Randy Boissonnault le ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et des Langues officielles. Crédit image: Stéphane Bédard.

OTTAWA – À partir de quand les mauvais joueurs fédéraux en matière de services en français, comme Air Canada, seront pénalisés ou contraints de changer leurs pratiques? La question reste en suspens alors que le gouvernement Trudeau doit statuer sur plusieurs des nouveaux pouvoirs du Commissariat aux langues officielles, un processus qui suivra son cours, plaide le ministre dans le dossier.

Le projet de Loi C-13, adopté en juin dernier, est venu mettre à jour la Loi sur les langues officielles qui n’avait pas connu une telle refonte depuis une vingtaine d’années. Mais des éléments centraux de la Loi ne sont toujours pas en vigueur. Des articles de la mouture doivent être décidés par réglementation et sont entre les mains du ministre Randy Boissonnault.

On peut notamment penser aux accords de conformités que le commissaire pourrait conclure ou encore aux amendes financières, à la hauteur de 25 000 $ qu’il pourra distribuer. Quels manquements à la Loi obligeront le commissaire à aller devant les tribunaux par exemple ou qui constitueront une amende?

Pour l’instant, ça reste une page blanche, mais le ministre indique que les fonctionnaires ont déjà commencé à s’y pencher. Ce dernier explique qu’il « a un engagement ferme à faire le travail, qui ne prendra pas des années ».

« Je ne veux pas faire un décret qui ignore certains éléments », affirme-t-il en entrevue à son bureau de la Colline.

« Est-ce que j’ai un échéancier? Non, car je veux que le travail soit bien fait et de la bonne manière et ça implique une certaine grille de rencontres. »

Il reste aussi à identifier les « régions à forte présence francophones », au pays (hors Québec) qui obligeront un service au consommateur et un droit de travailler en français dans les instances fédérales.

Réglementation : le commissaire « presse » le fédéral

Parmi d’autres exemples, les détails autour des prises de mesures positives restent inconnus, alors qu’avec la Loi, les institutions fédérales ne pourront prendre des décisions affectant de manière négative les communautés francophones. Le commissaire aux langues officielles Raymond Théberge estime que cette section de la LLO est « primordiale » pour les francophones en situation minoritaire et que « ça presse » d’aller de l’avant. Son bureau prépare actuellement un plan et a déjà formulé des demandes de financement en vertu de ses nouveaux pouvoirs auprès de l’appareil fédéral, indique-t-il.

« Mais ce qui est important, c’est la mise en œuvre rapide de tous les éléments du projet de loi. De la partie 7 à la Loi sur l’usage du français (dans les entreprises fédérales). On a notre loi, mais là ce qui compte, c’est la mise en œuvre », formule-t-il comme demande en entrevue.

Le commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge. Archives ONFR+
Le commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge. Archives ONFR+

De son côté, le ministre veut connaître le point de vue aux différents partis impliqués dans le dossier, mais il ajoute, vouloir offrir le plus de latitude possible au commissaire aux langues officielles.

Succédant à Ginette Petitpas Taylor aux Langues officielles, M. Boissonnault pilote aussi le portfolio de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre, une combinaison avec un avantage notable à son avis concernant le manque de travailleurs bilingues au pays.

« Je sais ce qu’on a besoin, c’est plus de main-d’œuvre, et si on parle de l’abordabilité, c’est quoi la meilleure façon de contourner une crise du cout de la vie? Un bon emploi. Là, on a les leviers pour faire ce double travail. »

Le Plan d’action sur les langues officielles

« On a beaucoup d’annonces qui vont venir », prévient le politicien franco-albertain.

Ottawa avait annoncé en mai dernier un Plan d’action pour les langues officielles de 2023 à 2028 avec un investissement de 4,1 milliards de dollars, dont 1,3 milliard en bonification. On ignore encore toutefois vers quels programmes ou organismes seront redirigés les montants promis lors du budget de 2023.

Le ministre mentionne la possibilité de nouveaux partenariats et le fait qu’il y a « beaucoup d’argent » sur la table pour l’éducation postsecondaire et la pénurie de main-d’œuvre francophone.