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[ANALYSE]

Les libéraux de Kathleen Wynne s’amusent ces jours-ci à mettre des images de « gougounes », ces sandales de plage que les anglophones appellent aussi des « flip-flops », sur plusieurs de leurs communiqués partisans. Ils cherchent à parodier le tête-à-queue politique des progressistes-conservateurs de Patrick Brown sur la question du changement climatique.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

Un « flip-flop », en anglais, c’est aussi une valse-hésitation.

Et l’opposition officielle à Queen’s Park a bien valsé sur l’enjeu du climat au cours des dernières semaines. Le 3 mars, deux jours avant que Patrick Brown se prononce en faveur d’une taxe sur le carbone, sa députée Lisa Thompson exhortait encore le gouvernement à « suivre le conseil » de sa formation et à ne « pas implanter une taxe sur le carbone ».

Le clan Wynne veut utiliser les revenus d’un éventuel marché du carbone, évalués à près de 2 milliards $ par année, pour financer des projets « verts » d’infrastructure.

Le chef du Parti PC se dit lui aussi en faveur d’un prix sur les émissions polluantes pour lutter contre le changement climatique. Il souhaite, par contre, que les profits de cette taxe soient redistribués aux contribuables, comme c’est le cas en Colombie-Britannique. Il craint autrement que l’argent tombe dans une « caisse noire » du gouvernement.

La profession de foi « écolo » de M. Brown a provoqué la surprise et a reçu un accueil assez mitigé sur le plancher d’un congrès du Parti PC à Ottawa, où 1700 militants étaient rassemblés le week-end dernier. Il va sans dire que la formation compte encore dans ses rangs un bon nombre de sceptiques ​et ​de négationnistes du changement climatique.

Les libéraux ont vu là une occasion de mettre en exergue un « flip-flop » des progressistes-conservateurs et ils l’ont saisi. C’est de bonne guerre. Et surtout, c’est peut-être la dernière occasion pour le parti au pouvoir de savater l’opposition sur la question de l’environnement.

Débat sur la forme

Les trois formations politiques à Queen’s Park perçoivent maintenant le changement climatique comme une menace et veulent agir pour réduire l’empreinte environnementale de la province.

C’est un débat sur la forme, et non plus sur le fond.

D’un point de vue purement politique, c’est une mauvaise nouvelle pour les libéraux. Ils viennent de perdre un de leurs meilleurs points d’attaque sur les progressistes-conservateurs. C’était bien plus facile de critiquer le refus d’agir de M. Brown que ça le sera de déprécier sa vision d’un impôt-carbone versé directement aux contribuables pour amortir une hausse inévitable du coût de la vie.

Les libéraux doivent aussi se méfier de l’effet boomerang. Les progressistes-conservateurs n’ont pas le monopole du « flip-flop​ ».

Le gouvernement Wynne a annoncé, cette semaine, qu’il interdira le vapotage de marijuana thérapeutique dans les lieux publics alors qu’il avait laissé entendre exactement le contraire, il y a trois mois.

Il ne faudrait pas trop ambitionner sur les « gougounes ».

Une fois ou deux, ça marche. Après le cinquième communiqué orné de petites sandales de plage, ça commence à piétiner.

Cette analyse est publiée également dans le quotidien LeDroit du 12 mars.