
Aucun ministre des Langues officielles : « Un manque de respect pour le français », juge Poilievre

OTTAWA – La décision du nouveau premier ministre Mark Carney de ne pas nommer un ministre des Langues officielles au sein de son cabinet ne passe pas auprès du chef de l’opposition, Pierre Poilievre, ni auprès d’organismes de la francophonie canadienne.
« Un manque de respect pour le français, a résumé le chef conservateur en conférence de presse. C’est encore pire avec la nomination de Rachel Bendayan comme ministre de l’Immigration, qui s’est déjà prononcée que le français n’est pas en déclin », a aussi signalé M. Poilievre.
Dans sa première prise de parole à titre de premier ministre, Mark Carney a mentionné à plus d’une reprise les deux langues officielles du pays, mais ces deux mots ne se retrouvent pas dans la composition de son cabinet.
Le chef libéral a confirmé que les responsabilités concernant l’anglais et le français tomberont plutôt entre les mains de Steven Guilbeault, à titre de ministre de la Culture et de l’Identité canadienne et de lieutenant du Québec.
« C’est un renforcement de notre identité. La langue française est au sein de l’identité canadienne et M. Guilbeault est un ministre exceptionnel (…) Cette question de l’identité canadienne, c’est plus large que les langues officielles, c’est plus large que notre patrimoine », s’est défendu Mark Carney en réponse aux questions des journalistes.

Un mauvais message est envoyé, selon la FCFA
La Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) déplore que Mark Carney « lance le message qu’en termes d’identité canadienne, les langues officielles, ça n’existe pas ».
« Le fait de vouloir un cabinet de petite taille n’est pas une excuse pour faire disparaitre le portefeuille des langues officielles, surtout pas au moment où l’identité canadienne et la souveraineté nationale du pays sont au centre des préoccupations », a déclaré la présidente de la FCFA, Liane Roy, qui se réjouit toutefois du bon nombre de ministres pouvant parler français.
« Le problème, c’est que la disparition du portefeuille des Langues officielles dilue énormément l’importance du dossier à un moment où l’on doit mettre l’accent sur tout ce qui fait la souveraineté nationale du Canada », ajoute-t-elle, signalant que l’enjeu « ne porte pas sur les convictions francophones » de M. Guilbeault.
La dernière fois que le portefeuille des Langues officielles n’était pas dans le cabinet était il y a 10 ans, note la FCFA, soulignant que c’est « la plus grande réingénierie du portefeuille de la culture depuis la création du ministère du Patrimoine canadien en 1993 ».

Pour l’assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), il s’agit d’un « changement notable », et le fédéral « devra clarifier rapidement la structure ministérielle en matière de langues officielles », plaide son président Fabien Hébert.
« Les langues officielles, c’est un dossier qui nous tient à cœur », mentionne la présidente du Conseil du Trésor et ex-ministre responsable de la modernisation de la Loi sur les langues officielles, Ginette Petitpas Taylor.
M. Guilbeault a défendu son nouveau rôle, expliquant qu’il vise à intégrer plusieurs facteurs qui définissent l’identité canadienne, ce qui inclut les « langues officielles, les arts, la culture et notre environnement et le milieu naturel ».
« C’est certain que les langues officielles sont au cœur de ce qu’on va faire au cours des prochains mois et des prochaines années », a rassuré l’ex-ministre de l’Environnement.
Pour l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC), la fin du portfolio des Langues officielles combinée au fait qu’une ministre des Femmes et Égalité des genres n’existe plus non plus, signifie que les femmes francophones « risquent d’être encore plus marginalisées par cette omission ».
Pour le Bloc québécois, l’absence d’un responsable au rôle des deux langues officielles « est la confirmation du peu de considération qu’ont les libéraux pour la langue française au Québec, comme au Canada ».
« Clairement, les libéraux ne s’en cachent plus : défendre et promouvoir la langue française, ça ne les intéresse pas du tout », soutient le député bloquiste Mario Beaulieu.