Politique

« Plus de femmes doivent s’avancer en politique », dit une experte

Marie-Noëlle Lanthier, présidente de l’organisme Leadership féminin Prescott-Russell (LFPR), la seule école de campagne francophone pour les élections. Photo : Gracieuseté de présidente de Marie-Noëlle Lanthier

Marie-Noëlle Lanthier, ancienne conseillère municipale, est la présidente de l’organisme Leadership féminin Prescott-Russell (LFPR), seule école de campagne francophone pour des élections municipales qui vise au développement des voix féminines en politique à tous niveaux, notamment par le recrutement, la formation et l’accompagnement.

Au sortir des élections provinciales ontariennes, même si les chiffres des députés tendent à évoluer vers une plus grande présence féminine, les femmes sont encore loin de former la moitié des rangs, avec 37 % en Ontario. Doug Ford a également constitué son cabinet ministériel pour un total de 9 femmes, contre 27 hommes.

Augmenter la parité dans la représentation politique à tous les niveaux gouvernementaux en donnant des chances égales aux femmes de se présenter, constituant ainsi un plus grand bassin électoral féminin.

« Queen’s Park compte une élue de moins qu’en 2022, trois de moins qu’en 2018. Est-ce un recul?

Si on pousse le comparatif plus loin, avec les élections de 2011, seulement 30 femmes avaient été élues. Il y a donc une évolution positive, bien qu’en effet les députées soient passées de 49 à 46 candidates au cours des sept dernières années.

Cependant, pour bien comprendre la dynamique, il faut plutôt regarder le nombre de candidates qui se sont présentées. Pour ces élections de 2025, elles ne représentaient que 37 % des candidatures au sein des quatre principaux partis. Le Parti progressiste-conservateur (PC) totalisait 25 % de candidates, le Parti libéral 35 %, le Parti vert 45 % et le NPD, 48 %, ces deux derniers se rapprochant d’une parité.

De tous les partis, le PC est celui qui recrute le moins de femmes, ce qui pourrait s’expliquer par le fait que l’idéologie en question les attire moins.

Nombre de candidates par rapport au nombre total de candidats inscrits dans chacun des partis politiques principaux. Source : Leadership féminin Prescott-Russell (LFPR)

Que dénote cette part moindre de candidates?

Que ce n’est pas que l’électorat vote moins pour des femmes, mais qu’il y a simplement moins de candidates pour qui voter. Quand suffisamment d’entre elles s’avancent, elles ont de très bonnes chances. C’est là où c’est moins paritaire. Plus de femmes doivent s’avancer en politique.

À quelles difficultés se confrontent-elles? 

Elles sont plus sujettes à la cyberviolence, à la discrimination et aux critiques sur leur physique par exemple, choses auxquelles sont peu ou pas confrontés les hommes.

Regrettablement, les femmes se questionnent aussi beaucoup plus, notamment sur leurs compétences et leurs capacités, et sur l’impact que l’entrée en politique pourrait avoir sur leur travail, sur leur famille. J’ai été moi-même conseillère municipale pendant huit ans et j’ai travaillé au sein d’une formation politique pour le recrutement de candidates.

La tendance chez la grande majorité des femmes est d’avoir une plus grande exigence envers elles-mêmes en quelque sorte. Elles doivent se sentir entièrement compétentes et tout savoir sur tel et tel sujet avant de se lancer.

Le nombre de conversations nécessaires pour convaincre une femme de se lancer en politique est sept fois plus élevé que pour un homme. Cela exige un réel effort de soutien.

Les femmes ont-elles plus de difficulté à accéder à différents paliers gouvernementaux, notamment provinciaux? 

Parmi les politiciens qui évoluent d’un palier à un autre, beaucoup étaient déjà connus dans la circonscription et bénéficiaient d’une certaine popularité dans une municipalité. De là pour nous l’importance de recruter plus de femmes en politique municipale parce qu’on crée un plus gros bassin de candidates potentielles.

Il y a plusieurs partis politiques qui seraient à la recherche de candidates pour les différentes circonscriptions. Le palier municipal peut être stratégique pour que des femmes s’avancent en politique et poursuivent leur carrière à d’autres niveaux.

Une fois recrutées, il s’agit aussi de les garder, de créer un environnement où elles sentent qu’elles ont leur place, qu’elles bénéficient d’un temps de parole égal, qu’elles sont reconnues, etc. On travaille fort dans les municipalités pour en créer les conditions.

Le Canada et l’Ontario sont-ils prêts pour élire à nouveau une première ministre?

Le climat politique a beaucoup joué dans le choix des dernières courses mais il faut être leader de parti pour devenir premier ministre et c’est là où ça sort des mains de l’électorat, car c’est le parti qui vote. C’est dont aussi aux partis de montrer que des femmes sont capables de s’atteler à des situations de crise.

Au Canada et au sein des provinces je crois que l’électorat est ouvert et n’a pas de préjugés envers les femmes. Il y a du progrès mais il ne faut pas baisser les bras dans ce travail d’accompagnement, et de campagnes de recrutement.

Nous sommes d’ailleurs la seule école de campagne francophone pour les élections municipales et provinciales. On ne reçoit pas de financement de base de la province, qui est pourtant responsable de la condition féminine. Notre projet est heureusement soutenu par un financement fédéral Femmes et Égalité des genres Canada, et c’est le nerf de la guerre. »