Loi sur les services en français : coup de pression du NPD sur le gouvernement
TORONTO – Le député provincial néo-démocrate Guy Bourgouin a rendu public, ce mardi, un plan de modernisation de la Loi sur les services en français visant à rétablir un Commissariat aux services en français indépendant et à élargir la notion d’élèves ayants droit en éducation de langue française.
« On ne pas renforcer l’accès aux services en français avec des coupures et des promesses vaines », plante le porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) aux Affaires francophones. « On ne peut pas non plus améliorer les services de santé, de justice et d’éducation avec une loi qui date de 1986. La communauté mérite une loi à la hauteur de ses besoins, une loi qui reconnaît son dynamisme et son évolution identitaire. »
Le député néo-démocrate a choisi la veille du 25 septembre, Jour des Franco-Ontariens, pour porter un dossier hautement symbolique aux yeux de la communauté : la modernisation de la Loi sur les services en français.
Entrée en vigueur il y a 30 ans, cette Loi qui garantit aux francophones dans 26 régions désignées le droit à des services en français de la part du gouvernement provincial ne reflète plus la réalité d’aujourd’hui, selon bon nombre d’observateurs.
Pour y remédier M. Bourgouin a dressé les grandes lignes de son plan, dévoilant quatre mesures majeures :
- l’accès à des services gouvernementaux partout dans la province,
- l’application et la généralisation de l’offre active en français,
- le rétablissement du commissariat aux services en français indépendant,
- l’adoption d’une définition inclusive du mot francophone.
La redéfinition du terme francophone tendrait à reconnaître, outre les personnes dont la langue maternelle est le français, l’évolution et le caractère multiculturel de la communauté franco-ontarienne.
Les conseils scolaires espèrent ainsi accroître le nombre d’élèves ayants droit. Une définition plus large permettrait également aux agences fournissant des services en français d’agir en fonction de données chiffrées réactualisées. Elle contribuerait enfin, espère-t-on, à une meilleure rétention des immigrants francophones et à freiner l’assimilation.
Une promesse du ministère
Après le revirement gouvernemental sur la création l’Université de l’Ontario français, le député de Mushkegowuk-Baie James ambitionne de faire plier la majorité au pouvoir, rappelant la promesse faite par la ministre des Affaires francophones, il y a un an, de revoir la Loi.
Les chances d’aboutir sont minces mais « c’est une obligation et une responsabilité de faire avancer ce dossier », insiste le parlementaire. « La communauté a évolué. Il est grand temps de changer la Loi. »
Pour Carol Jolin, président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), cette annonce a le mérite de « mettre dans l’air public le besoin d’une réforme. C’est la suite d’un travail en étroite collaboration entre l’AFO et l’AJEFO (Association des juristes d’expression française de l’Ontario) », dit-il.
Les deux organisations ont travaillé au sein d’un comité pour littéralement réécrire la loi. « On a fait un gros travail de défrichage. On est en train de finaliser le texte. Il y aura le libellé exact et ça sera présenté lors de notre congrès, fin octobre, puis approuvé lors de notre AGA. Ça deviendra notre document politique qu’on présentera à Mme Mulroney. »
Une seconde tentative dans l’opposition
Le projet de loi de M. Bourgouin reste très proche de celui déposé par l’ancienne députée libérale, Nathalie Des Rosiers, au printemps dernier. Ce dernier proposait déjà de rétablir le commissariat aux services en français indépendant, mais prévoyait aussi de contraindre l’Assemblée législative, les tribunaux et les municipalités à fonctionner dans les deux langues officielles et avec des règlements qui seraient bilingues.
« Les libéraux ont eu quinze ans au pouvoir pour moderniser la loi », a fustigé M. Bourgouin. « Ils ont attendu la dernière minute de la dernière journée à l’Assemblée pour bouger. L’université, c’est la même chose. Ils ont eu quinze ans et ils ont fait une annonce cinq jours avant les dernières élections. »
Les francophones ont besoin de gens qui fassent avancer leur dossier, a martelé le député du nord qui espère présenter son projet le plus rapidement possible. Son texte devra d’abord être ratifié par son caucus.
Plusieurs réactions positives
« Depuis décembre 2018, on est sur une grosse vague sur laquelle il faut surfer. En rétablissant le Commissariat, les Franco-Torontois auraient un défenseur proactif pour assurer la protection de leurs droits et pour appuyer l’épanouissement des services de langue française dans la région », est convaincu Serge Paul, le président de l’Association des communautés francophones de l’Ontario (ACFO) Toronto.
« La modernisation de la Loi permettra d’élargir l’espace francophone et assurera un avenir en français à nos élèves », selon la présidente du conseil scolaire MonAvenir, Melinda Chartrand.
« Il reste encore du travail à faire puisqu’il y a toujours plusieurs régions non désignées où les communautés sont assimilées faute de services en français », ajoute son homologue du Conseil scolaire Viamonde, Sylvie Landry. « Nous devons avoir notre mot à dire lorsqu’il est question de notre langue et de notre culture, et nous assurer que nous sommes protégés ».