La nouvelle ministre des Langues officielles se rétracte après avoir refusé de dire s’il y a un déclin du français au Québec
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OTTAWA — La nouvelle ministre des Langues officielles, Rachel Bendayan, nommée vendredi par Justin Trudeau, a refusé de dire si le français était en déclin au Québec… mais s’est retractée quelques heures plus tard.
Questionnée à trois reprises par les journalistes, quelques instants après sa nomination, la représentante du comté montréalais d’Outremont n’a pas répondu à la simple question : « Est-ce que le français est en déclin au Québec, oui ou non? »
« Le Québec a un rôle très important. C’est la province qui doit d’abord et avant tout être francophone pour assurer que la dualité linguistique que nous avons ici au Canada est protégée et est maintenue. Mon père est francophone, ma mère est anglophone, alors je vis cette dualité linguistique. Je sais à quel point c’est important », a-t-elle lancé lors d’une conférence de presse en direct de Rideau Hall, où avait lieu la cérémonie d’assermentation des ministres.
Relancée une seconde fois, Rachel Bendayan a à nouveau refusé de répondre à la question, affirmant que « mon rôle, c’est de s’assurer que nous maintenons le bilinguisme ».
« C’est de s’assurer que la minorité anglophone au Québec soit protégée et que la minorité francophone hors Québec soit protégée, et que le bilinguisme soit protégé partout à travers le pays et que nous maintenons la dualité linguistique que nous avons et sommes si fiers », a poursuivi la nouvelle recrue au Conseil des ministres vers 13h20.
Mais à 15 h, l’opinion de la nouvelle ministre des Langues officielles avait évolué.
« Je n’ai pas refusé de répondre, plaide-t-elle. C’est vrai que le français est en déclin au Québec. C’est aussi vrai que je suis là pour supporter les minorités linguistiques hors Québec et la minorité anglophone au Québec », a-t-elle dit avant une première réunion du nouveau cabinet au Parlement.
Ses propos en conférence de presse ont été dénoncés par le conservateur Joël Godin sur X, qui considère que reconnaitre le déclin du français dans la Belle province « est pourtant le minimum ».
« Cela démontre, encore une fois, que ce gouvernement libéral n’a aucun respect pour les langues officielles, encore moins pour le français, la langue officielle la plus vulnérable au Canada », soutient le critique des conservateurs en matière de Langues officielles.
À Québec, le ministre de la Langue française et de la Francophonie canadienne, Jean-François Roberge, a affirmé que de nier le déclin du français « relève de l’irresponsabilité », appelant Mme Bendayan à « absolument le reconnaître, car il est de sa responsabilité d’inverser ce déclin ».
Selon le commissaire à la langue française du Québec, la part de personnes utilisant principalement le français à la maison a diminué, passant de 81 % (2016) à 79 % (2021). Les chiffres sur le français comme langue de travail, ceux soutenant connaître suffisamment le français et l’utilisation du français dans l’espace public (les commerces) ont tous diminué, selon le commissaire Benoît Dubreuil, dans un rapport publié en mai 2024.
Lors du dernier recensement, les francophones au Canada sont passés de 22,2 % en 2016 à 21,4 % en 2021. Les francophones hors Québec représentent désormais 3,3 % du poids démographique alors qu’en 2016, c’était 3,6 %. En Ontario, les Franco-Ontariens sont descendus de 3,8 % à 3,4 % entre 2016 et 2021.
Dans un communiqué, la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) a réagi à la nomination en indiquant « avoir hâte de pouvoir faire connaissance avec Mme Bendayan ».
« L’idéal serait que nous puissions avoir une rencontre avec la nouvelle ministre dès le mois de janvier pour échanger sur les réalités et les enjeux de nos communautés, particulièrement en ce qui a trait au financement provenant du Plan d’action pour les langues officielles, et sur comment elle entrevoit ses responsabilités et ce que seront ses priorités », déclare sa présidente Liane Roy.
La FCFA s’est aussi réjouie de la nomination de Ginette Petitpas Taylor au Conseil du Trésor, elle qui est notamment chargée d’adopter les réglementations liées à la Loi sur les langues officielles, un projet de loi qu’elle a elle-même fait adopter en 2023.
« La nomination de Ginette Petitpas Taylor au Conseil du Trésor arrive vraiment à point nommé… Dans ses nouvelles fonctions, elle pourra mener à terme l’adoption des règlements », se réjouit la présidente de l’organisme porte-parole des minorités francophones.