Loi sur les langues officielles : pas de clauses linguistiques dans les ententes provinciales-fédérales
OTTAWA — Ottawa n’obligera pas les ministères fédéraux à inclure des clauses linguistiques dans leurs ententes avec les provinces qui pourraient affecter les minorités francophones. C’est ce qui ressort du dépôt du second de trois règlements nécessaires pour l’application complète de la refonte de la Loi sur les langues officielles et qui a été rendu public par Ottawa mardi.
Ce projet de règlement vise à assurer la mise en application de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles, l’une des plus importantes portions de la Loi sur les langues officielles (LLO), selon les juristes et organismes francophones. Il a été déposé mardi à la Chambre des communes par le président du Conseil du Trésor, Shafqat Ali. Il aura fallu plus de deux ans pour présenter ce règlement, qui ne compte que six pages.
La Partie VII de la Loi sur les langues officielles est dédiée à « l’épanouissement et au développement » des minorités francophones et aux mesures positives du gouvernement fédéral. Elle engage le fédéral, notamment financièrement, à assurer l’égalité du français et de l’anglais. Cette partie définit les obligations linguistiques majeures des ministères et institutions fédérales.
« Ce règlement établirait une approche plus cohérente et uniforme qui soutiendrait les institutions fédérales dans la prise de mesures positives visant à soutenir les collectivités de langue officielle en situation minoritaire et à protéger et à promouvoir le français dans tout le pays », a soutenu dans un communiqué le président du Conseil du Trésor, Shafqat Ali.
Clauses linguistiques
Dans la section portant sur les ententes avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, le règlement mentionne de « proposer des dispositions à inclure dans l’accord » et de « favoriser » leur inclusion, mais n’y oblige en rien. La Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) réclamait que « le règlement puisse contenir des incitatifs, voire des obligations en ce sens, en particulier lorsque des ententes sont signées ».
« Ces obligations pourraient être remplies de plusieurs manières, soit par l’entremise de clauses linguistiques spéciales, ou encore en assurant qu’on évite ou atténue les impacts négatifs sur les communautés francophones », soulignait il y a quelques mois la FCFA dans un mémoire sur les réglementations en lien avec la LLO.
Idem pour le commissaire aux langues officielles qui a souvent réclamé, au gré de ses rapports, l’inclusion de telles obligations dans les ententes entre le fédéral et les paliers provinciaux.
« On a vu par le passé que l’absence de dispositions linguistiques fortes et précises dans les ententes intergouvernementales s’est trop souvent traduite par un financement défavorable à ces communautés, par exemple en petite enfance », écrivait Raymond Théberge dans son rapport intitulé Un avenir en commun : regard sur nos communautés de langue officielle en situation minoritaire en 2024.

Parmi les autres points présentés mardi, on détaille la façon dont les institutions fédérales doivent chercher à éviter ou atténuer les répercussions négatives directes de leurs décisions, analyser l’effet des mesures positives, en plus de préciser « comment les institutions fédérales doivent mener leurs activités de dialogue et de consultation ».
Le projet de règlement peut toujours être modifié par le gouvernement. Les parties prenantes pourront dans les prochains mois formuler des commentaires vis-à-vis du projet de règlement et le gouvernement devra ensuite l’adopter. La FCFA et le commissaire aux langues officielles ont tous deux fait savoir qu’ils souhaitaient d’abord analyser le document d’Ottawa avant de présenter leurs commentaires.
L’ex-ministre des Langues officielles Steven Guilbeault avait déposé un premier règlement le mois dernier, portant sur les pouvoirs du commissaire aux langues officielles à donner des amendes aux institutions fédérales récalcitrantes servant le public voyageur. Ces règlements visent à faire entrer en vigueur des sections de la LLO, modernisée en 2023, qui n’ont pas encore d’effet juridique aujourd’hui.