Les francophones veulent accueillir les demandeurs d’asile
OTTAWA – L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) et la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada ont lancé un message conjoint de bienvenue aux demandeurs d’asile en provenance des États-Unis, le jeudi 7 septembre.
BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet
La crise qui a conduit depuis le début de l’été des milliers de familles haïtiennes vivant aux États-Unis sur les routes de l’exil vers le Canada est surveillée avec attention par les communautés francophones en contexte minoritaire.
« L’immigration et la diversité, c’est prioritaire pour nos communautés. Les demandeurs d’asile sont des gens qui peuvent apporter une contribution importante à la vitalité de la francophonie. De son côté, IRCC [Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada] a des obligations linguistiques qui l’engagent à appuyer cette vitalité. Lors de la crise des réfugiés syriens, ces obligations n’étaient pas sur le radar des fonctionnaires et il faut éviter de répéter cette erreur », lance le président de la FCFA, Jean Johnson.
La FCFA souhaite obtenir une rencontre avec le ministre de l’Immigration, Ahmed Hussen, pour parler de cette question.
« On souhaite un engagement public du ministre, car nos communautés ont la capacité de faciliter l’intégration des demandeurs d’asile qui seront acceptés », souligne M. Johnson.
Alors que le gouvernement fédéral peine à atteindre sa cible d’immigration francophone à l’extérieur du Québec, le président de la FCFA juge que la situation actuelle offre une occasion en or d’agir auprès des communautés de l’extérieur du Québec.
« Le gouvernement se fixe une cible de 5 % d’immigration francophone, mais le problème c’est qu’il n’a aucun plan pour y arriver. Actuellement, ce sont souvent des institutions anglophones qui s’occupent de l’intégration des nouveaux arrivants, avec un employé qui parle français. C’est le point de départ de l’assimilation accélérée de ces gens-là. Ça ne fonctionne pas! Le gouvernement devrait plutôt outiller nos organismes francophones existants. C’est une question de volonté politique de changer ça et aujourd’hui, il y a urgence! »
En mission à Montréal?
Souvent méconnues des candidats à l’immigration, les communautés francophones de l’extérieur du Québec offrent de belles opportunités pour les nouveaux arrivants, souligne le président de l’AFO, Carol Jolin.
« Il y a beaucoup de possibilités en Ontario français. Nous avons un excellent système scolaire et de bonnes opportunités d’emploi avec des endroits où il y a une obligation d’offrir des services en français qui n’est pas toujours respectée faute de ressources humaines. Dans le domaine scolaire, de la santé, des services sociaux, au niveau du développement communautaire… il y a des besoins à combler. »
Parmi les pistes de réflexion, les organismes francophones réfléchissent actuellement à organiser une mission à Montréal, d’ici un mois, afin d’aller à la rencontre des demandeurs d’asile.
Le directeur général de l’Association culturelle de la jeunesse haïtienne de demain, Patrick Auguste, pense que les ambassades canadiennes ont aussi un rôle à jouer.
« Actuellement, les Haïtiens qui arrivent des États-Unis ne connaissent pas l’existence des communautés francophones à l’extérieur du Québec. C’est une option qui ne leur est pas présentée. Il y a un travail à faire là-dessus aussi. »
Depuis le début de la crise, le Conseil économique et social d’Ottawa-Carleton rapporte avoir reçu une cinquantaine de demandes d’asile à Ottawa.
L’intervention de la FCFA et de l’AFO intervient au lendemain du cri du cœur lancé par la communauté haïtienne de Toronto qui s’impatiente et demande aux gouvernements de l’Ontario et fédéral des gestes concrets immédiatement.
Priorité à l’emploi
Pour parvenir à convaincre les demandeurs d’asile haïtiens de quitter Montréal, M. Auguste souligne que la solution passe forcément par l’emploi.
« Les migrants sont souvent réticents à aller s’installer en dehors des grands centres, car leur préoccupation majeure est l’emploi et qu’ils pensent qu’il sera plus facile pour eux d’en trouver un dans un grand centre. En leur donnant l’information qu’il existe des opportunités d’emploi à l’extérieur du Québec, dans des communautés francophones, ils deviennent ouverts à ça. Et le mieux pour leur transmettre cette information, c’est de les mettre en contact avec des gens qui sont passés par là auparavant et qui connaissent le processus. »
Raison pour laquelle a été lancé, ce jeudi, un répertoire en ligne des emplois disponibles au pays sur lequel les employeurs et simples citoyens pourront partager les opportunités professionnelles à travers le Canada.
« Et peu importe si ces personnes trouvent un emploi en anglais, ce qui est important, c’est qu’elles soient accueillies et intégrées en français », souligne M. Johnson.