L’Université de Sudbury veut devenir une université à 100 % francophone
SUDBURY — L’Université de Sudbury veut se départir de tous ses programmes en anglais dans le but de devenir une université « par et pour et avec les francophones ». L’Université de Sudbury veut faire cette démarche « dans les plus brefs délais ».
C’est ce qui a été annoncé par le recteur John Meehan de l’Université de Sudbury et l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) vendredi en conférence de presse.
« C’est une journée historique, car on peut assurer à la communauté francophone qu’on sera une université francophone », a lancé le recteur Meehan.
Jeudi soir, le conseil des Régents de l’Université de Sudbury a adopté une résolution demandant à ce que l’établissement postsecondaire devienne une entité francophone à part entière. Cette démarche commence dès maintenant, selon John Meehan.
« On dit dans les plus brefs délais et c’est vraiment avec le soutien de la communauté qu’on le fait et on commence dès maintenant parce que la communauté frappe à notre porte. La restructuration dont on parle va commencer dès demain matin pour que les besoins de la communauté franco-ontarienne soient remplis. C’est un rêve qui est là depuis des générations et c’est le temps. »
Au ministère des Collèges et Universités, on indique ne pas avoir reçu de demande officielle de l’Université de Sudbury à ce jour.
Cette annonce survient alors que l’Université Laurentienne, qui est affiliée avec l’Université de Sudbury, est en plein processus de restructuration après que l’établissement ait été déclaré insolvable. L’Université de Sudbury, qui est indépendante financièrement, n’a pas fait de demandes pour se protéger de la loi sur les créanciers comparativement à sa consœur de La Laurentienne.
Selon le recteur Meehan, la réflexion concernant la décision de vendredi avait commencé bien avant la situation de La Laurentienne.
Pour l’instant, John Meehan ne précise pas si son établissement souhaiterait rapatrier les programmes francophones de l’Université Laurentienne.
« On est là pour les francophones, les francophones ont parlé, ce n’est pas notre initiative à nous. (… ) On répond à une communauté qui veut faire entendre sa voix et qui a des besoins. Ça permettra à la communauté et au gouvernement de savoir qui va gérer ces programmes-là. Ça doit être géré par les francophones et il faut que l’argent donné par les francophones soit géré par des francophones. C’est la seule solution. Aujourd’hui, on n’est pas en mesure de répondre combien de programmes et de professeurs on va avoir. »
« Journée historique » pour l’AFO
Pour Carol Jolin, le président de l’AFO, c’est une journée historique au même titre que l’annonce de l’Université de l’Ontario français, la loi 104 donnant la gestion des écoles aux Franco-ontariens en 1997 et la lutte contre le règlement XVII jusqu’à son abrogation en 1927.
« Ce sont tous des éléments majeurs de l’éducation francophone et ça va faire partie de l’histoire (…) On va préparer une programmation en français pour les francophones et ceux du Nord de l’Ontario. J’inclus aussi les francophiles et ceux de l’immersion qui désirent poursuivre leurs études en français qui auront cette option. C’est une autre journée historique », soutient le président de l’AFO, en entrevue avec ONFR+.
Pour Carol Jolin, il n’y a aucun doute quant à la faisabilité du projet.
« Ça marche quand c’est géré par, pour et avec les francophones. Ça fonctionne partout où qu’on l’a fait, que ce soit avec nos écoles élémentaires, nos écoles secondaires et nos collèges avec La Cité et Boréal », donne en exemple le président de l’organisme franco-ontarien.
Pour que le projet puisse être réalisé, le gouvernement fédéral et le ministère des Collèges et des Universités doivent approuver la demande. Une approbation que l’AFO assure vouloir travailler à rendre réalité.
« C’est certain qu’on a des contacts pour pouvoir faire le travail politique nécessaire. Tout ça va se faire en accord avec la communauté et avec les gens de l’Université. Ça nous prend des gens qui nous disent quels sont leurs besoins et quoi faire. À partir de ce moment-là, nous autres on va être là pour les appuyer. »
Bonne nouvelle, mais prudence au RÉFO
Pour le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), cette annonce représentait un besoin pour les étudiants francophones du Nord de la province.
« On apprécie la décision de l’Université de Sudbury. On demande depuis la création de notre organisme que les Franco-Ontariens aient la gestion de l’éducation postsecondaire en français. On l’a avec l’Université de l’Ontario français, mais c’est dans une autre région. Il y a du travail à faire dans plusieurs régions et le Nord en était l’une d’elles », se réjouit François Hastir, le directeur général du RÉFO.
Le RÉFO assure ne pas vouloir se réjouir trop vite préférant attendre plus de détails au cours des prochaines étapes.
« Il reste beaucoup de détails et de choses à régler. On ne sait pas encore ce qui va se passer. On ne sait pas encore si le milieu politique va accepter la demande qui est faite », avance le dirigeant du RÉFO.
Ce dernier assure que cette démarche de l’Université de Sudbury doit se faire sans l’implication de La Laurentienne dans le dossier.
« C’est évident pour nous que le par et pour les francophones doit passer par une autonomie de l’institution, car si elle ne l’est pas à même de faire, choisir et modifier ces propres programmes, ça va dépendre alors d’un sénat qui est à majorité anglophone, et la problématique va rester la même. On prend la nouvelle d’un bon œil, mais avec précaution. »