Pas de refroidissement pour Doug Ford
[ANALYSE]
TORONTO – Les étapes s’enchaînent pour le nouveau gouvernement de Doug Ford. Après les élections triomphales du 7 juin, et l’assermentation dans la foulée, les ministres progressistes-conservateurs et les nouveaux députés sont de retour en chambre, ce mercredi.
SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz
L’objectif? Une « session parlementaire d’été ». Les 124 députés siégeront « deux ou trois semaines », fait-on savoir du côté du gouvernement, à partir du 16 juillet. Avant cela, il s’agira d’élire le nouveau président de l’Assemblée législative, mercredi. Un poste occupé par Dave Levac depuis 2011, pendant la fin du règne de Dalton McGuinty, puis pendant tout le règne de Kathleen Wynne.
Le lendemain, la lieutenante-gouverneure, Elizabeth Dowdeswell, prononcera un discours du Trône très attendu. L’exercice consistera à définir la politique du nouveau gouvernement pour les quatre prochaines années.
Cette session d’été n’est pas vraiment une surprise. Techniquement, depuis 2014, les élections ontariennes tenues au mois de juin poussent les élus à avoir recours à ce procédé. Il y a quatre ans, les libéraux avaient déjà siégé quelques semaines à Queen’s Park en juillet, peu de temps après la victoire de Kathleen Wynne.
Vitesse fulgurante pour les annonces
Ce qui est nouveau, par contre, c’est l’enchaînement des annonces à une vitesse fulgurante : retrait du marché du carbone de la province (15 juin), gel des embauches dans la fonction publique (18 juin), limitation de l’Assurance-santé Plus (30 juin), retardement de l’application d’une loi libérale qui aurait resserrer les règles de revente de billets pour des événements sportifs et culturels (4 juillet), limogeage de la directrice scientifique du gouvernement Molly Shoichet (le même jour).
Autant de décisions que M. Ford aura besoin de matérialiser par des lois. C’est tout l’intérêt pour son gouvernement de siéger en été. L’intérêt pour la démocratie, à partir de ce mercredi, sera d’entendre enfin la voix de l’opposition face à M. Ford. Une voix quasi éteinte depuis le 7 juin dernier.
Et ce point n’est pas négligeable. Peu importe ses idées et convictions, Doug Ford aurait manqué de transparence, selon certains, durant ce premier mois. Les questions à l’endroit des élus progressistes-conservateurs ont bien souvent été limitées lors des points de presse. Ainsi, la plupart des décisions en cascade prises depuis un mois sont peu détaillées, et mal expliquées.
Sur les bancs de Queen’s Park, le premier ministre retrouvera sa « meilleure rivale » des dernières élections, Andrea Horwath. Ragaillardie par une campagne dynamique et l’obtention de 40 sièges, la chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) aura la mission importante et délicate d’incarner la seule opposition encore tout à fait audible. Avec sept députés, le Parti libéral est en lambeaux.
Des questions pour Caroline Mulroney
Même si le NPD n’a pas encore annoncé son cabinet fantôme, il y a fort à parier que France Gélinas sera de nouveau la porte-parole de son parti en matière d’Affaires francophones. Du côté des libéraux, c’est Marie-France Lalonde qui occupera le rôle.
Des questions s’imposeront d’entrée de jeu, de la part des deux porte-paroles, quant à l’abolition d’un ministère des Affaires francophones à part entière et l’impact de la suppression de celui des Affaires civiques et de l’Immigration. Des retours en arrière qui ont quelque peu terni les débuts de la ministre déléguée aux Affaires francophones, Caroline Mulroney.
Vainqueur des élections avec le slogan « For the people », Doug Ford doit maintenant convaincre, plus qu’imposer, expliquer plus que laisser un flou persister. Voilà sans doute l’une des clefs s’il veut garder l’appui de ses électeurs — « My friends » — pour les quatre prochaines années.
Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 9 juillet.