswick, un parti opposé au bilinguisme dans la seule province officiellement bilingue du Canada, qui a voté contre sa nomination.

« Qu’est-ce qui vous intéressait dans le poste de commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick?

J’ai appris le français à l’âge adulte, dans ma vingtaine. Je viens d’un village de Nouvelle-Écosse où nous n’avions pas tellement de francophones, mais où venaient souvent des touristes du Nouveau-Brunswick et du Québec. Je trouvais ça dommage de ne pas pouvoir parler avec eux. J’ai donc décidé de partir au Québec en immersion, puis à l’université au Nouveau-Brunswick. Et c’est là que j’ai choisi de rester, car je savais que cela me donnerait l’occasion de pratiquer plus souvent mon français et donc de ne pas le perdre. Comme jeune avocate, j’ai travaillé sur des causes en français, c’était l’idéal pour m’améliorer.

Alors, quand j’ai su que le poste de commissaire était disponible, j’ai pensé que j’étais une bonne candidate. Ça fait 30 ans que je vis au Nouveau-Brunswick et je pense que mon profil est intéressant pour montrer aux gens qui pensent que ce n’est pas possible qu’on peut apprendre le français à l’âge adulte.

Est-ce que ça a été difficile d’apprendre le français?

Au Québec, j’étais en immersion, donc je n’avais pas vraiment le choix de parler français, même si beaucoup de personnes voulaient pratiquer leur anglais avec moi. Mais c’est vrai que ce n’est pas toujours facile! Il faut s’accrocher. Quand on est adulte, on a tendance à être plus gêné de faire des erreurs, ce qui pose des difficultés. Les enfants n’ont pas cette même gêne.

Quelle est votre vision du poste de commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick?

C’est celle de toujours s’assurer que les droits linguistiques sont pleinement respectés. C’est le rôle du commissaire de s’en assurer et c’est ce que je vais faire. À mon arrivée, je vais prendre connaissance des dossiers et rencontrer les membres du gouvernement et les élus pour parler du respect et de la vitalité des deux langues officielles.

En quoi considérez-vous que votre parcours professionnel vous aidera dans cette fonction?

Un des rôles du Commissariat est de recevoir des plaintes, de faire des enquêtes et des recommandations. C’est quelque chose que je fais déjà dans mon métier actuel [Mme MacLean occupe jusqu’ici le poste de directrice adjointe et de registraire des plaintes du Barreau du Nouveau-Brunswick], donc je me sens outillée.

Un poste comme celui de commissaire demande un sens de l’équité et de la médiation pour savoir comment approcher les personnes dans des situations difficiles. Et c’est quelque chose que j’ai développé dans ma carrière au Barreau.

Quels sont les principaux défis que vous voyez pour le Commissariat?

Le principal défi, c’est de bien faire comprendre l’importance des deux langues officielles, convaincre les gens qu’apprendre la deuxième langue officielle est possible, s’ils le souhaitent, et leur faire accepter les avantages du bilinguisme pour la province. Il faut bien expliquer à quel point les langues officielles et leur apprentissage sont un enrichissement, un atout économique et une opportunité, notamment pour leurs enfants, d’accéder à de meilleurs emplois.

Certaines personnes y semblent réfractaires. Comment faire avec elles?

Je pense que l’éducation est primordiale en matière de langues officielles. On doit créer des opportunités d’apprendre la langue et de partager les cultures.

Pensez-vous, comme ça a été souligné, que le fait d’être une anglophone bilingue vous facilitera la tâche pour parler des langues officielles à la communauté majoritaire, notamment celles et ceux qui remettent en cause le bilinguisme?

Je ne sais pas… Mais je pense que c’est bien d’avoir une alternance pour le poste de commissaire.

Votre précédesseure, Katherine d’Entremont, a subi des critiques sévères au cours de son mandat. Est-ce que cela ne vous effraie pas?

Dans tout ce qu’on fait, on peut toujours être critiqué. Donc, ça ne m’effraie pas. Ce sera à la population de la province de décider s’ils sont contents de mon travail. »