Michèle LeBlanc, une récompense pour Hearst et l’amour du livre
[LA RENCONTRE D’ONFR+]
HEARST – La semaine dernière, l’auteure Michèle LeBlanc a vu son nom apparaître sur la liste des lauréats de la médaille de l’Ordre de la Pléiade de 2020. Auteure depuis une quinzaine d’années et directrice de la radio communautaire francophone de Hearst pendant dix ans, ses livres jeunesse et son implication au sein de la communauté lui ont valu cet honneur. Si la médaille de l’Ordre de la Pléiade reconnaît une contribution à la francophonie à l’échelle provinciale, c’est surtout au sein de la communauté de Hearst que Michèle LeBlanc aura laissé sa marque.
« La semaine dernière, il a été annoncé que vous aviez été choisie pour être l’une des six récipiendaires de la médaille de l’Ordre de la Pléiade. Comment avez-vous appris la nouvelle?
J’ai reçu un appel au début de l’année en février ou mars, tout juste avant que la pandémie commence. On m’avait avisé que le Mouvement des Intervenants en communication Radio de l’Ontario (MICRO) avait mis ma candidature et que j’étais ainsi récipiendaire et qu’il y aurait une cérémonie au mois d’avril, mais ils ont dû retarder l’annonce. C’est pour ça que ça l’a juste sorti dernièrement. Pour la cérémonie, elle a été repoussée à une date ultérieure.
Comment avez-vous accueilli la nouvelle?
Ça m’a surpris. Il y a tellement de gens qui font de bonnes choses pour la francophonie. Que ma candidature soit retenue était quelque peu renversant et touchant. Je le répète, mais il y a bien des gens qui en font beaucoup. On remet des prix à certains, mais il y en a d’autres qui en font autant.
Les gens qui ont reçu la médaille de l’Ordre de la Pléiade de l’Ontario ne courent pas les rues, encore moins ceux provenant de plus petites communautés du Nord de l’Ontario comme Hearst. Est-ce que vous en retenez une certaine fierté?
C’est certain et je pense que la communauté aussi. J’ai reçu des messages des gens qui étaient fiers que quelqu’un de chez eux soit honoré de cette façon-là. On est une petite communauté même si c’est très francophone. C’est touchant et encourageant en même temps.
Vous avez déménagé à Hearst en 1990. Pourquoi avoir décidé de s’installer à près de 1 400 kilomètres de votre Saguenay natal?
Nous avons déménagé pour l’emploi de mon conjoint à l’Université de Hearst. Tout de suite, on a été charmé par le milieu. On s’est bien intégré, et on s’est rapidement fait des contacts. On trouvait que c’était un endroit idéal pour fonder une famille. On n’a jamais pensé à repartir, car on s’est senti chez nous.
Peu nombreux sont ceux qui y arrivent et décident de s’y établir. Qu’est-ce qui vous a poussé à rester?
On trouvait que c’était un milieu qui avait beaucoup d’activités que ce soit au niveau culturel ou communautaire. Quand tu es dans une grande ville, il y a beaucoup de choses qui se passent et des fois, tu n’as pas le temps ou c’est dispendieux, alors ça fait en sorte que tu ne participes pas. Mais ici, on avait toujours de quoi et on avait le temps et avec notre proximité. Aussi, le fait que l’on connaissait des gens nous a permis une vie sociale très très diversifiée. On n’est pas arrivé en restant cloîtré chez nous. On a fait plein de choses et je pense que c’est ça qui a fait en sorte qu’on soit resté.
Vous avez publié votre premier livre en 2004, Gontran de Vilamir. Qu’est-ce qui vous a poussé dans le monde de l’écriture?
C’est une histoire particulière. J’ai toujours aimé la lecture et quand je suis arrivée à Hearst, j’ai débuté un deuxième baccalauréat. On avait un cours de grammaire française obligatoire et puis la professeure nous avait dit que pour que ça soit plus intéressant d’intégrer les règles de grammaire, on allait devoir écrire un roman pendant la session. Elle nous avait surpris et ma réaction avez été : est-ce qu’elle est folle (Rires)? On ne se sentait pas capable d’écrire ça.
Ça s’est bien passé finalement?
Oui, elle nous avait aidés à écrire un plan. J’avais une routine avec les trois enfants, le retour aux études et le travail, c’était assez chargé. Alors je m’assoyais le dimanche après-midi et je travaillais mes normes de grammaire, j’écrivais et je me suis rendu compte que c’était vraiment agréable et que j’aimais ça et que ça allait bien. C’est comme ça qu’est née la création du roman.
Vous semblez avoir une affection particulière pour les romans jeunesse, pourquoi?
C’est dans mes goûts et avec mes enfants dans le temps, ils étaient des lecteurs qui aimaient beaucoup les romans. On passait beaucoup de temps à lire des romans et à parler de ce qui se passait dans les romans jeunesse. C’est ça qui m’a attirée à partager mon goût pour ce type de littérature.
Vous avez aussi été directrice de la radio communautaire CINN-FM à Hearst de 1995 à 2005. Est-ce qu’il existe un lien plus particulier avec les gens pour ces radios communautaires de petites villes franco-ontariennes dans le Nord?
Ah oui, oui c’est certain, car c’est plus facile d’aller rejoindre les gens que dans un milieu plus grand. Si on fait un appel à tous sur une émission spéciale sur n’importe quel sujet, on est capable de recueillir des gens. Ici, la communauté est tellement proche de la radio. Encore cette année, le dernier Radiothon a amassé des fonds et ils ont atteint leur objectif en peu de temps.
L’avenir des médias, surtout des radios, semble de plus en plus en péril, avec l’arrivée des géants du web. Croyez-vous que les petites radios communautaires ont toujours leur état d’être?
Oui. C’est un média qui est très utilisé pour parler de ce qui se passe dans la communauté. C’était comme ça en 1995 quand j’ai commencé et c’est encore comme ça aujourd’hui. C’est encore très soutenu par les gens. C’est important pour eux d’entendre ce qui se passe chez eux.
Vous avez participé au Salon du livre de Hearst à de nombreuses reprises et on sait qu’ils sont rares les salons du livre francophone en Ontario, encore plus dans le Nord. Quelle est votre relation avec celui de Hearst?
Aux salons en Outaouais et à Montréal et ailleurs, tu vas à ton kiosque faire de la signature de telle heure à telle heure et ça se limite à ça à peu près. Mais ici, l’auteur vient et il fait des signatures et tout, mais il va aussi dans des salles de classe où les gens ont lu le livre, alors il y a déjà une interaction avec les lecteurs. Les auteurs qui ont passé par ici nous l’ont dit : la relation avec la communauté et les ventes ont fait en sorte qu’ils veulent être invités même si c’est loin.
Hearst compte aussi sur la libraire Le Nord, l’une des rares librairies francophones de l’Ontario. Quelle est votre relation avec la libraire?
J’ai été invitée à quelques reprises à des tables rondes et quand mon livre a été lancé, par chance, la librairie avait beaucoup de copies, car les gens en demandaient. C’est un exploit et ce qui lui donne une chance, c’est qu’il n’y a pas beaucoup de librairies francophones dans le Nord alors ça fait en sorte qu’elle peut desservir plus que Hearst, mais ce n’est pas évident non plus.
Finalement, d’autres livres sont-ils en préparation?
J’ai un deuxième roman qui est pensé et les premiers chapitres sont faits. J’ai changé d’emplois dans les trois dernières années et avec la famille, j’ai eu moins de temps. Ça va venir, je vais avoir plus de temps à un certain moment donné et je vais me remettre à l’écriture plus intensive. Je n’ai pas oublié l’écriture et j’ai encore l’envie. »
LES DATES-CLÉS DE MICHÈLE LEBLANC :
1961 : Naissance à Arvida dans le Saguenay (Québec)
1990 : Arrivée à Hearst
1995 : Obtient le poste de directrice de la radio communautaire de Hearst, CiNN-FM
2004 : Publication de son premier roman intitulé Gontran de Vilamir aux Éditions L’Interligne
2008 : Publication d’un recueil de quatre de ses nouvelles jeunesse intitulées Une rencontre inattendue et autres récits
2020 : Récipiendaire de de l’Ordre de la Pléiade
Chaque fin de semaine, ONFR+ rencontre un acteur des enjeux francophones ou politiques en Ontario et au Canada.