Priorité au plan d’action pour les langues officielles pour la rentrée

Le parlement fédéral à Ottawa. Archives ONFR+

OTTAWA – Les députés sont de retour à la Chambre des communes, ce lundi 29 janvier. En matière de langues officielles, les yeux seront rivés sur la divulgation des détails du plan d’action du gouvernement, fin mars. Du côté des organismes francophones, l’impatience grandit.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

« Les attentes sont immenses par rapport au prochain plan d’action pour les langues officielles. C’est crucial pour nos communautés. Il y a un épuisement et une grogne qu’il ne faut pas sous-estimer. Le succès de ce plan est entre les mains de M. Trudeau, à lui d’agir! », lance le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Jean Johnson.

Depuis l’élection des libéraux en octobre 2015, et plus encore ces derniers mois, l’organisme porte-parole des francophones en contexte minoritaire n’a pas ménagé ses efforts auprès du gouvernement et des élus à la Chambre des communes.


« Ce qu’on attend, c’est une bonification de l’enveloppe et une modification en termes de contenu. » – Jean Johnson, président de la FCFA


La FCFA évalue à 575 millions de dollars supplémentaires les fonds nécessaires dans le prochain plan d’action. L’enveloppe, gelée depuis plus d’une décennie, ne suffit plus à maintenir les services et garantir le travail des organismes francophones de l’extérieur du Québec sur le terrain, estime l’organisme. M. Johnson en veut pour preuve, les menaces de disparition qui planent sur beaucoup d’entre eux.

L’organisme rappelle également ses demandes de revoir la Loi sur les langues officielles et d’ajouter des questions au prochain recensement afin de mieux dénombrer les ayants-droit. La FCFA organisera une journée d’action le 1er mars, avec ses 18 organismes membres, sur la colline parlementaire, afin de rappeler ses attentes.

Deux mois pour agir

Le président de la FCFA assure que la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, a fait preuve d’une grande écoute dans le dossier. Mais lundi matin, lors d’une conférence de presse au parlement, il a livré un message musclé au gouvernement.

« Le gouvernement a développé une culture de l’inaction. On utilise beaucoup de belles paroles, mais on ne les soutient pas avec des gestes concrets. Voilà maintenant presque 27 mois que ce gouvernement est arrivé au pouvoir. Les paroles ne suffisent plus, les francophones n’attendront plus. Nous donnons au gouvernement deux mois pour poser des gestes significatifs dans le dossier des langues officielles. »

Le président de la FCFA, Jean Johnson (au pupitre). Crédit image : Benjamin Vachet

M. Johnson a également interpellé M. Trudeau, réitérant sa demande de rencontre avec le premier ministre.

« Quand on regarde les forums ouverts auxquels M. Trudeau participe, je le trouve habile à adresser les questions qui lui sont posées. Et je pense que M. Trudeau a besoin d’entendre le message des communautés. L’appareil gouvernemental doit recevoir la directive claire de M. Trudeau que c’est une priorité pour lui. Ce n’est pas dans une audience publique qu’il doit dire que les communautés [de langue officielle en situation minoritaire] sont importantes pour son gouvernement. C’est affectueux, mais il n’y a rien qui en ressort. Nous, ce qu’on veut, c’est du concret! »

Le président de la FCFA a dit aussi regretter le manque d’accès au ministre des Finances, Bill Morneau, afin de lui présenter les besoins des communautés francophones en milieu minoritaire.

Les partis d’opposition attendent de voir

À de nombreuses reprises, le gouvernement a demandé aux communautés francophones en contexte minoritaire d’être patientes, soulignant la mise en place à venir du futur plan d’action.

Le porte-parole aux langues officielles pour le Parti conservateur du Canada (PCC), Alupa Clarke. Crédit image: Benjamin Vachet
Le porte-parole aux langues officielles pour le Parti conservateur du Canada (PCC), Alupa Clarke. Crédit image : Benjamin Vachet

Le porte-parole en matière de langues officielles pour le Parti conservateur du Canada (PCC), Alupa Clarke, reconnaît que la situation est critique.

« Quand j’ai commencé comme porte-parole aux langues officielles, j’ai été impressionné par la vitalité et le dynamisme des communautés francophones en contexte minoritaire. Mais je me suis également rapidement rendu compte que cette vitalité est menacée. J’espère qu’il y aura un peu plus d’argent dans le prochain plan, peut-être même une indexation comme ça se fait pour de nombreux programmes. On attend d’en voir les détails. »

Son homologue du Nouveau Parti démocratique (NPD), François Choquette, va plus loin.

« Le plan d’action ne doit pas seulement être vu comme un réinvestissement, même si c’est important, mais comme la vision du gouvernement pour l’avenir des langues officielles dans les cinq prochaines années. Il faut des objectifs clairs, chiffrés, qu’une lentille francophone soit ajoutée au budget et à tous les ministères et que ceux-ci soient évalués chaque année. J’espère qu’il y aura aussi des éléments spécifiques sur l’immigration francophone et la petite enfance. »

Le député néo-démocrate de Drummond blâme le gouvernement de ne pas avoir annoncé les détails de son plan d’action pour les langues officielles plus tôt.

« Ils vont annoncer ça en même temps que le budget et cela risque de ne pas nous laisser l’occasion de bien l’analyser. On dirait qu’ils tentent de l’enterrer sous le budget… »

Ce lundi, la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, s’est voulue rassurante.

« On s’entend qu’il doit y avoir un mouvement d’action sur les langues officielles et ce plan d’action là sera prêt d’ici les deux prochains mois. J’ai toujours dit qu’on ferait notre part et j’ai toujours dit qu’il fallait avoir un bon plan d’action. »

Également à suivre

Autre dossier à surveiller lors de cette nouvelle session parlementaire, celui du bilinguisme des juges à la Cour suprême du Canada. Si le projet de loi de M. Choquette a été défait le 25 octobre, le dossier n’est toujours pas réglé.

Le député néo-démocrate François Choquette. (Crédit photo : Benjamin Vachet)

Le gouvernement devra répondre aux recommandations du comité permanent des langues officielles dans son rapport sur l’accès à la justice dans les deux langues officielles, dont celle d’enchâsser l’obligation de bilinguisme pour les juges du plus haut tribunal du pays dans la Loi sur les langues officielles.

Le comité permanent sur les langues officielles devrait concentrer ses travaux sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles qui fêtera ses 50 ans en 2019.


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